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Le contrat nouvelle embauche épilogue : les indemnités à réclamer en cas de litiges en cours, par Clélie de Lesquen-Jonas, Avocat
Parution : mardi 23 septembre 2008
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Le contrat « nouvelle embauche », appelé CNE et institué par l’ordonnance n° 2005-893 du 2 août 2005, permettait à un employeur de rompre un contrat de travail par lettre recommandée non motivée pendant une période de « consolidation » de 2 ans et sans avoir non plus à procéder à un entretien préalable.

Le CNE était ainsi un contrat à durée indéterminée dont le régime du licenciement était simplifié pendant deux ans puisqu’il n’était plus nécessaire pour l’employeur de justifier d’une cause réelle et sérieuse.

Par ailleurs, lors de la rupture du contrat « nouvelle embauche » le salarié avait droit à une indemnité de 8% du montant total de la rémunération perçue.

Le CNE a connu un parcours semé d’embûches puisque son régime a été condamné par la jurisprudence comme étant contraire à la convention n°158 de l’Organisation internationale du travail, qui est d’application directe en droit interne et qui exige notamment un « motif valable » de licenciement.

Cette jurisprudence qui procédait à la requalification des CNE en CDI de droit commun et qui a été, au demeurant, déjà longuement commentée sur ce site, avait devancé le législateur, lequel a finalement abrogé le CNE par l’article 9 de la loi n°2005-596 du 25 juin 2008.

Désormais, tous les contrats « nouvelles embauche », en cours depuis la publication de la loi, sont automatiquement requalifiés en CDI de droit commun par l’effet de la loi sans qu’il soit nécessaire que le salarié en fasse la demande.

Mais, même si le CNE est bien mort et enterré, il existe des litiges en cours relatifs aux contrats « nouvelle embauche » rompus avant la publication de la loi du 25 juin 2008.

Or, si la jurisprudence antérieure à la loi n°2005-596 du 25 juin 2008 appliquait aux ruptures des CNE les règles de licenciement applicable aux CDI de droit commun, certaines questions relatives aux indemnités restaient en suspens.

L’arrêt rendu le 1er juillet 2008 par la chambre sociale de la Cour de Cassation permet de résoudre la question des indemnités soulevée à l’occasion de la rupture d’un CNE survenue avant l’entrée en vigueur de la loi du 25 juin 2008.

En l’espèce, à la suite d’un CDD d’une durée de six mois, un salarié avait conclu un CNE pour le même emploi. Quelques mois après l’employeur a, sans motivation, rompu le contrat « nouvelle embauche ».

La Cour de Cassation a confirmé l’arrêt de la Cour d’appel de Paris rendu le 6 juillet 2007 qui avait requalifié le contrat « nouvelle embauche » en contrat à durée indéterminée de droit commun et a, par ailleurs, fait application du régime des indemnités de rupture d’un CDI de droit commun en accordant à la salariée des dommages et intérêts pour rupture abusive ainsi que pour non respect de la procédure de licenciement.
L’indemnité spéciale de 8% prévue en cas de rupture d’un CNE a donc été de facto écartée.

En outre, une autre question a été posée à la Cour de Cassation : la signature d’un CNE à l’issue d’un CDD permet-il d’exclure l’application de la prime de précarité ?

En effet, une prime de précarité, correspondant à 10% de la rémunération brute versée au salarié et prévue par l’article L 1243-8 du Code du travail (ancien article L 122-3-4) est due par l’employeur lorsqu’aucun CDI n’est proposé à l’issue d’un CDD.

Or, bien que le CNE soit un contrat par nature indéterminée, la Cour de Cassation a considéré que la signature d’un tel contrat à l’issue d’un CDD ne pouvait dispenser l’employeur de verser la prime de précarité.

La Cour de Cassation s’est fondé sur la distinction des règles de licenciement existant entre un CDI de droit commun et la facilité de licenciement octroyée à l’employeur pendant deux ans pour les contrats « nouvelle embauche » en affirmant que :

« le contrat à durée indéterminée, ayant pour finalité d’inciter à la stabilisation de l’emploi est sans application lorsqu’à la fin du contrat à durée déterminée le salarié se voit proposer un contrat excluant pendant deux premières années de sa conclusion l’application des règles relatives au droit commun du licenciement. »

La décision de la Cour de Cassation s’est fait l’écho de la rue : « CNE=précarité ».

Maître Clélie de Lesquen-Jonas

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