Introduction.
Les coronavirus constituent une large famille de virus pouvant provoquer des maladies diverses, allant du rhume banal au syndrome respiratoire aigu sévère « SRAS ». Les coronavirus, ou Coronaviridae en latin, sont capables d’infecter un autre être vivant : un humain, un animal ou une plante. Il existe même des virus qui infectent les bactéries. Ils sont d’ailleurs utilisés comme traitement dans certaines infections bactériennes (on parle de bactériophages ou virus tueurs de bactéries).
Les coronavirus, eux, infectent les mammifères - dont l’homme - et les oiseaux. Les premiers coronavirus ont été observés dans les années 1960. Leur nom vient du latin corona, qui signifie « couronne », à cause de la présence de petites particules à sa surface, qui rappellent en effet une couronne.
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a qualifié le 30 janvier 2020, cette épidémie d’urgence de santé publique de portée internationale et l’a classée, le 11 mars 2020, en pandémie mondiale. Afin de contenir la propagation du virus, le Maroc a déclaré l’état d’urgence et le confinement sanitaire pour la période du 20 mars au 24 juin 2020.
Outre ces informations, nous sommes face au droit du travail, celui-ci est le fruit d’un long processus de négociation entre les autorités marocaines, les syndicats des travailleurs et certains organismes internationaux, le rédacteur du code de travail, en ce qui concerne les droits des travailleurs, ont essayé de lui garantir un « minimum légal ». Cela veut dire que l’employeur a la possibilité de prévoir des clauses beaucoup plus avantageuses pour le salarié, et n’a pas la possibilité de faire le contraire sous peine de sanction.
Quid du salarié en cas de pandémie ? Quid des dirigeants des entreprises après la pandémie ? Personne dans la relation de travail n’a la responsabilité du déclenchement de la pandémie. La question que l’on se pose est de savoir dans quelles mesures le législateur marocain protège-t-il les parties au contrat de travail en cas de pandémie ?
Pour répondre à notre problématique, nous examinerons successivement dans une première partie, les conditions du travail du salarié face à la Covid-19 (I), c’est-à-dire l’engagement et l’embauche (A), et l’exercice de l’activité au sein de l’entreprise (B).
Ensuite, dans un second lieu nous examinerons les effets de la pandémie Covid-19 par rapport à la fin de la relation contractuelle entre les parties (II) à savoir l’extinction du contrat de travail et la situation des entreprises en difficultés (A), enfin, les recommandations et les défis que nous pensons que le législateur doit prendre en compte pour améliorer notre corpus juridique marocain afin de mieux gérer les risques juridiques, économiques, structurelles ou technologiques (B).
I. Les conditions du travail du salarié face à la Covid-19.
Il s’agit d’un engagement mutuel de l’employeur et du salarié, c’est-à-dire une offre ferme et définitive adressée par l’employeur au candidat. Alors que les cas d’infection au coronavirus se multiplient au Maroc, les entreprises se réorganisent peu à peu … Quel est le sort du salarié face SARS-CoV-2 ? Nous commençons tout d’abord par la relation du travail (A), ensuite, l’exercice du travail au sein de l’entreprise (B).
A. La relation du travail : engagement et embauche.
Le code du travail marocain consacre deux manières d’embaucher le salarié, soit une embauche directe de la part de l’employeur, soit indirecte ou encore par le biais de certains organismes tel que l’ANAPEC ou les agences d’emploi privées. Quel que soit les modalités d’embauche, l’employeur doit respecter un principe général du droit, à savoir, le principe de non-discrimination.
En lisant attentivement les dispositions de l’article 9 de notre code du travail, nous constatons que celui-ci interdit la discrimination pour plusieurs raisons, mais en aucun moment le législateur dans cet article ne mentionne que la discrimination puisse être fondée pour des raisons de santé, qui a pour effet de violer ou d’altérer le principe d’égalité des chances et de traitement des salariés, en aucun cas on nous parle de la santé comme un motif d’écarter un salarié au sein d’une procédure d’embauche. La question se pose de la manière suivante : Si l’employeur prend connaissance de la maladie antérieure du salarié qui a été atteint de la Covid-19 et souhaite écarter ce dernier de la procédure d’embauche, que dit le code du travail sur cette question ?
