Quels sont les freins au recrutement rencontrés par les avocats ?
Une enquête très récente "Les vraies attentes des avocats vis-à-vis de leurs futurs collaborateurs juniors" s’intéresse au recrutement de jeunes avocats et de ce qu’en attendent les cabinets, avec des résultats éclairants y compris au-delà des avocats juniors.
En premier lieu, la difficulté rencontrée est de l’ordre du niveau d’expertise des candidats : 66% des cabinets interrogés disent "avoir du mal à trouver des candidats avec le bon niveau de compétences techniques" et 55% à "attirer les meilleurs profils". A moins d’estimer que les universités et les écoles d’avocats ne forment pas à un niveau suffisant (et alors il faudra envisager une formation continue interne), cela relève clairement d’une question d’image du cabinet, de pratique de communication visant à être identifiée comme une référence à même de fournir une ligne flatteuse sur un CV d’avocat - ou encore de montrer que l’on est un cabinet "où il fait bon travailler".
Cette famille de difficultés peut aussi relever d’une pratique un peu amateur dans le processus de recrutement, qui ne convainc pas les candidats qui actuellement sont à séduire, comme dans toute période de décalage entre offre et demande (c’est le cas sur le second semestre 2021).
Une autre difficulté liée à ce qui précède : 25% des cabinets disent aussi avoir du mal à "rendre le cabinet visible des candidats", et donc à déclencher des candidatures spontanées. Ici rien à conseiller d’autre que d’apprendre à mieux communiquer et à utiliser les médias adaptés (réseaux sociaux, presse, sites de recrutement).
Ensuite on constate des freins liés au projet qu’est la création d’un nouveau poste en cabinet : 40% ont "du mal à trouver des candidats avec les bonnes compétences additionnelles (savoir-être, motivation, langues,...)". Ici on peut avoir un problème de sensibilisation aux compétences complétant la technique du droit, des softskills à la pratique de langues étrangères. On peut y remédier par un recrutement pertinent couplé à une formation continue progressive, si l’on sait "donner du temps au temps"...
29% des cabinets indiquent aussi "avoir du mal à rencontrer des candidats avec un vrai projet de collaboration", ce qui relève aussi de la difficulté à partager une perspective et à la rendre enviable, mais aussi parfois au manque de fibre entrepreneuriale de jeunes avocats, qui évolue souvent avec le temps et l’expérience. On pourrait dans ce cas s’adresser plutôt à des avocats plus expérimentés et plus intéressés par l’association par exemple.
Les avocats qui recrutent rencontrent aussi des difficultés "techniques", comme "trier les candidatures" pour 11% d’entre eux, et là disons-le, c’est un métier, et pas vraiment celui des avocats. La fonction RH et les cabinets de recrutement sont là pour ceux qui n’ont pas l’expertise.
Recruter c’est bien, mais fidéliser c’est mieux (puisqu’il s’agit de réussir le recrutement dans le temps), et cela commence par l’insertion du collaborateur dans l’équipe en place, insertion qui est indiquée comme compliquée pour 15% des cabinets... Attention ici on sème (ou pas) la graine de la fidélisation, car 40% des avocats estiment avoir du mal à "retenir le collaborateur dans le temps". On ne négligera donc surtout pas l’accueil des nouveaux collaborateurs, on n’oubliera pas les entretiens annuels et points réguliers, et comme dans un couple, on songera que la solidité se construit !
Les méthodes de recrutement actuelles.
Tout change, mais il y a des fondamentaux. Recruter dans son réseau, par cooptation ou encore par candidature spontanée, est courant dans le monde des avocats. Du fait de la petite taille des cabinets répartis partout en France et de leur spécialisation croissante, ces méthodes sont plus importantes que dans d’autres secteurs d’activité, notamment dans les barreaux en régions.
Mais cela ne suffit pas nécessairement en période de forte activité, et il faudra souvent mettre en place une stratégie (simple) de communication sur son "marché", soit local, soit dans sa spécialité, par exemple vers les écoles d’avocats pour les juniors (annonce, rencontres ou conférences, participation à un évènement,...).
Viennent ensuite les annonces d’emploi, une action "qui va vers" les candidats où ils se trouvent, évidemment sur le Village de la justice pour vous servir, ou sur le site de votre Barreau par exemple. Avantage de cette solution, la rapidité (les premières candidatures arrivent en moyenne en quelques heures selon notre expérience), la possibilité de détailler sa recherche précisément, et parfois l’accès en complément à une CVthèque (une base de données de candidats en recherche active ou passive, mais qui se "mettent sur le marché" et à qui vous pouvez proposer votre offre). Cette méthode très visible concerne 40 à 60% des recrutements selon les périodes.
Il faut compter aussi sur la délégation à un cabinet de recrutement ou de chasse de tête, selon le niveau du poste. Cela a un coût, mais bien souvent compensé par le temps gagné ; les professionnels spécialisés du secteur [1] ayant une connaissance du marché et pouvant vous conseiller sur le profil que vous pourrez trouver réellement, selon l’état du marché (lequel varie énormément d’année en année).
Y a-t-il de nouvelles pratiques ?
Les autres pratiques ne sont pas toutes disruptives ou adaptées à la profession d’avocat, mais citons les job dating et les salons emploi (plutôt dédiés à des recrutement de nombreux postes sur plusieurs années) et les algorithmes qui sélectionnent automatiquement les CVs.
Il faut évidemment citer le "site à la mode" (pas récent), Linked In, qui est en train de devenir très encombré mais qui est utile pour recruter, surtout en communiquant régulièrement sur son cabinet - ce qui renvoie au sujet de l’e-réputation de l’avocat, un sujet global au croisement de la communication clients, du recrutement et de la numérisation de sa pratique...