Selon le rapport de l’ICCA-Queen Mary Task Force, le tiers financeur signifie « toute personne physique ou morale qui n’est pas partie à un règlement de différends mais qui entre dans une relation contractuelle avec une partie au règlement […] en vue de lui fournir un soutien matériel ou financier relatif aux coûts de la procédure […] en échange d’un retour sur investissement ou d’un remboursement partiel ou total suivant l’issue de la procédure » [1]. Celui-ci n’a pour l’instant aucune obligation de révéler son implication financière au tribunal arbitral ou aux autres parties au RDIE quand bien même la pratique est de plus en plus courante. Ces tiers financeurs sont bien souvent des cabinets d’avocats, des sociétés d’investissements ou des compagnies d’assurance qui ont un intérêt logiquement différent de l’investisseur partie au litige puisqu’ils n’agissent pas en vue d’obtenir une réparation d’un préjudice.
Le financement par des tiers à un RDIE peut avoir pour avantage de rééquilibrer les forces. Les coûts de procédure à un RDIE étant élevés [2], certaines entreprises telles que des PME n’auraient pas les moyens d’engager des poursuites face à un État sans ce financement. Il permet également de répartir les risques que peuvent entraîner une telle procédure. En effet, l’avancement de certains frais et la durée de la procédure peuvent conduire à un risque de faillite de l’investisseur ou à un manque de liquidités, ce que le recours au financement par un tiers permet d’éviter.
Cependant, le financement par des tiers soulève plusieurs questionnements. Il existe un risque de conflit d’intérêts avec les arbitres nommés à la procédure. En effet, les arbitres connaissent plusieurs affaires et peuvent être également conseils à des RDIE. Il est ainsi possible qu’une partie à un premier RDIE soit le tiers financeur à un deuxième RDIE où l’arbitre de la première procédure agit lors de la deuxième en tant qu’arbitre également ou en tant que conseil. Un tel cas pourrait-il conduire à un potentiel conflit d’intérêts voire à une remise en cause ultérieure de la sentence en cas de découverte des différents liens entre les procédures ? Un autre risque soulevé concerne le contrat de financement entre le tiers financeur et la partie au règlement. Quel type de clauses contient ce contrat de financement ? Quel contrôle exerce le tiers financeur sur le déroulement de la procédure ? Quelles seraient les conséquences sur la procédure de RDIE si le contrat de financement venait à être résilié ?
Une obligation de divulgation pourrait résoudre certains de ces questionnements comme tout d’abord le possible conflit d’intérêts. Il permettrait également de contrôler le degré d’implication de ce tiers financeur dans la procédure de RDIE. De plus, ce renforcement de la transparence n’aurait pas pour conséquence de diminuer le nombre de financement par des tiers à un RDIE puisque ceux-ci ne verraient pas leurs intérêts personnels remis en cause. En exemple, la Commission sur la réforme du droit de Hong-Kong a établi dans son rapport final d’octobre 2016 qu’elle était favorable à la divulgation du financement par des tiers au tribunal arbitral et aux autres parties au litige [3].
Par ailleurs, le Groupe de Travail III de la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international a abordé le sujet lors de sa 34e Session et a tenu à rappeler que « le financement par des tiers était devenu une source de préoccupation majeure, car il créait un déséquilibre systémique et ne garantissait pas des conditions équitables » [4]. En définitive, la question du tiers financeur n’est que sous-jacente à la problématique actuelle relative aux coûts et à la durée des procédures de RDIE.