1. Définition et portée de la clause de non-concurrence.
La clause de non-concurrence est une stipulation contractuelle – ou conventionnelle – ayant pour objet d’interdire à un salarié, après la rupture de son contrat de travail, d’exercer une activité concurrente susceptible de porter atteinte aux intérêts de son ancien employeur.
Elle empêche ainsi d’occuper un poste similaire chez un concurrent, ou de créer une entreprise dans le même secteur d’activité.
Parce qu’elle porte atteinte à la liberté du travail, son application est strictement encadrée par la jurisprudence [1].
2. L’existence de l’obligation de non-concurrence.
En principe, la clause doit être insérée dans le contrat de travail et acceptée par le salarié [2].
Cependant, certaines conventions collectives peuvent imposer une telle obligation, même en l’absence de clause écrite dans le contrat.
Encore faut-il que le salarié ait été informé de l’existence de la convention collective applicable et mis en mesure d’en prendre connaissance lors de son embauche [3].
3. Les conditions de validité de la clause.
Pour être valable, la clause de non-concurrence doit remplir cinq conditions cumulatives [4] :
- Protection des intérêts légitimes de l’entreprise : la clause doit être justifiée par la nature des fonctions du salarié et les informations dont il dispose.
- Limitation dans le temps : elle ne peut s’appliquer indéfiniment.
- Limitation dans l’espace : elle doit être géographiquement circonscrite.
- Adaptation aux spécificités de l’emploi : elle doit correspondre à la fonction réellement exercée.
- Contrepartie financière suffisante : un montant doit être prévu pour compenser la restriction d’activité.
- L’absence d’une seule de ces conditions rend la clause nulle et inopposable.
4. Les effets de la clause après la rupture du contrat.
La clause de non-concurrence s’applique après la rupture du contrat de travail, soit à l’issue du préavis, soit dès le départ effectif du salarié en cas de dispense [5].
a) Le versement de la contrepartie financière.
Le salarié qui respecte la clause perçoit la contrepartie financière convenue, versée :
- soit en une fois (capital),
- soit en plusieurs fois (rente).
Cette indemnité est due quelle que soit la cause de la rupture, y compris en cas de départ à la retraite [6].
b) Les sanctions en cas de violation.
Le non-respect de la clause entraîne :
- la perte du droit à la contrepartie financière [7] ;
- la condamnation à indemniser l’ancien employeur [8] ;
- la condamnation à cesser l’activité concurrente [9].
5. La renonciation à la clause par l’employeur.
L’employeur peut renoncer à la clause afin de libérer le salarié de toute obligation de non-concurrence.
Dans ce cas, il n’est plus redevable de la contrepartie financière, et le salarié retrouve sa liberté d’activité.
Cependant, la renonciation doit intervenir dans un délai déterminé, variable selon le mode de rupture.
Une renonciation tardive oblige l’employeur à verser la contrepartie pour la période durant laquelle la clause a été respectée [10].
a) En cas de démission.
Le délai de renonciation court à compter de la réception de la lettre de démission par l’employeur [11].
b) En cas de licenciement.
En l’absence de délai prévu, la renonciation doit intervenir au moment de la notification du licenciement [12].
Le point de départ du délai correspond :
- à la date d’envoi de la lettre de licenciement [13],
- ou, en cas de remise en main propre, à la date de remise [14].
c) En cas de rupture conventionnelle.
Dans le cadre d’une rupture conventionnelle, la renonciation doit intervenir au plus tard à la date de rupture fixée par la convention [15].
d) En cas de dispense de préavis.
Lorsque le salarié est dispensé de préavis, la renonciation doit être notifiée au plus tard à la date du départ effectif [16].
6. En cas de litige.
Si la clause de non-concurrence : ne respecte pas les conditions de validité, fait l’objet d’une renonciation tardive, ou si la contrepartie financière n’est pas versée, le salarié dispose d’un recours devant le conseil de prud’hommes pour obtenir la nullité de la clause, le versement de l’indemnité ou la réparation du préjudice subi.
Conclusion.
La clause de non-concurrence constitue un outil de protection légitime pour l’employeur, mais elle doit toujours respecter un équilibre entre la liberté du travail du salarié et les intérêts de l’entreprise.
En pratique, sa validité repose sur une rédaction rigoureuse, une contrepartie financière adéquate et une application conforme à la jurisprudence.



