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Quelle stratégie pour faire exécuter un jugement ? Par Pierre Gonzva
Parution : vendredi 11 février 2011
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En matière d’impayé, on a coutume d’opposer la phase amiable et la phase judiciaire.

Durant la période amiable, l’objectif est d’obtenir un règlement du débiteur : paiement immédiat, accord de règlement selon un plan négocié, transaction.
Si la phase amiable n’aboutit pas à une solution, il convient alors de mettre en œuvre la procédure judiciaire : injonction de payer pour les cas simples ou les sommes modiques, référé quand le dossier le permet, assignation au fond pour les affaires plus complexes.

L’obtention du titre exécutoire ne représente pas la fin du problème. D’une certaine façon, on repart du début, ou presque, pour le recouvrement. Il convient donc de gérer astucieusement cette nouvelle phase, en ayant bien à l’esprit les notions de coûts et de délais. En particulier, l’obtention du règlement avec un titre exécutoire s’accommode très bien d’une démarche amiable : recouvrement judiciaire ne veut pas dire obligatoirement exécution forcée.

Une fois le titre obtenu, un huissier doit être mandaté pour signifier le jugement et délivrer le commandement de payer.

A ce stade, une démarche de recouvrement judicieusement menée implique de reprendre la main, et d’établir un contact avec le débiteur afin d’obtenir un règlement direct. En effet, un paiement en 2 ou 3 mensualités sera souvent plus rapide que l’exécution forcée menée par l’huissier.

En outre, l’huissier en charge du dossier tentera bien souvent, de lui-même, d’obtenir un règlement direct, sans faire saisir. L’obtention du règlement par l’huissier, forcée ou non, n’est pas neutre en terme de coût, puisqu’il facturera les honoraires « article 10 », selon son tarif, honoraires qui restent à la charge du créancier ; seul le coût des actes est payé par le débiteur.

Faire une saisie attribution sur un compte bancaire prend du temps et engendre des frais. Une fois la saisie attribution effectuée, sous réserve qu’il y ait de l’argent sur le compte, l’huissier doit la dénoncer, puis demander le certificat de non contestation passé le délai d’un mois, et enfin se faire attribuer les fonds : durée minimum de deux mois. Et si le débiteur décide de jouer la montre, il peut saisir le juge de l’exécution, ce qui fait repartir la procédure pour un bon moment.

Dans un cas récent illustrant cette situation de recouvrement après obtention d’un titre, un grossiste en chaussures détenait une créance impayée de 8000 € par un magasin. Le débiteur n’ayant pas tenu ses promesses de règlement amiable, une injonction de payer avait été diligentée. Après obtention du titre exécutoire, la copie de celui-ci avait été envoyée au débiteur, en lui conseillant d’effectuer un règlement direct de façon à éviter les frais de l’exécution forcée. Un accord de paiement en deux mensualités a ainsi été mis en place : le dossier a donc été soldé dans un délai de quelques semaines après l’obtention du titre.

Toutes les parties prenantes ont été gagnantes dans cette situation.
Le créancier a obtenu le règlement de ses factures plus rapidement, et sans payer les honoraires supplémentaires que facture l’huissier en cas d’exécution forcée.

Le débiteur a également évité des frais supplémentaires, relatifs aux actes de saisies ; de plus, le règlement direct a préservé sa relation avec son banquier, laquelle ne peut que souffrir d’une saisie attribution sur le compte bancaire.

Enfin, cette stratégie de recouvrement a facilité le maintien de la relation commerciale du créancier avec son client, qui aurait été mise à mal en cas de saisie.

On voit donc que la procédure judiciaire et l’obtention d’un titre exécutoire n’implique pas de se lancer tête baissée dans des mesures de saisies : la recherche d’une solution négociée peut s’avérer profitable pour toutes les parties.

Pierre Gonzva

Directeur général du Cabinet d’Ormane

pg chez dormane.fr

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