Village de la Justice www.village-justice.com

Avocats, comment communiquer sur les réseaux sociaux ?
Parution : vendredi 20 août 2021
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/avocats-pourquoi-comment-etre-presents-sur-les-reseaux-sociaux,36761.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

Créer un profil sur les réseaux sociaux, c’est à la portée de tous. Ce qui l’est moins, c’est de faire vivre correctement ce profil qui doit refléter au plus près votre personnalité professionnelle et votre activité, vous mettre en avant sans être pour autant une mise en scène narcissique, le tout en respectant les règles déontologiques de la profession. Un exercice de funambule donc.
Voici les conseils de Stéphanie Chane-Waï, Consultante marketing et communication chez Juricommunication et de Dimitri Kernel, Juriste et dirigeant de l’agence de communication pour avocats La Plaidoirie, pour vous aider à garder l’équilibre !

Stéphanie Chane-Waï

Consultante marketing et communication

Dimitri Kernel

Juriste et dirigeant d’une agence de communication pour avocats

Quel est l’intérêt pour les avocats d’être sur les réseaux sociaux ?

Pour Dimitri Kernel, « dans le contexte de concurrence grandissante, la présence des cabinets d’avocats sur les réseaux sociaux est essentielle. Ils offrent une visibilité considérable et sont une excellente vitrine permettant de toucher rapidement une audience large et ciblée. »

Et si l’on parle de réputation en ligne, Stéphanie Chane-Waï rappelle que « ce sont des vecteurs qui permettent de partager et de répandre une réputation positive. »

« En étant actif sur les réseaux, un avocat pourra présenter ses domaines d’interventions, son parcours, l’actualité de son cabinet et démontrer son expertise par la publication d’articles. Cela permet de trouver de nouveaux clients, de fidéliser ceux déjà existants et d’améliorer la e-reputation.
Aujourd’hui, les consommateurs ont systématiquement le même réflexe : rechercher les références de l’entreprise ou du produit sur les moteurs de recherche avant toute commande. Le client potentiel veut connaître les spécificités de l’offre mais également les avis attribués. La présence en ligne d’un cabinet est source de confiance et le rend plus accessible. » selon Dimitri Kernel.

Stéphanie Chane-Waï résume : « Cela permet de présenter ses offres de services et exposer la bonne santé de son cabinet. »

« Autre intérêt des réseaux sociaux » selon Dimitri Kernel, « le recrutement. La recherche de nouveaux collaborateurs s’effectue en effet de plus en plus via ces plateformes. »
« De fait, l’entreprise augmente également ses sources dans la prospection de nouveaux talents comme de nouveaux clients. » poursuit Stéphanie Chane-Waï.

« Enfin, par les réseaux sociaux, l’avocat optimise le référencement naturel de son cabinet. Il remonte ainsi davantage dans les premiers résultats des moteurs de recherche. Dans la même logique, en partageant le contenu de son site internet, comme ses articles de blog, l’avocat augmente le trafic sur son site et boost sa diffusion. » précise Dimitri Kernel.


Souhaitable pour tous les avocats ?
« Oui ! Tous les avocats doivent être présents sur les réseaux sociaux. Cette affirmation est valable peu importe le domaine d’intervention du cabinet, le barreau dans lequel l’avocat exerce ou encore la taille de la structure. Pour être pleinement inscrits dans leur temps et participer à la transformation numérique du monde du droit, les avocats ont tout intérêt à se saisir de ces outils. » (Dimitri Kernel)


Comment se préparer ?

Quels objectifs ?
Dimitri Kernel : « Cette présence numérique doit faire l’objet d’une réflexion en amont. L’avocat doit en effet s’interroger sur les objectifs désirés et identifier ses cibles ainsi que leurs besoins. Concrètement, une stratégie de communication doit être établie au préalable pour ne pas se lancer à l’aveugle. »

Prenez votre GPS !

Stéphanie Chane-Waï : « Il ne faut pas se lancer dans la communauté sans tactique : prenez votre GPS spécial réseaux sociaux ! »

1 - Votre destination = votre cible.

Qui vais-je toucher ? Quelle sera la tonalité de mon discours ?

2 - Quel trajet ?

Obstacles, différents trajets possibles ?

3 - Dans quelles conditions ?

L’actualité de mon cabinet d’avocats, les écrits de mes équipes, mes offres, mon activité…mais aussi l’actualité des secteurs de mes clients.


Trois points sont essentiels pour un bon profil :

Le profil doit être complet.

« L’avocat doit veiller, sur chaque réseau social, à compléter l’ensemble des éléments de description possible.
Concrètement, il devra mentionner le nom de son cabinet, ses domaines d’interventions, ses coordonnées, l’adresse de son site internet, les membres de son équipe, ses valeurs et ajouter un pitch descriptif. » (Dimitri Kernel)



« Allez jusqu’à renseigner le ou les domaines de pratiques dans l’espace dédié sur la fiche et les expériences avec quelques détails clés (RGPD, fiscalité, capital venture, LBO, M&A…) qui optimisera la visibilité de la fiche dans les résultats de recherche et sa lecture pour le lecteur. » (Stéphanie Chane-Waï)

« Le profil doit également être illustré par un logo, par une photo de l’équipe, voire des bureaux. Par ces illustrations, l’identité visuelle du cabinet est mise en avant. » (Dimitri Kernel)



« La photo permet de conserver la composante humaine. Il faut une photo récente et "propre" : n’hésitez pas à vous rendre chez un photographe professionnel ou à exploiter la photo utilisée par le service communication et marketing de votre cabinet. Et privilégiez le logo pour l’arrière-plan ! » (Stéphanie Chane-Waï)

La communication doit être variée.

