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Les locations meublées de tourisme et les nouvelles obligations issues de la Loi Elan. Par Ilanit Sagand, Avocat.
Parution : lundi 11 mai 2020
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La loi ALUR du 24.03.2014 avait strictement encadré ce nouveau mode d’hébergement de type AirBnB, Abritel...qualifiables de « meublés de tourisme ». Puis fut le tour de la loi pour une économie numérique du 07.10.2016 qui a institué des obligations contraignantes à l’égard des plateformes de location en meublé de tourisme. Ces dispositions ont encore été renforcées par la loi Elan du 23.11.2018 qui prévoient également de nouvelles sanctions.

I. Définir le meublé de tourisme.

Alors que le meublé de tourisme n’était défini que dans le décret d’application à l’article D 324-1 et non dans la loi. Le législateur a ajouté un article.
L’article L 324-1-1 du code du tourisme précise que les meublés de tourisme sont des villas, appartements ou studios meublés, à l’usage exclusif du locataire, offerts à la location à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile et qui y effectue un séjour caractérisé par une location à la journée, à la semaine ou au mois.

II. Renforcer les obligations et les mesures de contrôle à l’égard du loueur et des intermédiaires.

1/ Déclaration préalable et enregistrement de toute location.

L’article précité dispose que dans les communes où le changement d’usage des locaux destinés à l’habitation est soumis à autorisation préalable, cette déclaration depuis la loi Elan doit préciser si le meublé de tourisme offert à la location constitue la résidence principale du loueur.
Rappelons que bien avant la loi Elan, un système de déclaration auprès du maire de la commune dans laquelle est situé l’immeuble avait été instauré, mais cette déclaration n’était pas obligatoire lorsque le local loué constituait la résidence principale du loueur.

Toutefois, depuis la loi Elan si le bien est situé sur le territoire d’une commune où une déclaration préalable soumise à enregistrement est néanmoins imposée par le Conseil municipal, celle-ci doit désormais préciser si le bien constitue la résidence principale du loueur (il y réside à titre de logement huit mois par an).

L’article L 324-1-1 III dispose en effet :
« Par dérogation au II, dans les communes où le changement d’usage des locaux destinés à l’habitation est soumis à autorisation préalable au sens des articles L. 631-7 à L. 631-9 du code de la construction et de l’habitation, une délibération du conseil municipal peut décider de soumettre à une déclaration préalable soumise à enregistrement auprès de la commune toute location d’un meublé de tourisme.
La déclaration indique si le meublé de tourisme offert à la location constitue la résidence principale du loueur au sens de l’article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée
 ».

L’intermédiaire à savoir le site de mise en relation entre loueur et locataire doit tout d’abord informer le loueur d’un meublé de tourisme des obligations de déclaration ou d’autorisation préalables qui incombent au loueur.

Dans un second temps, l’intermédiaire doit s’assurer et ce en amont, depuis la loi Elan soit préalablement à la publication ou mise en ligne de l’annonce, que le loueur a effectué les démarches.

Ce dernier devra notamment produire une attestation sur l’honneur du respect de ses obligations indiquant si le logement constitue ou non sa résidence principale et son numéro de déclaration le cas échéant [1].

2/ Durée maximale de location.

La loi Elan qui a modifié l’article L 124-1-1 du code du tourisme vient ajouter que dans les communes où la procédure d’enregistrement est mise en place, le loueur d’un meublé de tourisme qui est déclaré comme sa résidence principale ne peut louer au-delà de 120 jours au cours d’une même année civile. Seule exception à ce nombre de jours maximal : raison professionnelle, raison de santé ou force majeure.

La commune peut désormais demander au loueur de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels le logement a été loué, et ce jusqu’au 31 décembre de l’année qui suit celle au cours de laquelle le meublé a été mise en location.

Toutefois, la Commune peut également dans ce même délai solliciter du propriétaire de la plateforme de mise en relation le nombre de jours au cours desquels le meublé a fait l’objet d’une location par son intermédiaire.

D’ailleurs si l’intermédiaire a connaissance du dépassement de la limite de 120 jours par année civile, il doit procéder au retrait de l’annonce sur son site.

Enfin, des agents assermentés du service municipal ou départemental sont habilités à contrôler le respect des obligations des loueurs et des intermédiaires.

III. Sanctionner les intervenants.

1/ Le non respect des obligations par le loueur.

Toute personne ayant loué son logement sans avoir procédé à une déclaration préalable encours une amende civile d’un montant maximal de 5 .000 €.
Tout bailleur qui loue un meublé de tourisme plus de 120 jours par année civile s’expose à une amende civile ne pouvant excéder 10.000 €.
Tout loueur qui n’aura pas répondu à la demande de transmission de la commune dans le délai imparti encourt une amende maximale de 10.000 €.
Enfin le loueur qui n’aurait pas respecté la procédure de changement d’usage des locaux pourra être redevable d’une amende civile maximale de 50.000 € ainsi que d’une astreinte de 1.000 € maximum par jour et mètre carré du local en question et encourir l’expulsion et exécution de travaux aux frais du contrevenant.

2/ Le non respect des obligations par les intermédiaires.

Les intermédiaires pourront également faire l’objet d’une condamnation à une amende civile dans plusieurs cas de figures.

1e cas : Ils n’informent pas le loueur de ses obligations, ils n’obtiennent pas du loueur la déclaration sur l’honneur attestant du respect de ses obligations et indiquant si le logement constitue sa résidence principale ou encore ils ne publient pas le numéro de déclaration et d’enregistrement dans l’annonce.
Dans ce 1e cas, les intermédiaires encourent une amende de 12.500 € maximum.

2e hypothèse : Défaut de transmission à la commune dans le mois de la demande, du nombre de jours de location pour le meublé ayant fait l’objet d’une demande d’informations. Dans cette hypothèse, l’intermédiaire peut être condamné à une peine d’amende maximale de 50.000 €.

3e cas de figure : L’intermédiaire ne retire pas l’offre de location de résidence alors que la limite de 120 jours au cours de l’année civile est dépassé et continue donc à offrir à la location un meublé de tourisme, résidence principale du loueur.
Dans ce cas de figure, l’intermédiaire pourra également être condamné à une peine d’amende maximale de 50.000 € par annonce faisant l’objet d’un manquement.

L’amende sera prononcée en cas de poursuite par le Président du Tribunal judiciaire (anciennement TGI), statuant en la forme des référés, sur demande de la commune, dans laquelle est située le meublé de tourisme, étant précisé que le montant de l’amende sera reversé à la commune.

Ainsi comme nous avons pu le constater, la loi Elan a renforcé à la fois les obligations du loueur, des intermédiaires mais également les sanctions à l’égard de ces intervenants.

Ilanit Sagand Avocat à la Cour, Consultante et Administratrice de l'UNPI.

[1art. L 324-2-1 du code du tourisme