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Une nouvelle garantie en matière de droits des contribuables vérifiés. Par Christophe Pelloux, Avocat.
Parution : mardi 10 mars 2020
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L’Article L80 A du LPF prévoit un principe de garantie générale du contribuable contre les changements de doctrine de l’administration.

Les Articles 9 et 11 de la loi du 10 août 2018 pour un Etat au service d’une société de confiance (loi ESSOC) viennent compléter l’Article L80 A du LPF en rajoutant de nouvelles garanties au contribuable vérifié.

L’Article L80 A al. 1 du LPF prévoit un principe de garantie générale du contribuable contre les changements de doctrine de l’administration :

« Il ne sera procédé à aucun rehaussement d’impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l’administration est un différend sur l’interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s’il est démontré que l’interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l’époque, formellement admise par l’administration.

Il en est de même lorsque, dans le cadre d’un examen ou d’une vérification de comptabilité ou d’un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, et dès lors qu’elle a pu se prononcer en toute connaissance de cause, l’administration a pris position sur les points du contrôle, y compris tacitement par une absence de rectification.

Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l’interprétation que l’administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu’elle n’avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l’administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l’impôt et aux pénalités fiscales ».

L’Article L80 B 1° du LPF, quant à lui, dispose de la procédure dite de « rescrit fiscal », qui est dans les faits une réponse écrite de l’administration à une question précise d’un redevable, réponse opposable à l’administration. Le 3° dudit article précise que l’administration fiscale doit répondre dans un délai de trois mois.

Cet article dispose : « La garantie prévue au premier alinéa de l’Article L80 A est applicable :
1° Lorsque l’administration a formellement pris position sur l’appréciation d’une situation de fait au regard d’un texte fiscal ; elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu’elle est saisie d’une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi
 ».

La Loi ESSOC du 10 août 2018 a prévu :

1. La procédure dite du « rescrit contrôle » [1].

L’Article L80 B du LPF a été complété par un 10° qui précise que la garantie générale prévue à l’Article L80 A est applicable « lorsque, dans le cadre d’un examen ou d’une vérification de comptabilité et sur demande écrite du contribuable présentée conformément aux dispositions du 1° du présent article, avant envoi de toute proposition de rectification, l’administration a formellement pris position sur un point qu’elle a examiné au cours du contrôle ».

2. La création d’une « garantie fiscale » [2].

Selon ce texte, les points n’ayant pas fait l’objet d’un chef de rectification sont considérés comme tacitement validés par l’administration fiscale.

De jure, les conclusions d’un contrôle fiscal sont désormais opposables, y compris tacitement, c’est-à-dire dans le silence de l’administration.

Le texte est limpide à ce sujet : cette garantie est applicable « lorsque dans le cadre d’un examen ou d’une vérification de comptabilité ou d’un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, et dès lors qu’elle a pu se prononcer en toute connaissance de cause, l’administration a pris position sur les points du contrôle, y compris tacitement par une absence de rectification ».

Dans le détail, lors d’un contrôle fiscal [3], tout point examiné qui n’a pas entraîné de rectification doit être considéré comme tacitement validé par l’administration [4].

L’administration ne pourra en conséquence plus y revenir lors d’un contrôle ultérieur portant sur les mêmes exercices dans le délai de prescription, soit trois ans. Cette nouvelle garantie est applicable aux contrôles dont les avis sont adressés à compter du 1er janvier 2019.

Nous ne pouvons que nous réjouir de la mise en place de cette garantie, car dans les faits les contribuables vérifiés ne comprenaient pas que l’administration fiscale puisse rectifier des événements ou positions juridiques prises par des contribuables de bonne foi déjà vérifiés par le passé sur ces mêmes événements ou positions.

Source :

BOFIP du 4 mars 2020 https://bofip.impots.gouv.fr/bofip/12155-PGP

Christophe Pelloux Avocat

[1Article 9 de la loi.

[2Article 11 de la loi.

[3Vérification générale de comptabilité ou examen de comptabilité applicables aux personnes morales et entreprises individuelles, mais également pour les examens de situation fiscale personnelle, applicables aux personnes physiques.

[4Sous réserve cependant que le contribuable soit de bonne foi et que l’administration ait pu avoir accès aux documents nécessaires à la bonne appréciation du dossier.