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Le dur combat de la reconnaissance de "l’aliénation parentale" devant les juridictions. Par Jessica Fievez, Avocat.
Parution : lundi 6 novembre 2023
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Il n’est pas rare que l’enfant soit pris à partie lors de la séparation de ses parents.
L’enfant est alors placé au cœur d’un conflit de loyauté et doit choisir, malgré lui, entre son père et sa mère. Seulement, il arrive souvent que ce conflit de loyauté ne soit alimenté que par un seul des parents. Ce dernier va alors se victimiser et tenter de faire culpabiliser l’enfant s’il se dirige vers l’autre.

L’article 371-1 du Code civil dispose :

« L’autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant.
Elle appartient aux parents jusqu’à la majorité ou l’émancipation de l’enfant pour le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre son développement, dans le respect dû à sa personne.
L’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ou psychologiques.
Les parents associent l’enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité
 ».

Par l’aliénation parentale, l’intérêt de l’enfant s’estompe progressivement et sa protection devient problématique.

Les lourdes conséquences de l’aliénation parentale.

Progressivement, l’enfant n’est plus autorisé à aimer son autre parent, les contacts sont coupés, jusqu’à atteindre un point de non-retour : l’aliénation parentale.

Dénigrations constantes, incitation de l’enfant à haïr ou à craindre l’un de ses parents, diffusion de fausses informations à son sujet, diabolisation… L’enfant se sent obligé de choisir son camp et l’autre parent est isolé.

Malheureusement, les répercussions sur l’enfant sont terribles. Celui-ci est en proie à l’anxiété, la dépression, des troubles du comportement, une perte de confiance en lui et envers les autres…

La perte de contact entre l’enfant et le parent peut durer des mois, voire des années.

Un sentiment d’impuissance s’installe pour le parent victime de ce processus et le fossé se creuse avec l’enfant.

Comment démontrer l’aliénation parentale ?

Plus facile à dénoncer qu’à démontrer, l’aliénation parentale ne fait pas l’unanimité devant nos juridictions.

Nombreux sont les parents qui tentent de dénoncer ce syndrome, en vain.

L’aliénation parentale fait l’objet de controverses et est estimée comme sur-utilisée.

La notion de conflit de loyauté remplace l’aliénation parentale que le parent cherche à dénoncer.

Il est donc impératif de démontrer la réalité de ce processus qui s’est progressivement installé.

Une procédure devant le juge aux affaires familiales peut être intentée afin de faire rétablir ses droits les plus élémentaires de parent et ce, dans l’intérêt supérieur de l’enfant.

De nombreux justificatifs à l’appui de la démonstration pourront être communiqués, comme les attestations de proches et de professionnels, les échanges entre les parents ou encore les échanges entre le parent et l’enfant, etc.

Il peut être demandé devant le juge aux affaires familiales la réalisation d’une expertise médico-psychologique de la famille afin de mettre en avant la souffrance de l’enfant et la psychologie des parents.

Si l’enfant est en danger, le juge pour enfants peut également être saisi.

L’aliénation parentale mène souvent au délit de non-représentation d’enfant.

Le parent n’accueille plus son enfant comme prévu, au motif que ce dernier refuse de le voir.

L’autre parent camoufle sa responsabilité et fait peser sur les épaules de l’enfant toute la responsabilité.

Une plainte peut être déposée pour non-représentation d’enfant et le tribunal correctionnel peut être saisi.

L’article 227-5 du Code pénal dispose en effet :

« Le fait de refuser indûment de représenter un enfant mineur à la personne qui a le droit de le réclamer est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ».

Le syndrome d’aliénation parentale est difficile à démontrer, voire à être accepté par nos juridictions.

La jurisprudence reconnaît timidement la réalité de ce syndrome inquiétant.

Une fois la brèche installée, les relations parent/enfant sont difficiles à rétablir et le combat se poursuit souvent au-delà des décisions de justice.


Avertissement de la Rédaction du Village de la Justice :
Le concept du "Syndrome d’aliénation parentale" fait l’objet de controverses. Il ne fait à ce jour l’objet d’aucun fondement scientifique - mais à l’inverse il n’est pas interdit et est utilisé dans de nombreux dossiers juridiques.
L’expression et l’usage du concept sont fortement déconseillés au niveau européen (https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/TA-9-2021-0406_FR.html), étudiée au niveau français avec une note d’information mise en ligne sur le site intranet de la direction des affaires civiles et du Sceau du ministère de la Justice pour informer les magistrats du caractère controversé et non reconnu du syndrome d’aliénation parentale). Note introuvable à notre connaissance (voir à ce sujet : https://www.senat.fr/questions/base/2017/qSEQ171202674.html ).
Les enjeux sont multiples et nous semblent devoir être tranchés par une autorité publique.
Dans l’attente de clarification, nous vous invitons à prendre avec grandes précautions cette expression qui est ici employée sous la seule responsabilité de l’auteur.

Jessica Fievez Avocat au Barreau de Paris Droit pénal - droit de la famille Conférencière et chargée d\'enseignement au sein de l\'Université Paris II Assas www.fievez-avocat.fr