Nous retrouvons la réponse dans ce principe générale du droit énuméré par l’article 9 à savoir le principe de non-discrimination, ce principe a une portée générale au-delà des situations déterminées par ledit article. La Cour de cassation marocaine a déjà eu l’occasion d’entériner cette position par rapport à l’âge du salarié. En effet, l’âge du salarié ne figure dans les dispositions de l’article 9 du code du travail, toutefois, la Cour de cassation a eu l’occasion d’indiquer que le salarié qui a dépassé l’âge de soixante ans a le droit d’être embauché, et ce, en conséquence du principe de la non-discrimination énuméré par la convention n°111, que le Maroc avait ratifié et qu’elle demeure partie intégrante de notre droit interne marocain.
De ce fait, le juge marocain doit lui donner application et celle-ci stipule expressément que l’état de santé ne peut être un motif pour écarter le salarié d’une situation d’embauche étant donné que dans le cas que nous venons de signaler le salarié a déjà guéri et par conséquent, il n’y a pas lieu de parler d’un état de santé, parce qu’il est considéré comme un salarié normal.
Qu’en est-il du salarié qui souhaite être embauché, mais l’employeur n’est pas au courant de son état de santé ? le code du travail prévoit dans une disposition qui figure dans l’article 290 qui dispose ce qui suit :
« Pour les travaux et emplois qui exigent un examen médical préalable, l’employeur doit soumettre les salariés qu’il se propose de recruter à une visite médicale et leur imposer de renouveler ensuite périodiquement cette visite ».
Puisque l’employeur a l’obligation de présenter chaque nouveau salarié nouvellement recruté à la visite médicale d’embauche, le médecin du travail qui par son art, sa technicité et son savoir-faire peut dépister dans le cadre de cet examen est-ce qu’un salarié a les symptômes du coronavirus ou pas. Ensuite, celui-ci va demander à l’employeur de sursoit à cette embauche parce qu’elle est de nature à porter un grave préjudice à l’entreprise. Nous remarquons alors que le maillon le plus important de cette chaîne au moment de l’embauche reste le médecin de travail qui lui et lui-seul peut se prononcer sur l’aptitude ou l’inaptitude en terme de santé.
B. L’exercice de l’activité du salarié au sein de l’entreprise.
Le code du travail met à la charge de l’employeur une obligation générale qui figure dans l’article 24 de celui-ci qui dispose ce qui suit : « De manière générale, l’employeur est tenu de prendre toutes les mesures nécessaires afin de préserver la sécurité, la santé et la dignité des salariés dans l’accomplissement des tâches qu’ils exécutent sous sa direction et de veiller au maintien des règles de bonne conduite, de bonnes mœurs et de bonne moralité dans son entreprise », cette obligation de l’employeur de respecter, de sauvegarder et de protéger la santé et la sécurité du salarié est une portée générale.
Au niveau de la doctrine se pose une question, est-ce qu’il s’agit d’une obligation de résultat ou d’une obligation de moyen ? La Cour de cassation française a eu l’occasion à plusieurs reprises d’indiquer que ce n’est pas une obligation de moyen, l’employeur est responsable lorsqu’advient un malheur au salarié, lorsque l’état de santé du salarié ou l’état physique de celui-ci est atteinte pendant l’exercice de son activité.
C’est une obligation principale qui incombe au salarié et qui fait qu’il doit protéger ses salariés contre la contagion du coronavirus, l’employeur doit veiller par tous les moyens d’éviter cet état de fait, faute de quoi il demeure responsable, non seulement vis-à-vis des salariés dans le cadre des dispositions du code du travail, mais aussi, des dispositions générales du Dahir des Obligations et des Contrats.
