Village de la Justice www.village-justice.com

Peut-on obtenir réparation pour un syndrome dépressif résultant d’un licenciement ? Par Emilien Halard.
Parution : mercredi 25 octobre 2023
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/peut-obtenir-reparation-pour-syndrome-depressif-resultant-licenciement,47634.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

L’indemnité pour licenciement injustifié ne peut pas se cumuler avec une indemnité pour préjudice moral résultant de la rupture du contrat de travail, sauf préjudice distinct résultant d’une faute de l’employeur.

Il est fréquent que le stress et le mal-être provoquent des douleurs au dos.

C’est ce qui est arrivé à un chauffeur de camion à ordures (« conducteur ripeur ») licencié pour inaptitude.

Ce salarié obtient en justice que son licenciement soit considéré comme sans cause réelle et sérieuse et obtient l’indemnité correspondante, au montant plafonné par le barème Macron.

Seulement, comme pour beaucoup de salariés licenciés, son licenciement a entraîné chez lui un syndrome dépressif.

Et ce syndrome dépressif a pérennisé sa pathologie lombaire, comme l’atteste son médecin traitant.

L’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse inclut le préjudice moral résultant de la rupture.

Le salarié réclame en conséquence une indemnité supplémentaire pour réparer ce préjudice.

A tort, selon la Cour de cassation [1], qui rappelle :

Mais quelles sont ces fautes de l’employeur qui pourraient alors justifier une indemnisation supplémentaire ?

Il en existe deux sortes :

1. Les manquements à l’obligation de sécurité.

L’employeur est tenu d’une obligation de sécurité envers ses salariés.

S’il y manque, il est tenu de réparer le préjudice qu’il a ainsi causé.

Cette réparation peut être accordée en justice à l’occasion de la rupture du contrat de travail, mais aussi en dehors de toute rupture du contrat de travail.

Cela aurait pu être le cas de notre conducteur ripeur, s’il avait allégué que son mal de dos provenait des conditions d’exécution de son travail. Mais justement, c’est à son licenciement qu’il attribuait son état de santé et non à ses conditions de travail.

2. Les conditions vexatoires de licenciement.

Lorsque les circonstances d’un licenciement sont brutales et vexatoires, la faute commise par l’employeur est bien distincte de sa décision de licencier.

Et parce que cette faute est distincte, une indemnité pour conditions brutales et vexatoires peut être accordée, que le licenciement soit justifié ou non.

La Cour de cassation a ainsi eu l’occasion de reconnaître des conditions brutales et vexatoires de licenciement :

Dans le cas de notre conducteur ripeur, le syndrome dépressif ne résultait cependant pas des conditions du licenciement, mais bien du licenciement lui-même.

Le préjudice n’était donc lié qu’à la rupture du contrat et ne pouvait pas donner lieu à indemnisation supplémentaire.

Emilien Halard Responsable affaires sociales Ancien avocat

[1Cass. Soc. 11 octobre 2023, 22-13.237.

[2Cass. Soc., 7 juin 2006, n°04-40.912.

[3Cass. Soc., 25 février 2003, n°00-42.031 ; Cass. Soc., 16 décembre 2020, n°18-23.966.