Le coût d’une installation est complexe à déterminer car il varie notamment en fonction du lieu d’installation, du type de cabinet qu’un avocat souhaite créer, du nombre de personnes impliquées dans ce projet d’entreprise...
Voici une liste (non-exhaustive) des points clefs à prendre en compte et des dépenses à prévoir pour réussir cette aventure qu’est l’installation.
Se préparer :
Avant de s’installer à votre compte, il faut vous assurer d’avoir assez d’expérience, de connaissances et d’en avoir envie...
Il est important de bien réfléchir à votre projet pour gagner du temps. Comme le disaient les conférenciers lors d’une des Soirées de l’installation de l’Avocat organisées par le Village de la Justice et Legi Team : « La réflexion doit être utile pour avancer, et non pas pour ne pas vous lancer ! »
Michel Lehrer, consultant Jurimanagement, indiquait aussi qu’« il faut penser l’installation comme à un projet d’entreprise et y réfléchir à plusieurs. Entourez-vous, ne vous lancez pas seul. »
Il est aussi essentiel de réaliser un minimum d’analyse d’implantation (Quelle sera la concurrence locale ? Où est ma clientèle ?)
Pensez à consulter :
le Barreau entrepreneurial si vous êtes au Barreau de Paris, ou l’éventuel équivalent dans votre barreau,
l’ Association Nationale d’Assistance Administrative et fiscale dédiée aux Avocats (ANAAFA) ou d’autres Associations de gestion agréées (telle que les ARAPL, l’AGIL) pour les questions comptables,
la Fédération Nationale des Unions de jeunes Avocats (FNUJA) ou mieux l’UJA locale.
Y avez-vous pensé ? Si vous n’avez pas encore de clientèle, pourquoi ne pas opter pour une reprise de cabinet ?
Choisir son statut :
"La forme juridique du cabinet (SARL/SCP/AARPI...) importe peu au début en matière d’allègement fiscal. Elle aura de l’importance à partir du moment où le cabinet dégagera 800.000 euros de chiffre d’affaires" indique Xavier Marchand, avocat [2]
A priori, « fiscalement il n’existe pas, du moins au début, de statut social préférable aux autres, sinon tous les avocats prendraient le même type de statut social », nous explique Hubert Strauss de l’ARAPL d’Ile-de-France [3].
Choisir son local :
Selon Hubert Stauss, « au départ peu importe le local, ce qui compte c’est de donner une prestation de qualité au bon coût. Le client doit être content de la prestation et si il l’est, il le fera savoir et apportera de nouveaux clients... Le client se moque du local, ce qui lui importe c’est le résultat, la qualité et le prix de la prestation. S’installer jeune, cela signifie aussi faire peu de chiffre d’affaires et donc payer peu de charges... »
Vous pouvez-vous installer chez-vous/ en sous-location/ en location d’une surface partagée entre plusieurs avocats ou en centre d’affaires, à condition que les services communs (secrétariat, accueil, salle d’attente...) fonctionnent dans le respect des règles de la déontologie auxquelles doivent répondre les avocats.
S’équiper :
Si pour le mobilier vous pouvez penser à la récup’, pour le matériel informatique il faut de la qualité et surtout « il est préférable de choisir un système informatique global pour avoir un interlocuteur unique. Cela comprend un ordinateur, un adresse mail professionnelle, un nom de domaine ; un serveur externalisé » nous explique Denis Moullard de Diapaz .
Pensez au logiciel de gestion du cabinet (par gestion on entendra gestion des dossiers, agenda, facturation,... Comptez quelques dizaines d’euros en location mensuelle pour des logiciels simples à quelques milliers d’euros à l’achat pour des fonctions plus avancées (le guide des logiciels pour avocats est à lire sur Jurishop.fr), mais il représente un gain de temps et donc d’argent.
Elément important, un logiciel aide à structurer le cabinet : il simplifie la gestion des clients et des dossiers. Il oblige à s’organiser et à long terme, c’est vital.
Comme le précise Jean-Christophe Tomaso (Responsable marchés professionnels Lexis Nexis), « le prix d’un logiciel de gestion équivaut à quelques milliers d’euros en investissement initial (ordinateur, imprimante-scanner et logiciel), mais permet rapidement un gain de temps. De plus, cela entraine souvent l’acquisition de norme ISO. (normes de qualité et de processus) ».