Quid du salarié qui a été atteint du coronavirus, mais effectue son service par inadvertance ou encore parce qu’il a peur de se mettre en situation de maladie et perdre les trois jours de carences de la CNSS, et encore une partie de son salaire parce que l’indemnisation de la CNSS pour cause de maladie n’est pas totale mais partielle ? le salarié préfère effectuer son service au sein de l’entreprise tout en sachant qu’il a tous les symptômes du coronavirus, et sait, qu’il va peut-être propager le virus. Ce salarié est responsable, il suffit de lire attentivement les dispositions de l’article 20 du code du travail, qui disposent que
« le salarié est responsable dans le cadre de son travail de son acte, de sa négligence, de son impéritie ou de son imprudence ».
Ce salarié a commis dans le présent cas une faute grave, qui justifie le renvoi de ce dernier, et qui donne à l’employeur le droit d’user de son pouvoir disciplinaire vis-à-vis de ce salarié sur la base des dispositions de l’article 20 du code du travail, et qui mettent à la charge du salarié la responsabilité de respecter les mesures d’hygiène et de santé au sein de l’entreprise.
Force est de constater que pendant l’exercice de l’activité, et en dehors de ces considérations, il existe une personne obligatoire pour les entreprises qui disposent de plus de cinquante salariés, où chaque fois que la nature de l’activité de l’entreprise est dangereuse doit être présente pendant toutes les heures du travail, nous faisons allusion au médecin du travail. Sur la base des dispositions de l’article 290 du code du travail, celui-ci a l’obligation de faire des visites périodiques annuelles à tous les salariés, via les contrôles préalables, le médecin du travail peut détecter les signes précurseurs de la présence de la maladie et les ébauches de celle-ci, et a l’obligation de tenir informer l’employeur de toutes les mesures qui sont susceptibles de protéger le salarié, cette proposition n’est pas une simple recommandation, l’employeur doit s’y plier sur la base des dispositions de l’article 318 du code du travail, du rôle préventif du médecin du travail et pour éviter certains dangers graves qui risqueraient de porter atteinte à la santé des salariés, le cas échéant, c’est l’inspecteur de travail qui tranchera l’affaire.
Constatons que le médecin du travail exerce son activité avec un lien de subordination sur la base des dispositions de l’article 312 qui dispose ce qui suit :
« Le médecin du travail est lié à l’employeur ou au chef du service médical inter-entreprises par un contrat de travail respectant les règles de déontologie professionnelle ».
Nous remarquons que le médecin du travail du moment qu’il constate qu’il y a un risque de propagation du coronavirus au sein de l’entreprise, doit porter conseil à l’employeur, ce dernier doit arrêter l’activité afin de prendre les mesures nécessaires pour éviter cette propagation. Une autre interrogation s’impose par rapport au médecin du travail, celui-ci et sur la base des dispositions de l’article 320 du code du travail qui disposent que « le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment, à l’âge, à la résistance physique ou à l’état de santé des salariés », l’employeur doit prendre en considération ces mesures, parce qu’elles ne sont pas de simples recommandations, ce rôle de conseil du médecin du travail peut jouer en faveur de la limitation de la propagation du coronavirus, et interrompre la chaîne de la contagion. Le médecin du travail peut demander à l’employeur d’exercer des contrôles complémentaires et des analyses complémentaires pour s’assurer de l’état de santé des salariés, le code du travail précise que ces analyses sont à la charge de l’employeur.
De même, et dans le même prolongement de ces idées, l’article 321 indique également que
« le médecin du travail a un rôle de conseiller en particulier, auprès de la direction, des chefs de service et du chef du service social, notamment en ce qui concerne l’application des mesures suivantes :
la surveillance des conditions générales d’hygiène dans l’entreprise ;
la protection des salariés contre les accidents et contre l’ensemble des nuisances qui menacent leur santé ;
la surveillance de l’adaptation du poste de travail à l’état de santé du salarié ;
l’amélioration des conditions de travail, notamment en ce qui concerne les constructions et aménagements nouveaux, ainsi que l’adaptation des techniques de travail à l’aptitude physique du salarié, l’élimination des produits dangereux et l’étude des rythmes du travail ».
Notre code du travail alors n’a pas ignoré la pandémie ou l’épidémie, il s’intéresse à ces derniers d’une façon vague. Faut-il rappeler que la règle de droit est une règle générale et abstraite, elle s’applique à plusieurs situations et le code du travail en parle d’une manière générale mais absolue, donc, ces considérations peuvent-être appliquées au cas présent « Covid-19 ».
