« Le directeur juridique sort de son rôle d’expertise » débute ainsi Béatrice Bihr, secrétaire général et directeur juridique exécutif chez Teva pour introduire la table ronde. Un constat que confirme Audrey Déléris, manager chez Fed Legal : « Lorsque l’on recrute un directeur juridique, on ne demande plus seulement un technicien, mais aussi quelqu’un qui sache convaincre la direction générale, qui soit force de propositions, qui soit un business partner, et qui sache diriger des équipes, les faire adhérer au projet. »
Ces compétences tendent autant à faire rayonner le juridique au sein de l’entreprise qu’à encadrer et dynamiser son équipe de juristes.
Comment évaluer alors que l’on est un bon manager, et savoir ce qu’il faut améliorer ?
« Le manager idéal n’existe pas » rassure Bruno Wierzbicki, coach et hypnothérapeute, tout en expliquant que le meilleur indicateur reste les personnes que l’on manage : « Est-ce que les membres de votre équipe, lorsqu’ils partiront, en sortiront grandis ? Si c’est le cas, vous pouvez considérer que vous êtes un bon manager, car ils auront appris quelque chose de vous. » Et comme il n’existe pas de méthode unique, il ne faut pas craindre de réévaluer en permanence son management, en fonction de son environnement ou des nouvelles équipes.
Enfin, le dernier critère, et pas des moindres, reste le directeur ou la directrice juridique concerné(e). « Vous êtes votre propre outil » souligne Bruno Wierzbicki.
Le coaching peut alors être un moyen de découvrir ses propres ressources. « C’est un processus de changement, explique Bénédicte Wallace, coach de L’atelier du possible. Il permet de travailler vos soft skills ou votre posture, et révèle un potentiel que l’on ne soupçonne pas ou que l’on a oublié. Nous avons tous une personnalité que l’on a besoin de connaître, pour la libérer. » Mais pour que cela fonctionne, « il faut vraiment en avoir envie, pour prendre du recul et observer ce que l’on a fait et ce que l’on peut faire » souligne Catherine Desvignes, directrice juridique chez Orange France.
- Audrey Déléris, Bruno Wierzbicki, Béatrice Bihr, Bénédicte Wallace et Catherine Desvignes
Comment, concrètement, un coaching peut-être mis en place ? Il peut s’agir soit d’une démarche personnelle, soit d’une solution mise en place de l’entreprise. Dans ce second cas, les objectifs et les indicateurs de mesure sont définis lors d’une réunion entre le coaché, le coach et le directeur hiérarchique, pour illustrer la progression. Mais ensuite, « tout ce qui est dit en séance de coaching est confidentiel » assure Bénédicte Wallace.
Lorsque le directeur juridique fait appel à un coach en dehors de son entreprise, reste alors la question du choix du coach. Sur quels critères se baser ? S’il y a déjà des éléments objectifs comme le cursus, les écoles de formation, ou l’adhésion à une fédération, le critère prédominant reste son intuition. « Vous faites un choix très subjectif, car il faut vous sentir bien avec la personne qui va vous accompagner, confirme Bénédicte Wallace. Il est important que vous ressortiez du premier rendez-vous avec une vision élargie et les premières clés pour amorcer l’objectif. » Il ne faut alors pas hésiter à en rencontrer plusieurs, pour confirmer son impression.
La durée ou le déroulement des séances va ensuite dépendre des objectifs que souhaitent atteindre le coaché, et des progressions réalisées. « Le coach va choisir les outils et méthodes les mieux adaptés à la personne, explique Bruno Wierzbicki. C’est de la relation que va naitre le changement. »
A tort, le coaching peut encore être assez controversé dans les esprits français. « Le stéréotype en France veut de penser : ‘si l’on sait que je me fais coacher, on va penser que je suis mauvais’, contrairement aux anglo-saxons pour qui la démarche est positive, souligne Bruno Wierzbicki. Mais c’est en train de changer. »
Une évolution que confirme Audrey Déléris : « Quand on recrute un directeur juridique, on essaye, en entretien, d’évaluer ce que les candidats aiment ou non, ce qu’ils ont fait ou pas fait, et de savoir ce qu’ils ont envie de faire – ce que souvent, ils ne savent pas. Le coaching peut alors être important, pour déterminer où l’on veut aller. Il peut aussi être un atout lors d’un recrutement, car il montre une capacité de remise en question, une connaissance de ses atouts, ... ce qui est très positif. »
Le coaching peut ainsi être bénéfique à la progression du directeur juridique. Mais il peut également être un outil de management, en conseillant à un membre de son équipe d’envisager un coaching.
Mais, souligne Catherine Desvignes, « comment savoir, en tant que manager, qu’un membre de son équipe peut avoir besoin d’un coaching ? Le plus souvent, le juriste rencontre des difficultés de comportement – des comportements qui s’avèrent récurrents, et qui ont un effet négatif sur le reste de l’équipe. »
Relever ce type de dysfonctionnements et proposer des solutions personnalisées pourra ainsi achever la transformation du directeur juridique… en un champion du leadership.