Le cas d’espèce concerne la cession de titres d’une société exerçant une activité de restauration rapide dans un local commercial pris à bail.
Postérieurement à la signature de l’acte de cession, l’acquéreur découvre l’existence d’une restriction inhérente au règlement de copropriété, empêchant l’installation d’un dispositif d’extraction des fumées ou de ventilation. Cette interdiction rendait impossible l’exercice d’une activité nécessitant la cuisson par friture, pourtant envisagée au moment de la transaction.
Estimant que cette contrainte constituait une information essentielle qui lui avait été volontairement dissimulée, le cessionnaire introduit une action en réparation du préjudice subi sur le fondement d’un manquement à l’obligation d’information précontractuelle. Cette procédure, engagée le 12 février 2020, visait à faire reconnaître que l’absence d’information sur l’impossibilité de procéder à certaines opérations culinaires compromettait l’exploitation projetée du fonds de commerce.
En appel, les juges ont rejeté cette demande, estimant que l’acquéreur ne parvenait pas à établir que l’impossibilité d’effectuer des fritures constituait un élément déterminant de son consentement, au sens de l’article 1112-1 du Code civil.
L’argumentation des demandeurs, reconduite devant la Cour de cassation, reposait sur l’idée que cette information, en lien direct et nécessaire avec l’objet du contrat, devait être considérée comme substantielle au regard de leur engagement.
La chambre commerciale de la Cour de cassation rejette le pourvoi en posant une clarification jurisprudentielle inédite. En date du 14 mai 2025, la Cour de Cassation rejette pourvoi affirmant que : « le devoir d’information précontractuelle ne porte que sur les informations qui ont un lien direct et nécessaire avec le contenu du contrat ou la qualité des parties, et dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre partie ».
Ainsi, contrairement à ce que soutenaient les demandeurs, le devoir d’information n’implique pas la communication de toute information ayant un tel lien, mais uniquement celles dont l’importance dans le processus décisionnel de l’autre partie peut être prouvée.
Au cœur de cette décision se trouve la question cruciale de la démonstration du caractère déterminant de l’information omise.
En effet, il ne suffit pas de prouver que l’information est pertinente ou en lien avec le contrat ; encore faut-il établir que, sans cette donnée, le consentement n’aurait pas été donné ou aurait été profondément altéré. Cette exigence probatoire, prévue à l’alinéa 4 de l’article 1112-1 du Code civil, incombe exclusivement à la partie qui invoque le défaut d’information.
Dans le cas présent, l’acquéreur n’a pas réussi à apporter une preuve suffisante de ce caractère déterminant. La cour d’appel a en effet estimé que la preuve d’un lien causal entre l’omission d’information et la formation du consentement n’avait pas été rapportée, ce qui justifie le rejet du pourvoi. La décision rendue insiste donc sur la rigueur exigée dans l’administration de cette preuve, laquelle peut s’avérer particulièrement complexe en raison de sa nature subjective, souvent difficile à objectiver a posteriori.
La jurisprudence ainsi consolidée illustre un durcissement de la mise en œuvre de l’article 1112-1 du Code civil. Elle met en lumière la distinction opérée entre le simple lien direct l’exigence autonome du caractère déterminant, laquelle suppose des éléments concrets issus des négociations ou des circonstances entourant la conclusion du contrat.
En définitive, la portée de cette décision dépasse le seul cas d’espèce. Elle invite les parties à un contrat à accorder une attention accrue à la traçabilité des échanges précontractuels. Il devient crucial de conserver toute documentation susceptible de démontrer, par un faisceau d’indices, que certaines informations étaient essentielles à la formation du consentement du contractant.