1. La prolongation du télétravail, une préconisation gouvernementale.
Lors de son allocution en date du 28 avril 2020, le Premier Ministre Edouard Philippe a encouragé la poursuite du télétravail pendant « au moins les 3 prochaines semaines » [1].
Il s’ensuit que le travail à distance est, en principe et dès lors que cela est possible, à maintenir. Cependant, et comme depuis le début du confinement, aucune loi ni aucun texte réglementaire n’est venu instituer l’obligation légale pour les employeurs d’instituer le télétravail.
De la même façon qu’au moment du confinement, l’annonce gouvernementale relève d’une préconisation qui ne vaut pas obligation légale pour les entreprises de laisser leurs salariés télétravailler au-delà du 11 mai.
Concernant le télétravail en période de COVID 19, voir aussi nos 2 articles :
Télétravail et Covid-19 : quelle protection des salariés contre le harcèlement moral ?
Télétravail et Covid 19 : salariés, quels sont vos droits et obligations ?.
2. L’obligation de sécurité à charge de l’entreprise, une « contrepartie ».
Si légalement rien n’oblige votre employeur à vous maintenir en télétravail et qu’il peut, de façon corollaire, vous enjoindre à retrouver votre poste sur site, il n’en demeure pas moins qu’il lui incombe d’assurer votre santé et votre sécurité sur le lieu de travail [2].
Ainsi, votre employeur est présumé mettre en place les mesures nécessaires à la préservation de votre santé et de votre sécurité.
A cet effet, le gouvernement a publié un protocole de déconfinement le 3 mai 2020.
Parmi les recommandations à destination des entreprises figurent les règles suivantes : « aérer régulièrement (toutes les 3 heures) les pièces fermées, pendant quinze minutes » ou encore « mettre en œuvre les mesures de distanciation physique » qui se traduit par le fait de « ne pas se serrer les mains ou embrasser pour se saluer, ni d’accolade », et de respecter une « distance physique d’au moins 1 mètre (soit 4m² sans contact autour de chaque personne) » [3].
Ainsi, l’employeur qui parvient à mettre ces recommandations en œuvre, ainsi que toute autre mesure appropriée, est supposé, sous réserve de l’appréciation des juges en cas de contentieux, tout mettre en place de manière à ce que votre santé soit préservée.
Si vous estimez que ce n’est pas le cas et que les mesures de prévention ne sont pas au rendez-vous, il vous reste à envisager l’exercice de votre droit de retrait.
3. L’exercice du droit de retrait, notamment si votre employeur n’a pas mis en œuvre les mesures pour garantir votre santé et votre sécurité.
Là encore, comme depuis le début du confinement, l’exercice du droit de retrait demeure possible pour le salarié qui se considère confronté à un danger grave et imminent [4].
Si les questions-réponses publiés par le gouvernement tendent à décourager l’utilisation de ce droit, il n’en demeure pas moins qu’il demeure à votre disposition si vous estimez que les mesures de nature à préserver votre sécurité n’ont pas été mise en place.
Le juge demeure le seul à pouvoir apprécier si l’exercice du droit de retrait est justifié par l’existence d’un danger « grave » et « imminent ».
L’imminence du danger peut être défini comme « tout danger susceptible de se réaliser brutalement dans un délai rapproché » [5].
Ainsi, vous pouvez faire usage de votre droit de retrait, cependant, il vous appartiendra de démontrer que les critères qui le constituent étaient réunis, en cas de contentieux.
L’exercice du droit de retrait pourrait être considéré comme légitime, si votre employeur n’a pris aucune des 8 mesures pour garantir votre santé et votre sécurité préconisées dans le protocole publié par le Gouvernement.
Si c’est le cas, nous vous conseillons de prendre des photos de votre lieu de travail et de votre bureau à titre de preuves.
4. Le refus de vous rendre sur votre lieu de travail, une faute ?
Enfin, ne pas vous rendre sur votre lieu de travail ce lundi 11 mai 2020 alors même que vous avez reçu la directive de la part de votre employeur de vous y présenter peut-être constitutif d’une faute.
Cela pourrait être considéré comme un abandon de poste, une absence injustifiée ou encore une insubordination. Les qualifications peuvent être nombreuses.
En effet, refuser de vous rendre sur le lieu de travail pour exécuter votre prestation de travail constitue un manquement à vos obligations contractuelles.
L’exécution loyale du contrat suppose d’effectuer vos tâches dans les conditions fixées par votre contrat de travail, par votre employeur.
5. Le cas des salariés vulnérables, la possibilité de rester chez-eux
L’article 20 de la loi du 25 avril 2020 [6] prévoit que les salariés vulnérables doivent être placés en activité partielle, et ce, au-delà du 11 mai 2020.
Un décret du 5 mai 2020 [7] énumère limitativement les cas dans lesquels une personne doit être considérée comme faisant partie des personnes vulnérables.
Parmi les 11 cas listés, figurent le fait d’ « être âgé de 65 ans et plus », d’« avoir des antécédents (ATCD) cardiovasculaire », ou de « présenter une pathologie chronique respiratoire ».
Ainsi, votre employeur ne peut pas vous contraindre à venir travailler le lundi 11 mai 2020 et vous devez rester à votre domicile s’il ressort de votre situation que :
vous êtes une personne vulnérable au sens du texte précité,
vous partagez « le même domicile qu’une personne vulnérable »,
vous êtes « parent d’un enfant de moins de seize ans ou d’une personne en situation de handicap faisant l’objet d’une mesure d’isolement, d’éviction ou de maintien à domicile ».