De ce fait, nous parlerons d’une autre personne en l’occurrence l’inspecteur du travail, et sur la base des dispositions de l’article 532 a comme mission principale de faire en sorte à ce que les dispositions du code du travail soient appliquées au sein de l’entreprise. L’inspecteur du travail a un rôle de contrôle de l’application du code du travail, dans le cadre de cette mission de contrôle, il se peut que l’inspecteur du travail constate une violation de certaines réglementations relatives à la santé et à la sécurité des salariés, dans le présent cas c’est la Covid-19, ce virus est de nature à porter un préjudice grave à la santé et à la sécurité des salariés, dans ce cas-là, l’inspecteur du travail ordonne à l’employeur de faire tout son possible pour cesser immédiatement ce danger, le cas échéant, l’inspecteur du travail a le droit de saisir le juge des référés pour ordonner soit à ce que ce trouble soit immédiatement cessé, ou encore c’est le juge des référés qui constate qu’il y a lieu de fermer l’entreprise pour une période de dix jours jusqu’à six mois. Durant cette fermeture, l’employeur a l’obligation de payer le salaire pendant toute cette durée. Si jamais l’employeur enfreint la loi, celui-ci a le droit d’un procès-verbal qui serait adressé directement au Procureur du roi, qui peut saisir le tribunal pour qu’il y ait poursuite pénale à l’encontre de l’employeur.
Qu’en est-il du salarié qui souhaite se retirer du travail, par peur de contamination ? s’agit-il d’un refus délibéré d’exécuter une tâche tel qu’énuméré par l’article 39 du code du travail comme étant une faute grave ? ou s’agit-il d’un droit absolue du salarié ?
Rappelons que l’OIT a été créé en 1919 dans le but de promouvoir la justice sociale en tant que contribution à une paix universelle et durable. Le préambule de sa Constitution dispose de manière spécifique, que « la protection des travailleurs contre les maladies générales ou professionnelles et les accidents résultant du travail » est un élément fondamental de la justice sociale. Dans ce contexte, le Maroc n’a pas ratifié la convention n°155 de l’OIT sur la santé et la sécurité, cependant, l’Institut Marocain de Normalisation (IMANOR), qui a vu le jour en 2011 et placé sous tutelle du Ministère de l’Industrie, du Commerce et des nouvelles technologies, a élaboré plusieurs normes en lien avec la santé et la sécurité.
Néanmoins, le Maroc prend progressivement la pleine mesure en ratifiant la convention n°187 destinée à promouvoir la santé et la sécurité au travail et en adaptant son arsenal législatif et réglementaire, et il est de jurisprudence constante qu’il appartient à l’employeur de veiller personnellement à la stricte application par ses subordonnés des prescriptions légales destinées à assurer la sécurité du personnel. A cet effet, le droit de retrait est la faculté pour le salarié de quitter le lieu de son travail sans que sa décision ne l’expose à une perte de salaire ou une perte de travail, il est légitime de penser qu’une tâche qui lui a été confiée par son employeur comporte un risque imminent pour sa santé.
Qu’en est-il du salarié qui souhaite faire application de ce droit de retrait ? Nous pensons qu’il y a lieu d’appliquer les dispositions du dahir des obligations et des contrats notamment sur la force majeure, selon une jurisprudence constante, la force majeure doit être imprévisible, dans notre cas, personne ne peut prévoir le virus, irrésistible, les parties n’ont pas commis une faute à l’origine de l’évènement et n’ont pas pu l’éviter, et insurmontable, c’est-à-dire, il est devenu définitivement impossible de poursuivre la relation de travail. De ce fait, nous sommes en présence d’un cas de force majeure et savons qu’il permet à un contractant de ne pas respecter ses obligations contractuelles. Appliquons la même hypothèse pour l’employeur, qui refuse d’embaucher les salariés, abstraction faite de leur santé et sécurité mises en danger, que l’employeur demeure responsable de celles-ci et par conséquent, il se trouve en situation de force majeure, est-ce que l’employeur peut utiliser le cas de force majeure pour s’empêcher de payer le salaire ?