Pour Dimitri Kernel : « Une bonne stratégie de communication est une stratégie diversifiée. Le cabinet d’avocats doit veiller à varier le contenu publié au quotidien pour ne pas lasser son audience.
Pour témoigner de certaines convictions ou combats, ils peut aussi être aussi intéressant d’évoquer les dossiers plaidés.

En plus de varier le contenu, c’est aussi le format qui doit être diversifié. Les réseaux sociaux permettent de partager des supports très divers : photos, vidéos, images (créations graphiques), infographies, stories, etc. »

« Le contenu doit être varié et équilibré : d’un côté informations cabinet, savoir et savoir-faire, productions et de l’autre celles du secteur de vos clients. Apporter un regard autre que juridique, une plus-value à l’information partagée. » (Stéphanie Chane-Waï)

Le contenu doit être accessible.

Dimitri Kernel rappelle « qu’aujourd’hui, la tendance est de faciliter l’accès au droit. Cela doit se traduire dans la stratégie de communication. Sans dénaturer le droit, il est important, pour toucher un public de non-juristes, de simplifier le droit et de le rendre pédagogique. Le travail de vulgarisation est important. Le legal design et les vidéos juridiques sont en ce sens des outils adaptés. »

Stéphanie Chane-Waï confirme : « Oui, attention au jargon et au langage technique au risque de n’être compréhensible que de la sphère juridique au sens strict et d’avoir oublié l’essentiel : à qui vous adressez-vous ? »

Enfin, pensez à avoir une écriture adaptée aux réseaux sociaux (phrases courtes, utilisation d’emojis et d’hashtags).

Quels sont les faux pas à éviter ?

Dimitri Kernel : « Même si la déontologie s’est assouplie en la matière, un cabinet d’avocats devra veiller à respecter les règles en vigueur. La communication des avocats reste encadrée et un cabinet ne peut déroger à certains principes essentiels de la profession. » (Voir encadré ci-dessous.)

Attention, « évitez tous les messages qui pourraient atteindre à votre crédibilité » prévient Stéphanie Chane-Waï.

« Gardez une frontière nette en la vie privée et la vie professionnelle. La communication sur les réseaux sociaux doit rester uniquement tournée vers l’aspect professionnel. Dévier sur des publications d’ordre personnel ne me semble pas être une stratégie pertinente. Le risque principal est d’arriver vers des sujets délicats vous faisant sortir de votre rôle d’avocat de son rôle, voire de créer un mauvais buzz.

Attention également au nombre de publications : il faut trouver le juste milieu. Une communication excessive risquera de saturer l’écoute de votre réseau tandis qu’une communication trop rare vous fera oublier et sera mauvaise pour les algorithmes. Opter pour des publications originales, régulières et pertinentes. » (Dimitri Kernel)

« Il faut en donner assez pour être repéré mais éviter l’orgie en en offrant trop !
Par ailleurs, de nombreux espaces ne sont pas exploités, notamment sur Linkedin : le résumé d’introduction, les réalisations, le parcours universitaire, les spécialisations, les contributions écrites… sont souvent vides. Remplissez-les ! » (Stéphanie Chane-Waï)

Concernant la taille des posts, Dimitri Kernel indique qu’il ne faut pas partager un contenu trop court, dépourvu d’informations réelles. « A l’inverse, les publications trop longues ne sont pas adaptées au comportement actuel des internautes ayant besoin la recherche de visuels et de contenus express. »

« Attention, l’achat d’abonnées sur les réseaux sociaux est une pratique à bannir. La communauté doit être réelle et réactive avec vos aux contenus diffusés. Le credo est de privilégier la qualité à la quantité. » (Dimitri Kernel)

Dimitri Kernel ajoute qu’ « il faut avoir en tête qu’un réseau social est un lieu d’échanges. Ne pas répondre aux commentaires, messages et avis serait une erreur. Les pages doivent faire l’objet d’interactions pour qu’une communauté fidèle se créer. Réagir rapidement sur les réseaux témoigne de la disponibilité, de l’écoute et est gage de confiance.

Enfin, ultime conseil : être patient et ne pas être focus sur les résultats de court terme. La stratégie de communication s’analyse en effet sur le long terme. »

Ce que dit la déontologie.
"L’avocat participant à un blog ou à un réseau social de type Facebook ou Twitter en sa qualité d’avocat pour faire la promotion de ses services doit respecter les principes essentiels de la profession, dont le respect du secret professionnel.
Une page professionnelle doit faire état de la qualité d’avocat et permettre de l’identifier dans les conditions de l’article 10.2 « Dispositions communes à toutes communications » du RIN. Il est recommandé aux avocats de faire preuve de la plus grande prudence dans leurs propos, notamment lors d’une réponse hâtive sur un sujet houleux ou léger.
Les profils personnels et professionnels doivent être bien dissociés.
En toute hypothèse, l’avocat doit respecter les termes de son serment notamment quant au contenu des messages.
L’avocat qui utilise son profil Facebook pour faire la promotion de son activité, doit respecter les dispositions de l’article 10 du RIN relatives à la publicité par internet (CNB, Comm. RU, avis n° 2011-054 du 19 déc. 2011).
Il doit en conséquence en informer son bâtonnier sans délai et lui communiquer les adresses permettant d’y accéder
."
(Extrait du Vade-Mecum de la Communication des Avocats. Page 48)

A lire également : Le Guide pratique Médias et réseaux sociaux édité par le Barreau de Paris.

Propos recueillis par Nathalie Hantz Rédaction du Village de la Justice.