☞ Bref rappel : qu’est-ce qu’une action possessoire ?
Les actions possessoires, prévues par les articles 2278 et 2279 du Code civil, avaient vocation à mettre fin à un trouble dans la possession d’un bien immobilier. Elles étaient ouvertes aux possesseurs ainsi qu’aux détenteurs précaires et permettaient d’assurer la protection d’une situation de fait sans qu’il soit nécessaire de rapporter la preuve de la propriété, souvent complexe.
Les conditions :
• La possession devait être utile et paisible avant que le trouble ne se manifeste.
• Ces actions devaient être intentées dans l’année du trouble, devant le Tribunal de Grande Instance.
• Hormis le cas de la réintégrante, ces actions ne pouvaient être engagées que si la possession ou la détention était supérieure à un an.
• Ces action sont conditionnées par la présence d’un trouble, définit comme « tout fait matériel ou tout acte juridique qui, soit directement et par lui-même, soit indirectement et par voie de conséquence, constitue ou implique une prétention contraire à la possession d’autrui » [1].
On distinguait classiquement trois types d’actions possessoires :
• L’action en complainte : action dirigée contre les troubles actuels, qu’il s’agisse de troubles de fait ou de droit.
• La dénonciation de nouvel œuvre : action dirigée contre les troubles éventuels et futurs.
• L’action en réintégration : action ouverte en cas de dépossession violente ou par voie de fait.
☞ Quel est le changement apporté par la loi du 16 février 2015 ?
L’article 9 de la loi du 16 février 2015 abroge l’article 2279 du Code civil et avec lui les actions possessoires. Les articles 1264 à 1267 du Code de procédure civile, relatifs au régime des actions possessoires, devraient quant à eux être supprimés sans tarder par voie règlementaire.
☞ Les actions possessoires vont-elles nous manquer ?
En réalité, en supprimant les actions possessoires, le législateur s’est contenté de tirer les conséquences de la désuétude dans laquelle ces actions étaient tombées ces dernières années.
En effet, les actions possessoires étaient concurrencées par l’action en référé, prévue aux articles 808 et 809 du Code de procédure civile.
La Cour de cassation a exclu l’introduction d’une action possessoire par la voie des référés. En revanche, elle a admis depuis longtemps que les troubles de la possession puissent être protégés par le référé [2]. Le référé peut donc être utilisé sans que les règles et conditions de l’action possessoire n’aient à s’appliquer.
Avant le 16 février 2015, il existait donc 2 procédures permettant de protéger la possession, sans hiérarchie entres elles.
Cependant, la pratique a acté d’une forte prévalence de l’action en référé.
• Les conditions du référé sont moins contraignantes. Il suffit de prouver l’urgence ainsi qu’un dommage imminent ou un trouble manifestement illicite.
• Les actions possessoires ne pouvaient pas être cumulées avec une action relative au fond du droit. De grandes difficultés sont nées de ce principe.
• La représentation par avocat n’est pas obligatoire en matière de référé, ce qui limite le coût de la procédure.
• La procédure de référé est plus rapide que celle des actions possessoires.
• Les conditions de la possession (utile, paisible, pendant plus d’un an, etc.) n’ont pas besoin d’être démontrées dans le cadre d’une action en référé.
• La décision du juge des référés bénéficie de l’exécution provisoire.
Quelques inconvénients néanmoins sont liés à la suppression des actions possessoires :
• L’action en référé interrompt le délai d’usucapion (C. civ., art. 2241), contrairement aux actions possessoires.
• L’ordonnance rendue en référé a un caractère provisoire et en théorie, il est nécessaire de recourir à une action au fond.
Ainsi, la disparition des actions possessoires ne devrait pas être réellement dommageable pour le droit, l’action en référé étant, dans la plupart des cas, largement à même de les remplacer.