Les faits.
Mme D. a été nommée en qualité de praticien hospitalier par le centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de la fonction publique hospitalière pour une période probatoire d’un an à compter du 15 février 2012 et affectée au centre hospitalier de Niort (Deux-Sèvres), dans le pôle d’oncologie médicale et soins de support.
À l’issue de cette période, le chef de pôle, le président de la commission médicale d’établissement et le directeur du centre hospitalier ont émis des avis défavorables à sa titularisation.
La commission statutaire nationale s’est prononcée pour un licenciement pour inaptitude aux fonctions par neuf voix favorables et deux abstentions.
Mme D. a donc été licenciée pour inaptitude à l’exercice des fonctions de praticien hospitalier par un arrêté du 17 décembre 2013 de la directrice générale du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de la fonction publique hospitalière.
Procédure.
Mme D. a demandé l’annulation de cet arrêté au tribunal administratif de Poitiers, lequel a rejeté sa demande par jugement du 25 mars 2015. La Cour administrative d’appel de Bordeaux était saisie d’un appel en annulation du jugement.
1er enseignement : Ni la décision de refus de titularisation, ni la décision de licenciement en découlant n’ont pas à être précédées d’une procédure contradictoire.
Il s’agit d’une jurisprudence constante en matière de refus de titularisation, qui ne diffère pas pour les praticiens hospitaliers. La Cour rappelle qu’après son recrutement, l’agent a la qualité ce stagiaire. Il se trouve donc dans une situation probatoire et provisoire. Du fait de cette situation, « alors même que la décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l’appréciation portée par l’autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne, elle n’est pas - sauf à revêtir le caractère d’une mesure disciplinaire - au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que l’intéressé ait été mis à même de faire valoir ses observations ou de prendre connaissance de son dossier, et n’est soumise qu’aux formes et procédures expressément prévues par les lois et les règlements ». Il en est de même de la décision de licenciement.
2nd enseignement : Est légal l’arrêté de licenciement motivé par un comportement général pouvant avoir des conséquences dommageables sur la qualité et la continuité des soins.
Il est reproché à Mme D. l’absence d’esprit d’équipe, le rejet de toute contrainte institutionnelle, l’existence de conflits entre elle et des membres de l’encadrement médical et paramédical.
Pour la Cour, ces manquements ne relèvent pas d’un simple conflit avec le chef de pôle, puisque plusieurs avis concordent dans un même sens (chef de pôle, président de CME, directeur du centre hospitalier) et que la mission d’inspection de l’agence régionale de santé de Poitou-Charentes diligentée par la directrice du CNG concluait « à un comportement préjudiciable à l’activité du service et à un risque important de mise en danger des patients pris en charge ».
Si Mme D. dispose de bonnes compétences techniques et de bonnes relations avec les patients, cela ne suffit pas. Il faut aussi collaborer avec ses paires, entretenir des relations de bonne confraternité et exercer dans des conditions qui puissent compromettre la qualité des soins et des actes médicaux ou la sécurité des personnes examinées. Telles sont les obligations issues du code de déontologie médicale auquel est soumis tout médecin (articles R. 4217-54, R. 4127-56, R. 4127-71 CSP).
Il est notamment reproché à Mme D. d’avoir refusé « d’assurer autant de périodes d’astreinte que ses collègues ou d’être présente en fonction du planning des congés durant la période estivale (…) un tel comportement porte atteinte à la continuité des soins » ou encore de ne pas assister aux réunions de consultation pluridisciplinaires « dans un secteur caractérisé par la collégialité quant aux décisions à prendre pour la mise en place et le suivi de leurs traitements ». Son attitude avec l’ensemble des équipes, médicales et paramédicales, est également condamnée. Avec certains agents, Mme D. ne procédait à aucune communication orale et se bornait à des transmissions sous forme de brèves annotations manuscrites.
Mais il convient surtout de souligner que ce que les juges condamnent, ce n’est pas seulement un trait de caractère de Mme D., mais le fait que son comportement est de nature à compromettre la qualité de la prise en charge des patients. En effet, dans une équipe médicale hospitalière, le dialogue est indispensable pour une prise en charge optimale des patients. C’est donc bien la continuité et la qualité des soins qui sont mis en exergue pour justifier le licenciement.
Source : CAA Bordeaux, 17 octobre 2017, n° 15BX01861