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Le contrôle URSSAF en 10 questions. Par Alexandra Dabrowiecki et Marine Musa, Avocats.
Parution : mardi 21 janvier 2020
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Au regard de la multiplication des contrôles URSSAF au cours des dernières années, nous vous proposons de revenir sur les questions que se posent fréquemment les entreprises qui y sont confrontées.

1. Le contrôle URSSAF, qu’est-ce que c’est ?

L’employeur doit verser des cotisations sociales sur l’ensemble des éléments de rémunération versés aux salariés.

Le contrôle URSSAF a pour objet de vérifier que les employeurs respectent les règles de calcul et de paiement des cotisations de sécurité sociale.

L’inspecteur va par exemple vérifier si les frais de repas pris en charge par l’employeur sans être soumis aux cotisations de sécurité sociale correspondent bien à la définition légale des frais professionnels ou si les véhicules de fonction mis à la disposition des salariés pour un usage privé donnent bien lieu à l’évaluation d’un avantage en nature soumis à charges sociales conformément aux règles applicables.

Le contrôle peut porter sur les trois dernières années civiles et sur l’année en cours. Par exemple, un contrôle réalisé en 2019 porte sur les années 2018, 2017 et 2016.

2. L’inspecteur de l’URSSAF peut-il se présenter dans l’entreprise sans prévenir ?

Non. L’inspecteur doit informer le cotisant du contrôle à venir par le biais d’un avis de contrôle (sauf dans l’hypothèse où le contrôle est conduit dans le cadre de la lutte contre le travail dissimulé).

Cet avis doit contenir certaines mentions : le droit pour l’employeur de se faire assister pendant le contrôle, l’existence de la charte du cotisant contrôlé, l’adresse où elle est consultable et la possibilité pour le cotisant de la recevoir sur demande.

Cet avis doit être adressé au moins 15 jours avant la première visite de l’inspecteur.

Le non-respect de cette formalité d’ailleurs entraîne la nullité du contrôle et du redressement.

3. Le cotisant peut-il être assisté par un avocat pendant le contrôle URSSAF ?

Oui, le cotisant peut se faire assister par un avocat.

Cette faculté d’assistance doit obligatoirement figurer dans l’avis de contrôle.

Cette assistance est d’ailleurs recommandée dès lors qu’elle permet d’éviter certains impairs et de dialoguer avec l’inspecteur sur un pied d’égalité, les considérations juridiques étant particulièrement importantes dans la justification de certains chefs de redressement.

4. Comment se déroule le contrôle ?

Un contrôle sur pièces peut être diligenté auprès des employeurs occupant moins de 11 salariés. Il est réalisé dans les locaux de l’URSSAF, à partir des éléments dont elle dispose et de ceux qu’elle demande.

Pour les autres entreprises, l’URSSAF procède à un contrôle sur place, dans les locaux de l’entreprise.

Pour certains points de contrôle particulièrement fastidieux, tels que l’examen des notes de frais, l’inspecteur peut proposer de recourir à la méthode du contrôle par échantillonnage et extrapolation.

Cette méthode consiste à extraire une population supposée représentative de la population totale puis à extrapoler les résultats à l’ensemble de la population.

S’il accepte l’utilisation de cette méthode, l’employeur est étroitement associé à la procédure et a tout intérêt à s’impliquer pour veiller à ce que l’échantillon utilisé soit représentatif de la réalité de l’entreprise.

Notons que cette méthode présente l’intérêt d’alléger pour l’employeur les contraintes liées à la fourniture des pièces justificatives et de réduire la durée du contrôle.

5. L’inspecteur de l’URSSAF peut-il exiger la communication de n’importe quel document ?

Oui, presque.

La seule condition est que ce document soit nécessaire à l’exercice du contrôle ( [1]).

Ainsi, en pratique, le cotisant peut seulement s’opposer à la remise de documents se rapportant à des questions complètement étrangères à l’objet du contrôle ou à des faits anciens sans rapport avec le contrôle.

En revanche, dès lors qu’un document présente un intérêt pour le contrôle, le cotisant ne peut refuser de le transmettre sans justifier son refus par un motif légitime. A défaut, son refus pourrait être interprété comme un obstacle à contrôle sanctionné par une pénalité (cf. question 9).

6. L’inspecteur de l’URSSAF peut-il exiger l’accès au matériel informatique du cotisant ?

Oui. Lorsque les documents et les données nécessaires au contrôle sont dématérialisés, l’inspecteur peut procéder aux opérations de contrôle par la mise en œuvre de traitements automatisés en ayant recours au matériel informatique du cotisant.

