La juridiction a considéré que la simple création d’une société, sans qu’elle exerce d’activité, parallèlement à un emploi, ne constitue pas un acte de concurrence déloyale ni un comportement fautif justifiant une sanction disciplinaire.
Ce jugement met en lumière les limites du pouvoir disciplinaire de l’employeur face à l’initiative personnelle des salariés.
Il rappelle aussi que l’intention entrepreneuriale, lorsqu’elle reste loyale et ne fait pas concurrence à l’activité de l’employeur, n’est pas susceptible de sanction disciplinaire.
1. Contexte des faits.
La société Fusion Trade France, spécialisée dans le négoce de composants électroniques, a recruté deux salariés en qualité de gestionnaires de comptes.
En juillet 2023, ces deux salariés ont fondé ensemble une société avec pour projet de lancer, parallèlement à leur emploi, une entreprise de valorisation des déchets.
Dès le mois de septembre 2023, l’employeur a exercé des pressions sur ses deux salariés, en coupant leurs accès informatiques et leur interdisant l’accès locaux.
A la suite d’un refus de signature d’une rupture conventionnelle, les salariés ont été licenciés pour faute grave au motif de l’exercice de la création de cette société.
Les deux salariés ont saisi le Conseil de prud’hommes de Paris pour contester leur licenciement.
2. Décisions du Conseil de prud’hommes.
Par deux jugements en date du 14 février 2025 (24/01462 et 24/01460), le Conseil de prud’hommes confirme que la création d’une société sans activité en parallèle de l’emploi ne constitue pas un acte de déloyauté susceptible de sanction disciplinaire.
En effet, la juridiction prud’homale a considéré en particulier que :
- Les objets sociaux respectifs de la société employeur et de la nouvelle société tels que définis par leurs statuts différaient largement ;
- La partie défenderesse ne justifiait en rien que la nouvelle société aurait eu une activité concurrente ou susceptible de lui nuire ;
- La nouvelle société n’avait pas, à la date du licenciement, une activité.
Le Conseil estime donc que les deux sociétés ne sont pas concurrentes, et qu’il n’y a aucune faute caractérisée.
L’obligation de loyauté inhérente au contrat de travail ne s’assimile pas à une interdiction générale d’exercer une activité parallèle.
En rappelant que la création d’une société sans activité concurrente à l’employeur ne constitue pas une faute justifiant un licenciement, cette décision rappelle que l’initiative entrepreneuriale reste légitime tant qu’elle ne porte pas atteinte aux intérêts de l’employeur.
Le Conseil juge que les licenciements sont sans cause réelle et sérieuse et condamne la société Fusion Trade France à verser un montant total des condamnations de plus d’un million d’euros bruts.