Pour les livres, codes, guides pratiques, le coût est moindre à l’installation car il vous est possible d’accéder à cette documentation juridique le plus souvent gratuitement sur internet (tel le site Légifrance), les ouvrages des éditeurs à valeur ajoutée (commentaires par exemple) pouvant être réservés dans un premier temps au coeur de vos spécialités.
Se protéger :
Sécuriser son réseau informatique c’est important on y pense peu, et pourtant... Entre les piratages automatiques et virus non ciblés, les détournements sur réseau wifi non sécurisés et les malveillances potentielles qui visent votre cabinet, il y a beaucoup à perdre...
Voici donc les recommandations de Jean Vinegla de la société Navista, opérateur du RPVA :
choisir de préférence un fournisseur email français ;
ne pas utiliser de serveur externalisé grand public (cloud entrée de gamme) ;
bannir tout transfert de dossier par le biais de Google drive ou Dropbox : utiliser des outils pour professionnels et cryptés ;
installer un firewall (protection de votre réseau).
Jean Vinegla complète ainsi : "la sécurité de son réseau informatique, de ses échanges, c’est une nécessité qui apporte de la plus-value à votre cabinet." Et oui, si vous travaillez avec des entreprises, il sera aisé et différenciant de se targuer d’une bonne protection de leurs données ! Voici un vrai argument marketing...
Assurez votre cabinet et assurez vous en tant que professionnel :
Il faut penser à l’assurance de sa responsabilité professionnelle ainsi qu’aux assurances et mutuelles professionnelles (ex : assurance perte d’activité...), indispensables pour vous créer un environnement de travail sécurisant... et sécurisé.
Se financer :
Les prêts, comment avoir de quoi investir un minium ?
La famille peut apporter une première aide financière.
Les banques proposent des prêts spécifiques pour les professions libérales (voir à ce sujet les dossiers du Crédit du Nord et celui de la Banque Populaire).
Pensez aussi aux dispositifs de financement publics pour les entrepreneurs.
Les charges :
Les charges sociales correspondent à environ 30% du chiffre d’affaires les deux premières années et sont calculées sur 2 ans, donc corrigées dès la troisième année (qui peut être difficile, car la première année d’exercice est forfaitaire et les charges faibles, pensez à provisionner !).
Pensez à souscrire dans les trois premiers mois d’activité à une association de gestion agréée pour être conseillé(e), payer moins d’impôt (cela vous évite les 25% de majoration à l’IR) et garantir une comptabilité "qui tient la route"... ainsi qu’à votre cabinet.
Le Chiffre d’affaires :
Pour que le cabinet soit viable il faudrait faire un CA de 50.000 euros en moyenne, 30.000 € minimum. Ce ne sont que des ordres d’idées, mais importants : Xavier Marchand nous indique ainsi qu’ « en région parisienne il est compliqué pour un cabinet de survivre avec 30.000 euros, à partir de 100.000 euros, le cabinet pourra perdurer. » Il précise aussi que "s’il y a plusieurs avocats le cabinet gagne davantage. Par exemple en SCP, un cabinet fera en moyenne 160.000 euros de CA si il y a 1 avocat et 270.000 euros de CA si il y a 2 avocats (avec mutualisation des charges)."
Communiquer :
Une fois le projet défini et l’implantation réfléchie, vous pouvez communiquer autour de vous, sur tous les supports, mais dans le respect de la déontologie.
Voici matière à approfondir le sujet :
Créer son site internet, son blog : lire à ce sujet l’article "Comment créer un blog en toute simplicité ?".
S’inscrire dans un annuaire d’avocats et soigner sa fiche descriptive avec des mots-clefs pertinents.
Ecrire, publier sur l’actualité juridique ou sur un thème bien précis, faire des petites vidéos (consultez par exemple le blog mutualisé du Village de la justice, de nombreux avocats y participent pour démontrer leur expertise et travailler leur présence sur internet).
Acheter des mots-clefs sur Google.
S’inscrire sur les plates-formes de mise en relation entre avocats et particuliers (dans le respect de la déontologie de l’avocat).
Réseauter bien entendu !
Témoignages :
Des membres actifs de la communauté Village de la justice ont accepté de nous faire un retour d’expérience sur leur installation... A lire ici.