En outre, nous pouvons mettre en exergue ces hypothèses par rapport à ce qui se passe actuellement dans le pays, en respectant les directives des autorités gouvernementales, nous considérons que ces directives sont « un fait de prince ».
II. Les conséquences de la pandémie par rapport à la rupture du contrat de travail.
L’enjeu de la maîtrise des risques préoccupe toutes les entreprises, et ce de manière encore plus prégnante depuis ces dernières années, quels que soient leur taille, leur histoire, leur dimensionnement ou leurs activités. L’intérêt sociétal, mobilisé par les sollicitations permanentes de la sphère médiatique apparaît désormais plus que jamais focalisé sur les récentes catastrophes financières, industrielles, sanitaires et/ ou environnementales des entreprises, concrétisant de manière brutale et souvent spectaculaire des risques souvent complexes, parfois multiples.
A. L’extinction du contrat de travail entre perte de travail et entreprises en difficulté.
Nous sommes face à deux situations, soit que l’employeur souhaite licencier un salarié parce qu’il a présenté un certificat médical indiquant qu’il est atteint du coronavirus, par peur l’employeur le licencie. Force est de constaté encore une fois que l’article 34 du code du travail, indique que le licenciement doit être fondé sur un motif valable. D’ailleurs, l’article 36 reprend textuellement la convention n°158 de l’OIT sur le licenciement et les dispositions de la conventions n°111 qui sont toutes les deux ratifiées par le Maroc, indiquent que l’employeur ne peut pas licencier le salarié pour des considérations qui portent sur plusieurs considérations, le juge peut très bien donner application à ces dernières en indiquant que ce licenciement est fondé sur un principe discriminatoire, et par conséquent, il est prohibé par la loi. Il se peut également que le salarié souhaite démissionner et nous savons que lorsqu’il y a démission, le salarié est dans l’obligation de respecter la période de préavis qui dépend du statut du salarié. Par crainte d’être contaminé par la Covid-19, le salarié refuse de respecter la période de préavis.
En outre, vu la situation actuelle, plusieurs secteurs arrêtent leurs activités, soit partiellement ou définitivement, cela ne restera pas sans risque. L’activité des entreprises diminue voire disparaît, qui entraînera des difficultés par la suite. Nous pouvons toujours faire application des dispositions du livre V du code de commerce.
Il s’agit des entreprises qui connaissent des situations irrémédiables, c’est-à-dire, elles ne peuvent en aucun cas se permettre plus tard quel que soit la situation de reprendre leur activité, parce que la situation est extrêmement préjudiciable, et par conséquent, il n’y a aucune possibilité de survivre. Les plus touchés sont sans doute les entreprises opérant dans les secteurs les plus impactés mais également celles les plus vulnérables aux facteurs exogènes. C’est le cas des TPE et PME.
Il y a lieu de donner application aux dispositions de l’article 66 et suivant du code du travail qui dispose ce qui suit :
« L’employeur dans les entreprises commerciales, industrielles ou dans les exploitations agricoles ou forestières et leurs dépendances ou dans les entreprises d’artisanat, occupant habituellement dix salariés, pour motifs technologiques, structurels ou pour motifs similaires ou économiques, doit porter sa décision à la connaissance des délégués des salariés et, le cas échéant, des représentants syndicaux à l’entreprise, au moins un mois avant de procéder au licenciement… ».
Nous remarquons que le législateur ajoute un quatrième motif « ou similaire », cette expression vague nous permet d’intégrer la Covid-19 dans ces considérations. Cet article nous indique que l’employeur a l’obligation justement de négocier avec les salariés les moyens d’éviter le licenciement et d’établir à la fin de cette concertation un procès-verbal, s’il existe des solutions avec les institutions représentatives de personnelles, c’est positif, le cas échéant, l’employeur doit constituer un dossier qu’il doit remettre au directeur régional ou provincial chargé du travail qui établit un rapport, ce rapport sera envoyé au gouverneur qui réunira une commission appelée la commission tripartite régionale pour statuer sur les licenciements pour des raisons économiques, technologiques ou structurelles, et celles-ci se prononcent en faveur soir de la fermeture de l’entreprise ou encore, le refus de cette fermeture.