Le cotisant dispose de quinze jours pour s’opposer par écrit.

Toutefois, dans ce cas, il doit :
- soit mettre à la disposition de l’inspecteur les copies des documents, des données et des traitements nécessaires à l’exercice du contrôle, ce qui peut s’avérer être un charge non négligeable en pratique ;
- soit prendre en charge lui-même tout ou partie des traitements automatisés, dans les conditions (normes de fichiers) et délais imposés par l’inspecteur.

En pratique, il n’y a pas d’intérêt particulier à refuser l’accès de l’inspecteur au matériel informatique.

7. L’inspecteur peut-il interroger les salariés de l’entreprise ?

L’inspecteur peut interroger toute personne rémunérée pour connaître notamment :
- leurs nom et adresse ;
- la nature des activités exercées ;
- le montant des rémunérations afférentes à ces activités, y compris les avantages en nature.

En revanche, l’inspecteur ne peut interroger les salariés d’une autre société ou d’un prestataire.

Sauf recherche de travail dissimulé, les auditions des salariés ne sont toutefois valables que si elles sont réalisées dans les locaux de l’entreprise ou sur les lieux de travail, sans perturber la bonne marche de l’entreprise ou l’activité des personnes interrogées.

L’irrégularité de l’audition entraîne la nullité des opérations de contrôle.

8. Comment la clôture du contrôle est-elle formalisée ?

A la fin des opérations de contrôle, l’inspecteur de l’URSSAF adresse au cotisant « une lettre d’observations ». Préalablement à l’envoi de ce courrier, une réunion de clôture est généralement organisée entre les inspecteurs et les responsables de l’entreprise.

La lettre d’observations identifie les chefs de redressement envisagés par l’inspecteur, c’est-à-dire les sommes qu’il envisage de réintégrer dans l’assiette des cotisations de sécurité sociale (exemples : une mauvaise évaluation de l’avantage en nature véhicule, un remboursement de frais de repas non justifiés, l’attribution de cadeaux ou bons d’achats aux salariés en dehors des tolérances administratives…).

L’employeur dispose alors d’un délai de 30 jours (dont il peut demander la prolongation) pour répondre aux observations et contester les redressements envisagés.

Compte tenu des enjeux financiers et de l’importance des considérations techniques et juridiques qui sous-tendent les redressements, il est vivement conseillé de vous faire assister par le responsable paie et un avocat spécialisé dans ce domaine. La réponse à observations permet souvent de faire diminuer le montant du redressement.

L’inspecteur du contrôle doit alors répondre à cette correspondance de manière motivée avant d’adresser, le cas échéant, une mise en demeure.

9. L’obstacle à contrôle : qu’est-ce que c’est ? Qu’est-ce que je risque ?

L’obstacle à contrôle est caractérisé par des actions ou omissions ayant pour objet de faire obstacle ou de se soustraire aux opérations de contrôle.

Il consiste notamment à :
- refuser l’accès à des lieux professionnels ;
- refuser de communiquer une information formellement sollicitée, quel qu’en soit le support y compris dématérialisé ;
- ne pas répondre ou apporter une réponse fausse, incomplète ou abusivement tardive à toute demande de pièce justificative, d’information, d’accès à une information ;
ne pas répondre à une convocation, dès lors que la sollicitation, demande ou convocation est nécessaire à l’exercice du contrôle.

Le fait de faire obstacle à l’accomplissement des fonctions des agents de contrôle entraîne l’application d’une pénalité d’un montant maximal de 7.500 euros par salarié pour un employeur, dans la limite de 750.000 euros par employeur.

10. Puis je contester le redressement ? Comment ?

Oui. Vous pouvez saisir la Commission de Recours Amiable dans le délai de 2 mois à compter de la notification de la mise en demeure.

Attention : la saisine de la Commission de Recours Amiable est un préalable obligatoire à toute procédure devant les tribunaux. Toute action devant le Tribunal sera donc jugée irrecevable si vous n’avez pas préalablement saisi la commission.

En l’absence de réponse de la Commission de Recours Amiable, dans le délai de 2 mois qui suit la réception de votre demande, vous pouvez considérer votre demande comme rejetée et saisir sans attendre le Tribunal de grande instance.

En cas de contestation, vous n’êtes pas tenu de procéder préalablement au règlement des sommes réclamées. Toutefois, il est vivement conseillé de le faire pour éviter que les majorations de retard ne continuent à courir.

Alexandra Dabrowiecki avocat, cabinet MGG VOLTAIRE et Marine Musa avocat, cabinet MGG VOLTAIRE

[1article R. 243-59, II