Un certain nombre d’avocats et de professionnels de l’installation insistent sur le fait qu’il est plus simple pour une première installation de ne pas tenter l’aventure seul. Qu’une installation à plusieurs est plus aisée.
Mais que vous vous installiez seul ou à plusieurs, il est fondamental de bien préparer son projet, de se faire accompagner et de s’informer auprès de son Ordre, du Barreau entrepreneurial, des syndicats et associations d’avocats, d’avocats ayant tenté l’aventure... Autre solution, vous pouvez reprendre un cabinet !
Quoi qu’il en soit et si vous projetez de vous installer seul, faute de trouver une collaboration, ne foncez pas dans le mur et réfléchissez votre projet, transformez-le en projet motivant et pas en "faute de mieux".
Liens utiles :
Le Barreau entrepreneurial de Paris.
Les Offices Régional d’Information de Formation et de Formalités des Professions Libérales (ORIFF-PL)
La FNUJA (Fédération Nationale des Unions de jeunes Avocats).
L’UJA (Union des Jeunes Avocats de Paris).
L’ article "Les ’guides pratiques’, une source de documentation précieuse pour tout avocat.".
Le site de l’installation des avocats : www.installation-des-avocats.com .
Annexe sur les charges à prévoir...
Une fois installé(e), voici à quoi ressemblera votre déclaration 2035 (pour les libéraux) et quelques explications... C’est une bonne piste pour préparer votre plan d’installation et de développement (le business plan minimum que vous demandera votre banquier et qui de toute façon vous permettra de construire un solide projet).
Cette déclaration 2035 regroupe les charges et recettes annuelles. Vous devrez la remplir une fois par an, avec éventuellement l’aide d’un comptable et surtout avec la validation d’une association de gestion agréée. Plus question en 2015 et après, de faire une "comptabilité légère sur un coin de table"... les services des impôts sont bien plus exigeants.
Un peu d’aide sur les lignes principales qui vous concernent en tant qu’avocat :
Ligne 9 : Salaires nets payés (si vous avez un salarié, pas à vous).
Ligne 10 : Charges sociales sur salaires.
Ligne 12 : Contribution Economique Territoriale composée de deux taxes :
la CFE cotisation foncière des entreprises (selon valeur locative des locaux) et la CVAE (chiffre d’affaires > à 152.500€).
Ligne 13 : Autres impôts : la taxe foncière si vous êtes propriétaire de votre local.
Ligne 14 : La contribution sociale généralisée (CSG) est de 7,5%, seuls 5,1% seront déductibles ici.
Ligne 15 : Loyers et charges locatives du bureau.
Ligne 17 : Dépenses d’entretien et de réparation concernant le mobilier, le matériel et les locaux à usage professionnel.
Ligne 20 : Chauffage, eau, gaz, électricité de votre bureau.
Ligne 22 : Assurances : responsabilité civile professionnelle, assurance du local.
Ligne 23 : Déduction aux frais réels des frais de véhicule professionnel.
Ligne 24 : Autres frais de déplacement, frais de voyages liés à l’activité professionnelle : parking, péages, taxi et transports en commun, frais de repas d’affaires ou dans le cadre d’un voyage professionnel ou congrès...
Ligne 25 : Charges sociales personnelles : cotisations obligatoires allocations familiales, assurance maladie, retraite, invalidité décès (un peu plus de 2.200 € la première année, puis indexé sur votre chiffre d’affaires / faites une simulation précise à ce sujet, les montants grimpent vite).
Les charges sociales facultatives : mutuelle, retraite et prévoyance sous contrat "loi Madelin" donc déductibles.
Ligne 26 : Frais de réception, de représentation et de congrès, déjeuners-clients en rapport avec votre activité.
Ligne 27 : Fournitures de bureau, frais de documentation , de correspondance et de téléphone.
Ligne 28 : Frais d’actes et de contentieux : recouvrement d’impayés...
Ligne 29 : Cotisations syndicales et professionnelles (Ordre de votre barreau, CNB, syndicats et Association de Gestion Agrée).
Ligne 30 : Autres frais divers de gestion : dons, communication, cadeaux, frais de formation...
Ligne 31 : Intérêts et frais des emprunts professionnels (pour les dépenses d’installation, l’acquisition de clientèle local, matériel...), frais de banque.