Les faits- Le Conseil d’Etat était appelé, récemment, à statuer sur une affaire concernant un cadre supérieur du ministère des Affaires étrangères. En effet, par un décret du Président de la République du 7 mai 2010, il avait été mis fin aux fonctions d’ambassadeur de France en Ouzbékistan de monsieur X. Puis il était resté dans l’attente d‘une nouvelle affectation, mais son attente avait été déçue.
Aussi, par lettres des 12 et 13 juillet 2013, il avait postulé à plusieurs postes susceptibles de se libérer au cours de l’année 2013 et avait sollicité, à défaut, une autre affectation sur un poste correspondant à son grade, puis il avait saisi le ministre des affaires étrangères d’une réclamation indemnitaire préalable au titre des préjudices résultant de son rappel en France à la suite de la mission accomplie en Ouzbékistan et de l’absence de nouvelle affectation depuis lors. Mais l’administration avait gardé le silence sur ces deux demandes et deux décisions implicites de rejet étaient nées.
La procédure- Monsieur X avait alors demandé au tribunal administratif de Paris d’annuler ces deux décisions et de condamner l’État à lui verser une indemnité à raison des préjudices subis du fait de l’absence d’affectation depuis mai 2010.
Par un jugement du 27 février 2015, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision implicite du ministre des Affaires étrangères refusant de proposer une affectation au requérant, puis a enjoint au ministre de lui proposer une affectation dans le délai d’un mois et, enfin, a condamné l’État à verser à Monsieur X une somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral.
Il a fait appel de ce jugement auprès de la cour administrative d’appel de Paris, en tant qu’il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l’Etat à l’indemniser du préjudice matériel résultant de la perte de primes et indemnités diverses. Par un arrêt n° 15PA01683 du 11 octobre 2016, la CAA de pris lui a donné satisfaction sur ce point.
Le ministre des affaires étrangères a alors formé un pourvoi, le 9 décembre 2016, et a demandé au Conseil d’Etat, d’annuler cet arrêt en tant qu’il a fait partiellement droit à l’appel de Monsieur X, d’une part, et réglant l’affaire au fond, de rejeter l’appel de Monsieur X, d’autre part.
La décision : Le Conseil d’Etat a débouté le Ministre des affaires étrangères et a fait droit à la demande de monsieur X.
le Conseil d’État a estimé, d’abord, que sous réserve de dispositions statutaires particulières, tout fonctionnaire en activité tient de son statut le droit de recevoir, dans un délai raisonnable, une affectation correspondant à son grade.
Il a considéré, ensuite, qu’en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un fonctionnaire qui a été irrégulièrement maintenu sans affectation a droit à la réparation intégrale du préjudice qu’il a effectivement subi du fait de son maintien illégal sans affectation ;
Il a précisé que pour déterminer l’étendue de la responsabilité de la personne publique, il est tenu compte des démarches qu’il appartient à l’intéressé d’entreprendre auprès de son administration, eu égard tant à son niveau dans la hiérarchie administrative que de la durée de la période pendant laquelle il a bénéficié d’un traitement sans exercer aucune fonction ;
que dans ce cadre, sont indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l’illégalité commise présente un lien direct de causalité ; que, pour l’évaluation du montant de l’indemnité due, doit être prise en compte la perte des primes et indemnités dont l’intéressé avait, pour la période en cause qui débute à la date d’expiration du délai raisonnable dont disposait l’administration pour lui trouver une affectation, une chance sérieuse de bénéficier, à l’exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l’exercice effectif des fonctions ;
Le Conseil d’Etat a tenu compte du faible nombre d’emplois correspondant à celui-ci et de l’organisation des mutations au ministère des affaires étrangères, et a estimé, de ce fait, que le délai raisonnable dont disposait l’administration pour proposer à l’intéressé un nouvel emploi peut être estimé à une année ; Il a établi, alors, que la période de référence pour le calcul du préjudice financier subi par Monsieur X à raison de la perte d’une chance sérieuse de percevoir certaines primes et indemnités s’étendait du 7 mai 2011 au 14 novembre 2013, car celui-ci ne s’est vu proposer une affectation correspondant à son grade que le 14 novembre 2013.
Le Conseil d’Etat a annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 11 octobre 2016 en tant qu’il a statué sur le préjudice financier subi par monsieur X, à raison de la perte d’une chance sérieuse de percevoir certaines primes et indemnités.
Le Conseil d’’Etat a condamné à verser à Monsieur X la somme de 67 713, 60 euros, au titre du préjudice financier subi par celui-ci à raison de la perte d’une chance sérieuse de percevoir certaines primes et indemnités, avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2013. Les intérêts échus le 16 juillet 2014 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Conclusion : Voilà un rappel fort intéressant, auquel le Conseil d’Etat entend donner un retentissement, alors que se multiplient les « mises au placard » dans les trois fonctions publiques, Etat, locale et hospitalière, avec toutes les conséquences qu’elles impliquent, on seulement sur le plan professionnel, mais également personnel et s