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Les règles budgétaires de la participation pour non-réalisation d’aires de stationnement. Par Ludovic Giudicelli, Avocat.
Parution : lundi 6 avril 2020
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Le Conseil d’Etat a rendu un arrêt particulièrement intéressant concernant les règles budgétaires applicables à l’ancien dispositif de participation pour non-réalisation d’aires de stationnement (PNRAS), ce qui lui vaut d’être mentionné aux Tables du Recueil Lebon [1].

Dans cette affaire trouvaient à s’appliquer les dispositions de l’article L. 421-3 du code de l’urbanisme dans leur version alors applicable au litige.

Pour mémoire, cet article prévoyait que lorsque le pétitionnaire ne pouvait satisfaire lui-même aux obligations imposées par un document d’urbanisme en matière de réalisation d’aires de stationnement, il pouvait être tenu de verser à la commune une participation fixée par le conseil municipal, en vue de la réalisation de parcs publics de stationnement.

Ce dispositif a été supprimé et n’est plus en vigueur depuis le 1er janvier 2015.

Toutefois, des litiges liés à cette participation se présentent toujours devant le juge administratif.

Et pour cause, l’article R. 332-22 du code de l’urbanisme dans sa version alors applicable précisait que le redevable de la participation pouvait obtenir, sur sa demande, le dégrèvement ou la restitution si, dans le délai de cinq ans à compter du paiement, la commune compétente n’avait pas affecté le montant de la participation à la réalisation d’un parc public de stationnement.

Dans l’affaire jugé par le Conseil d’Etat, une société a obtenu un permis de construire le 20 septembre 2005 en vue d’édifier des logements et un local d’activités. Un permis de construire modificatif a ensuite été délivré le 15 février 2007.

Cette dernière autorisation a mis à la charge du bénéficiaire une participation d’un montant de 166.860 euros sur le fondement des dispositions précitées, pour douze places de stationnement.

Le 19 octobre 2007, la société s’est acquittée de cette participation à hauteur de 110 466,72 euros, somme correspondant à la participation demandée pour huit places de stationnement exigées par le permis de construire initial.

La société a ensuite demandé la restitution de sa participation par lettre du 21 février 2012, demande rejetée le 2 avril 2012.

Le tribunal administratif et la cour administrative d’appel ont donné raison à la société aux motifs que si la commune justifiait avoir exposé des dépenses pour l’aménagement d’un parking déterminé pour un montant supérieur au montant global de différentes participations pour non-réalisation d’aires de stationnement, elle n’établissait pas que la participation versée par le bénéficiaire avait été effectivement affectée à cette opération.

Le Conseil d’Etat a toutefois indiqué qu’en statuant de la sorte, les juges du fond ont commis une erreur de droit.

Il en profite pour rappeler, de manière particulièrement didactique, les règles applicables en la matière.

Le Conseil d’Etat rappelle que la participation pour non-réalisation d’aires de stationnement doit être regardée, non comme une imposition, mais comme une participation que la loi autorise la commune à percevoir sur le bénéficiaire du permis de construire à raison des équipements publics dont la réalisation est rendue nécessaire par la construction.

Dès lors, cette participation doit être affectée au financement de la réalisation d’un parc public de stationnement dans le délai de cinq ans à compter de son paiement.

Cette affectation implique le financement, par la commune, dans le délai imparti, d’un parc public de stationnement pour un montant égal ou supérieur à celui des participations perçues pour non-réalisation d’aires de stationnement.

En principe, cette affectation doit être établie par les documents budgétaires de la commune, dans le respect du cadre budgétaire et comptable applicable.

Cependant, le Conseil d’Etat relève une exception, non prévue par les textes, en indiquant que la commune peut cependant justifier de cette affectation par tout moyen.

Le Conseil d’Etat relève donc l’erreur de droit de la cour administrative d’appel et annule l’arrêt litigieux en indiquant que :

« En excluant ainsi que la commune puisse faire état de tous éléments de nature à établir l’affectation de la participation dès lors qu’elle n’était pas précisément retracée dans les documents budgétaires de la commune, la cour a entaché son arrêt d’erreur de droit ».

Nul doute que l’arrêt du Conseil d’Etat ne manquera pas de servir de base aux litiges actuellement en cours concernant l’ancienne participation pour non-réalisation d’aires de stationnement.

Ludovic Giudicelli Avocat au Barreau de Paris

[1Conseil d’Etat, 11 mars 2020, Commune d’Arpajon, n° 421445, Mentionné aux Tables du Recueil Lebon - https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriAdmin.do?oldAction=rechJuriAdmin&idTexte=CETATEXT000041714224&fastReqId=278091037&fastPos=1