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PME des Hauts-de-France et d’Auvergne-Rhône-Alpes : La durée du contrôle des administrations est limitée dans le temps ! Par Alexandra Six et Coraline Bonte, Avocats.
Parution : mercredi 26 février 2020
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Un dispositif spécifique a été mis en place temporairement dans ces deux départements : la durée cumulée des contrôles des administrations mis en œuvre à l’encontre d’une entreprise remplissant les deux conditions cumulatives exposées ci-après, ne pourra excéder 270 jours sur une période de 3 ans.

Votre entreprise compte moins de 250 salariés ?
Son chiffre d’affaires annuel est inférieur à 50 millions d’euros ?

En cas de réponse positive à ces deux interrogations (les conditions étant cumulatives), vous êtes recevables à opposer à l’Administration la limitation à 270 jours (9 mois) des contrôles administratifs dont a fait l’objet votre entreprise depuis le 1er décembre 2018.

En effet, une loi récente a mis en place un cadre expérimental d’une durée de 4 années, uniquement dans les Hauts-de-France et en Auvergne-Rhône-Alpes.

Cette disposition concerne l’ensemble des contrôles diligentés par les Administrations de l’Etat, les collectivités territoriales, leurs établissements publics administratifs et les organismes et personnes de droit public et de droit privé chargés d’une mission de service public administratif (y compris les organismes de sécurité sociale !).

Sont donc notamment visés par la législation les contrôles menés par l’URSSAF, la Direction Générale des Finances Publiques (DGFP), la Direction Générale de la Concurrence, la Direction Générale de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF), La Direction Générale des Douanes et Droits Indirects (CGDDI)… Des exceptions sont expressément prévues par le texte. Il conviendra d’y accorder une attention particulière au cas par cas.

En conséquence de ce nouveau dispositif, la durée cumulée des contrôles de ces administrations mis en œuvre à l’encontre d’une entreprise ne pourra excéder 270 jours sur une période de 3 ans.

Ceci s’ajoute aux dispositions spécifiques (propres à chaque contrôle) qui existaient déjà pour limiter la durée des contrôles pris individuellement.

A titre d’exemple, l’article L 52 du Livre des Procédures Fiscales prévoit, à certaines conditions, que « sous peine de nullité de l’imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s’étendre sur une durée supérieure à trois mois […] ».

Toutefois, selon les débats parlementaires, la finalité poursuivie par le législateur est d’obtenir une meilleure coordination des services de l’État en vue d’éviter aux entreprises d’avoir à subir des contrôles successifs, voire simultanés, des différentes administrations de l’Etat, impactant de toute évidence leur activité.

L’esprit de la loi est ainsi révélé par les discussions qui se sont tenues devant l’Assemblée Nationale :

« L’effet attendu est de permettre aux entreprises de mobiliser leur énergie au service de leur activité et de leur développement, au lieu de devoir trop souvent consacrer leurs efforts à justifier de leur bonne foi.

Le texte porte sur la société de confiance. Bien sûr, nous en sommes conscients, la confiance n’exclut pas le contrôle. Encore faut-il que la nature et la durée des contrôles soient raisonnables. De ce point de vue, le délai de neuf mois nous a paru équilibré. »

Quelles sont les modalités concrètes d’appréciation de la limite de 9 mois sur 3 ans ?

C’est un décret du 21 novembre 2018 qui apporte les précisions sur les modalités d’appréciation de cette limitation :

1. L’appréciation de la durée des contrôles se fait au niveau d’un même établissement (i.e. la durée des contrôles qui concerneraient des établissements distincts ne peut se cumuler) ;
2. Le décompte de la durée d’un contrôle se fait de la date de commencement du contrôle figurant sur l’avis de contrôle notifié jusqu’à la date de notification de l’achèvement du contrôle ;
3. Pour ce calcul, la durée des contrôles effectués simultanément doit être additionnée.

S’agissant de la période de trois années sur laquelle se décompte la limitation, il est indiqué, aux termes d’une circulaire du Ministre de l’action et des comptes publics, qu’elle s’apprécie en partant de la date à laquelle l’entreprise oppose la durée cumulée de 270 jours (sous réserve de la date d’entrée en vigueur du dispositif).

Il s’agit donc d’une période « glissante ». Ainsi, l’Administration doit prendre en compte la durée cumulée des contrôles réalisés sur la période de trois ans précédant la date à laquelle le contribuable formule cette opposition.

Quelles conséquences du dépassement de la durée de 9 mois ?

Lors de la mise en œuvre de contrôles, les Administrations doivent communiquer aux entreprises une attestation mentionnant le champ et la durée du contrôle réalisé et ce, par tout moyen.

Ainsi, il appartient à l’entreprise, qui estime que la durée de 9 mois est atteinte d’attirer l’attention de l’Administration sur ce point, en produisant la copie des attestations relatives aux contrôles déjà opérés sur l’établissement concerné.

Dans l’hypothèse où l’entreprise aurait valablement opposé l’atteinte de la durée cumulée, l’Administration est alors tenue de cesser le contrôle en cours ou de le reporter dans le temps.

Il convient désormais de s’interroger sur les conséquences du dépassement de cette durée dans l’hypothèse où le contribuable ne l’opposerait pas à l’Administration…

Ce dispositif illustre l’intérêt pour chaque contribuable d’être bien accompagné lors des opérations de contrôle entreprises par l’Administration… A défaut, il est à craindre que certains droits soient ignorés, et des garanties bafouées.

Alexandra SIX et Coraline BONTE Avocat associé et Avocat collaborateur Cabinet ELOQUENCE Avocats Lille et Paris www.eloquence-avocats.com