Un sujet proposé par la Rédaction du Village de la Justice

Blocage et déréférencement des « sites miroirs ».

Par Sacha Ghozlan, Avocat.

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La Première Ministre a publié le 13 juin 2023 au Journal Officiel un décret attendu en application de l’article 6-3 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004, dite LCEN (loi pour la confiance dans l’économie numérique).
Ce décret n° 2023-454 du 12 juin 2023 vise le blocage et le déréférencement des sites miroirs.

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Qu’est-ce qu’un site miroir ?

Un site miroir désigne, au sens de l’article 6-3 alinéa 1er de la LCEN :

« tout service de communication au public en ligne […] reprenant le contenu du service […], en totalité ou de manière substantielle ».

En d’autres termes, un site miroir est un site internet dont l’objectif principal est de fournir une alternative d’accès au contenu d’un site principal, par l’usage d’un URL distinct permettant d’accéder à un contenu similaire.

Les sites miroirs ont été initialement créés pour distribuer des logiciels open source ou des mises à jour de logiciels, et s’assurer qu’ils demeurent accessibles au public en cas de dysfonctionnement, de lenteur ou d’indisponibilité du site internet principal.

Néanmoins, les sites miroirs sont également utilisés pour contourner des restrictions géographiques ou des décisions de justice ordonnant toutes mesures visant à empêcher l’accès au site originel. L’intérêt est alors pour l’éditeur d’un tel site d’en maintenir le contenu accessible, partiellement ou totalement, en dépit d’une décision de justice.

Le site miroir consistera le plus souvent en une substitution du nom de domaine pour permettre au public d’accéder au contenu d’un site internet ayant déjà fait l’objet d’un blocage et d’un déréférencement sur le fondement d’une décision de justice exécutoire.

De tels sites miroirs sont ainsi un obstacle à l’exécution d’une décision de justice exécutoire.

Les mécanismes issus de la LCEN pour ordonner le blocage et le déréférencement de sites internet.

L’article 6 I 7° de la LCEN prévoit que la commission de certaines infractions (l’apologie, la négation ou la banalisation de crimes contre l’humanité, la provocation à la commission de certains actes, l’incitation à la haine, aux violences, à la discrimination ou la pornographie infantile) justifie qu’un site internet soit interdit par décision de justice.

La décision de justice, constatant que l’infraction est caractérisée, ordonnera alors le blocage et le déréférencement du site internet.

Un tel jugement avait déjà été rendu en 2018 concernant un site internet contenant quasi exclusivement des articles racistes, antisémites, homophobes et négationnistes [1].

L’article 6-3 de la LCEN dans sa version issue de la loi n°2021-1109 du 24 août 2021 prévoyait qu’une autorité administrative pouvait demander aux hébergeurs et aux fournisseurs d’accès à internet, ou à toute personne visée par une telle décision de bloquer un site miroir pour une durée ne pouvant excéder celle restant à courir pour les mesures ordonnées. La condition essentielle est que le site principal devait avoir déjà fait l’objet d’une décision de justice en ordonnant le blocage et le déréférencement.

Néanmoins, la LCEN ne déterminait pas quelle autorité administrative aurait la charge de l’exécution de telles mesures.

Les apports du décret du 12 juin 2023.

Le décret du 12 juin 2023 désigne l’autorité administrative en charge de tels pouvoirs : il s’agit de la Direction Générale de la Police et plus précisément de l’Office Central de Lutte contre la Criminalité liée aux Technologies de l’Information et de la Communication (OCLCTIC) [2].

Celui-ci recevra dans les sept jours une copie de la décision par le greffe de la juridiction de façon sécurisée. Si l’urgence le justifie, l’OCLTIC pourra recevoir immédiatement copie de la décision judiciaire exécutoire.

L’article 2 de ce décret prévoit qu’en application de l’article 6 I 8 de la LCEN, le président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond qui ordonne une ou plusieurs mesures propres à prévenir ou faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne peut saisir l’OCLCTIC par un portail officiel ou via une LRAR. Il transmettra les données d’identification du site miroir ainsi que les références de la décision.

Il appartiendra alors à l’OCLTIC d’identifier le site miroir reprenant le contenu visé par une décision de justice exécutoire, de transmettre ces données aux hébergeurs et aux fournisseurs d’accès internet pour qu’ils bloquent et déréférencent le site miroir, comme pour le site principal.

Enfin, en bout de chaîne, le destinataire devra procéder au blocage et au déférencement du site visé.

Une dernière obligation issue du décret impose aux fournisseurs d’accès à Internet de rediriger les utilisateurs cherchant à se rendre sur le site miroir, vers une page d’information du ministère de l’intérieur, indiquant la mesure de blocage ou de déréférencement prévue par l’article 6-3 de cette loi.

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