Nous sommes devant deux situations : si la commission provinciale chargée de statuer sur les autorisations de fermeture pour des raisons économiques, structurelles ou technologiques accorde cette autorisation, l’employeur peut fermer l’entreprise à condition de payer deux types d’indemnités, une indemnité de licenciement prévue par les dispositions de l’article 96 du code du travail, et une indemnité de préavis. Si jamais la commission est défavorable pour la fermeture de l’entreprise, l’employeur doit se plier à ces considérations, le cas échéant, la jurisprudence de la Cour de cassation est constante pour considérer que ce licenciement est injustifié, ce licenciement est abusif, et par conséquent, condamne cet employeur à payer trois indemnités, des dommages-intérêts prévues par l’article 41 du code du travail, une indemnité de licenciement prévue par l’article 53 du code du travail et enfin, le préavis.
B. Les défis du législateur : L’IA.
Nous préférons poser la question suivante : Est-ce que le Maroc ne dispose-t-il pas d’outils informatiques d’analyse des données qui pourraient nous permettre de mieux anticiper, gérer et contrer la pandémie de coronavirus ? en d’autres termes, est-ce que l’Intelligence Artificielle peut prédire la propagation du coronavirus ?
Le 30 décembre 2019, grâce à des algorithmes qui scannent le Web, des chercheurs avaient identifié des cas de pneumonie inhabituelle à proximité d’un marché de Wuhan, dans le centre de la Chine. Cependant, il a fallu un mois avant que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ne déclare une urgence de santé publique de portée internationale. En effet, le pouvoir de ces outils existe, mais nous n’avons pas encore vraiment trouvé comment l’exploiter. BlueDot a développé un algorithme qui passe en revue des centaines de milliers d’articles de presse chaque jour et des données du trafic aérien afin de détecter et suivre les risques de propagation de maladies infectieuses. Dans le cas de Covid-19, BlueDot a envoyé à ses client des alertes dès le 31 décembre, et a aussi correctement prédit dans quels pays le virus risquait de se propager.
Il est impossible de dire où l’intelligence artificielle IA ira dans l’avenir. Mais il est facile de dire où elle n’ira pas : elle ne va pas rester dans son coin. Au contraire, elle sera omniprésente et incontournable. En effet, la plupart des développements ont déjà commencé, d’ici une vingtaine d’années, d’innombrables applications de ce genre vont façonner nos vies. Les sociétés industrielles deviendront dépendantes de ces technologies. Les pays en développement seront aussi concernés avec des conseils médicaux ou agronomiques issus de l’intelligence artificielle, disponibles pour ceux qui vivent à des kilomètres des hôpitaux modernes ou des experts agronomes. Nous assistons à une véritable révolution digitale.
A cet égard, un outil d’intelligence artificielle pour appréhender l’évolution du coronavirus et déterminer les actions à entreprendre pour limiter son impact, a été conçu par un professeur marocain. Cet outil permettra de signaler la gravité clinique des cas contaminés par la pandémie, et aidera les médecins à déterminer quels patients ont réellement besoin de lits et quels sont ceux qui peuvent rentrer chez eux, les ressources des hôpitaux étant limitées. Un partenariat est actuellement en discussion entre l’Université d’Al-Akhawayn et NYU, pour l’utilisation de technologies avancées en faveur du tracking de la propagation de Covid-19 au Maroc, mais aussi de la détermination de façon précise de ses impacts sur les plans économique et sanitaire.
Dans le cadre du droit du travail, l’Intelligence Artificielle au Maroc facilite le recrutement dans la mesure où le portail de recrutement marocain spécialisé dans l’emploi, intègre l’Intelligence Artificielle dans le processus de recrutement pour mieux accompagner le Maroc sur les enjeux RH des années à venir. Les algorithmes permettent d’analyser des millions de données parmi de multiples bases de données, sur les réseaux sociaux professionnels tel que LinkedIn par exemple, et d’identifier une expertise spécifique. Le sourcing d’un candidat est donc beaucoup plus précis. La recherche d’un candidat aux compétences rares notamment, le Big Data et l’Intelligence Artificielle sont d’une grande efficacité. En outre, et dans le contexte actuel de la crise sanitaire de Covid-19, les startups peuvent apporter une réponse adéquate. Elles peuvent apporter de nouvelles solutions dans le domaine de la santé, de l’éducation ou encore du transport. Les startups représentent le fer de lance d’un nouveau modèle de développement.
