Pôle Emploi condamné deux fois en 2012 : les chômeurs se rebiffent !

Par Nathalie Lailler, Avocat.

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Explorer : # information des droits # suivi personnalisé # responsabilité de pôle emploi # droit à l'emploi

1ère condamnation : 8 février 2012 : Pôle Emploi a l’obligation d’informer complètement les demandeurs d’emploi sur le contenu de leurs droits.

2ème condamnation : 11 septembre 2012 : Pôle Emploi a l’obligation de mettre en œuvre toutes les actions permettant aux chômeurs d’obtenir un emploi dans les meilleurs délais possibles.

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- 1ère condamnation : 8 février 2012 : Pôle Emploi a l’obligation d’informer complètement les demandeurs d’emploi sur le contenu de leurs droits.

Les faits :

Mme X, travailleur sans emploi, percevait une allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) ; puis elle a sollicité de l’Assédic (devenue Pôle Emploi) le bénéfice d’une allocation de solidarité spécifique (ASS) qui lui a été accordée. Un an plus tard, elle obtient le versement d’une allocation équivalent retraite (AER).

Estimant avoir été insuffisamment informée de ses droits à cette allocation équivalent retraite, dont le montant est supérieur à celui de l’ASS, Mme X. met en cause la responsabilité de l’Assédic.

La décision :

l’ASSEDIC est condamnée pour défaut d’information : elle n’a pas suffisamment informé Mme X… de son droit à l’AER et ne l’a pas mise en mesure de connaître ses droits en rapport avec cette allocation de substitution, du seul fait qu’elle ne lui a pas adressé directement le formulaire nécessaire à son paiement, privilégiant au contraire le paiement de l’Allocation spécifique de solidarité en lui adressant le formulaire prévu à cet effet. En conséquence, l’Assédic doit indemniser Mme X. du montant cumulé des AER qu’elle aurait dû percevoir sur cette période de deux ans, soit près de 15 000 euros.

Ce qu’il faut retenir :

Les organismes d’assurance chômage ont l’obligation d’assurer l’information complète des demandeurs d’emploi. Ainsi, lorsqu’un travailleur privé d’emploi est susceptible de pouvoir bénéficier de deux types d’allocations, Pôle Emploi doit lui donner une information complète sur chacune d’entre elles. A défaut, Pôle Emploi doit être condamné à indemniser le demandeur d’emploi du préjudice subi.

Source : Cour de cassation, chambre sociale, 8 février 2012 n°10-30892

rtl.fr

- 2ème condamnation : 11 septembre 2012 : Pôle Emploi a l’obligation de mettre en œuvre toutes les actions permettant aux chômeurs d’obtenir un emploi dans les meilleurs délais possibles.

Les faits :

Mr K., travailleur privé d’emploi s’inscrit dans une agence de Pôle Emploi en février 2009 et signe, le même jour, un projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) correspondant à sa recherche d’emploi en tant que « responsable de la gestion et des services centraux » mentionnant le salaire souhaité ainsi que sa mobilité géographique. Le contrat précise que des offres d’emploi et de formation seront mises à sa disposition ainsi que des outils en libre accès, qu’il peut consulter le site internet de Pôle Emploi et qu’il bénéficiera « d’un suivi mensuel personnalisé avec un conseiller »  ; il est suivi par l’agence trois mois afin de cibler les emplois susceptibles de lui convenir en fonction de ses compétences ; sans aucun contact avec les conseillers de Pôle Emploi, il demande le bénéfice, qui lui est accordé, d’une journée de formation à la création d’entreprise un an plus tard, prolongée deux mois plus tard d’un rendez-vous sans actualisation de son PPAE ; l’agence de Pôle Emploi lui propose d’adhérer à une prestation d’accompagnement spécifique destinée aux cadres expérimentés sur plusieurs rencontres, M. K. ne va pas pouvoir obtenir les entretiens qu’il sollicite malgré différents courriers qui demeurent sans réponse de son conseiller ; un entretien téléphonique lui est enfin proposé, après 6 mois de démarches infructueuses. le 17 mai 2011 à l’issue duquel un nouveau projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) est envoyé à Mr K., sans avoir fait l’objet d’une actualisation par rapport à celui signé en février 2009.

La décision :

Statuant en référé (procédure d’urgence), le Tribunal administratif de Paris constate que Mr K., qui a toujours été en situation de recherche active d’emploi, n’a pas bénéficié d’un suivi et d’un accompagnement régulier suffisamment personnalisé de la part de Pôle Emploi, en méconnaissance de ses missions, telles qu’issues de l’article L 5312-1 du code du travail.

Par conséquent, le Tribunal relève les carences graves et caractérisées de Pôle Emploi, institution qui, si elle ne peut être soumise à une obligation de résultat, doit cependant mettre en œuvre, avec les moyens dont elle dispose, toutes les actions susceptibles de permettre à chacun d’obtenir un emploi dans les meilleurs délais possibles au regard de la situation du marché du travail.

le Tribunal administratif de Paris fonde sur sa décision sur le droit à l’emploi : « le droit à l’emploi découle de la liberté fondamentale proclamée par l’article 4 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen » ; de même, le 5ème alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel se réfère la Constitution du 4 octobre 1958, pose le principe fondamental selon lequel : « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi. »

Il relève que la carence caractérisée de Pôle Emploi, dans la mise en œuvre des moyens administratifs destinés à permettre l’accès à un emploi au plus grand nombre possible d’intéressés, constitue une atteinte grave et manifestement illégale à cette liberté fondamentale qu’est le droit d’obtenir un emploi, dès lors qu’elle entraîne des conséquences graves pour la personne concernée.

Le tribunal enjoint donc à l’agence Pôle Emploi de recevoir Mr K. dans les huit jours, de mettre à jour son PPAE et de l’accompagner dans sa recherche d’emploi, en lui adressant régulièrement, dans la mesure du possible, des offres d’emploi en lien avec ses compétences, voire en lui proposant des formations ou une reconversion adaptées.

Ce qu’il faut retenir :

Les demandeurs d’emploi doivent bénéficier d’un suivi et d’un accompagnement régulier suffisamment personnalisé de Pôle Emploi, afin de leur permettre d’obtenir un emploi dans les meilleurs délais possibles au regard de la situation du marché du travail. Si ce n’est pas le cas, ils peuvent saisir le Juge administratif, en référé, afin qu’il enjoigne à Pôle Emploi de mettre en œuvre sans délai ce suivi.

Source : Tribunal administratif de Paris, 11 septembre 2012 n°1216080/9

bfmtv.com

Nathalie LAILLER
Avocate au Barreau de Caen
Spécialiste en droit du travail, droit de la sécurité sociale et de la protection sociale
contact chez lailler-avocat.fr
http://www.lailler-avocat.com

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