Conclusion.
Et si la crise de coronavirus était une bonne nouvelle ?
A travers ce qui précède, nous remarquons que le code du travail n’a pas ignoré complétement les aléas de Covid-19 sur la relation de travail, ni au moment de l’embauche, ni pendant l’embauche.
Avec les mesures drastiques que le Maroc a prises, notamment, la suspension des connexions aériennes et maritimes, afin de limiter la propagation du coronavirus sur l’ensemble du territoire, il y a lieu de parler d’une jurisprudence constante, le tribunal administratif de Casablanca a autorisé un ressortissant libyen en transit vers la Tunisie à accéder au territoire marocain en dépit de la fermeture des frontières. Le tribunal s’est fondé sur
« les principes de la justice au sens large qui doivent être pris en considération par le juge des référés pour accomplir son rôle positif en matière de protection des libertés publiques des individus et de leur situation juridique ».
La Cour d’appel administrative de Rabat a considéré la décision de fermeture des frontières marocaines comme
« un acte de souveraineté par excellence dont les effets juridiques ne peuvent être suspendus ou les dispositions négligées que dans les cas décidés par la décision d’interdiction elle-même ou par des actes ultérieurs pris par la même autorité compétente ».
Nous pensons que cet état de crise sanitaire dans le monde et particulièrement au Maroc, nous a montré que le législateur n’a pas totalement ignoré la place du salarié considéré généralement comme une partie faible dans le contrat de travail. Il faut imaginer en effet la pensée du législateur lors de la lecture des dispositions du code du travail, et nous pouvons bien intégrer le cas de Covid-19 parmi ces consécrations. Nous pensons que cette crise sanitaire a accéléré la digitalisation des administrations marocaines, la digitalisation de tous les secteurs est impérative pour garantir la continuité des services indispensables.
Bibliographie.
Ouvrages généraux.
AL-Khalili Jum, Ce que la science sait du monde de demain, Intelligence artificielle, transhumanisme, menace climatique, surpopulation …Notre vie en 2050, Ed., 1., édition Presses polytechniques et universitaires romandes, 2020, Paris, p.10.
Ouvrages spéciaux.
Audiguier Pierre, La rupture du contrat de travail, Ed., Afnor, 2011, Paris, p.43.
Darsa Jean-David, Les risques opérationnels de l’entreprise, un environnement toujours plus risqué ?, Ed., Gereso, Paris, 2013, p.17.
Kierzek Gérald, Fanny Bernardon, Coronavirus, comment se protéger ? 5à question-réponses, Ed., Archipoche., Paris, 2020, p.15.
Prevalet Martial, La gestion des risques dans la Fonction Publique, Gestion de crise dans une direction ou un service, Ed., Gereso, 2e édition, Paris, 2020, p.45.
Villani Cédric, L’IA, une énérgie précieuse à canaliser, Livre Blanc IA, Paris, Ed., Ed., CCI Essonne, 2019, p.4.
Article.
Badaoui Saroit, « Le fait du Prince dans les contrats administratifs », In : Revue internationale de droit comparé, 1956, n°8-1, pp. 158-159.
Thèse.
Schütz Rose-Noëlle, L’aménagement de la force majeure dans le contrat : essai de théorie générale sur les clauses de force majeure dans les contrats internes et internationaux de longue durée, Thèse pour l’obtention du grade de Docteur de l’Université de Poitiers, soutenue le 03 juillet 2012, p.30.
Jurisprudences.
Arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation en date du 23 novembre 1950.
Arrêt du T. Adm. De Casablanca, ordonnance du juge des référés n°239 du 23 mars 2020, dossier n°358/7101/2020.
Arrêt de la C. App. Adm. De Rabat, Arrêt n°210 du 26 mars 2020, Dossier n°422/7202/2020.