1) Principe et champ d’application.
La réception des travaux par le maître d’ouvrage marque le point de départ du délai des garanties légales dont la garantie de parfait achèvement.
Cette garantie est prévue à l’alinéa 2 de l’article 1792-6 du Code civil :
« […] La garantie de parfait achèvement, à laquelle l’entrepreneur est tenu pendant un délai d’un an, à compter de la réception, s’étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l’ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception.
Les délais nécessaires à l’exécution des travaux de réparation sont fixés d’un commun accord par le maître de l’ouvrage et l’entrepreneur concerné.
En l’absence d’un tel accord ou en cas d’inexécution dans le délai fixé, les travaux peuvent, après mise en demeure restée infructueuse, être exécutés aux frais et risques de l’entrepreneur défaillant.
L’exécution des travaux exigés au titre de la garantie de parfait achèvement est constatée d’un commun accord, ou, à défaut, judiciairement.
La garantie ne s’étend pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l’usure normale ou de l’usage ».
La garantie de parfait achèvement permet au maître d’ouvrage de faire réparer rapidement les malfaçons apparentes réservées à la réception et celles révélées dans l’année suivant la réception, l’entrepreneur ayant l’obligation légale de reprendre les travaux réalisés dans l’année, quelle que soit la nature (vice, non-conformité ou défaut d’isolation phonique) ou la gravité des dommages.
Pour rappel, la réception purge les vices apparents qui n’ont pas été réservés dans le procès-verbal de réception (cf. notre article L’importance du procès-verbal de réception dans les travaux).
Enfin, la garantie de parfait achèvement ne couvre pas les travaux nécessaires pour remédier aux effets de l’usure normale ou de l’usage de l’ouvrage.
2) Conditions d’exercice.
La garantie s’applique dans le délai d’un an à compter de la réception de l’ouvrage, et la réparation portera donc sur tous les désordres réservés (vices apparents), ou ceux révélés postérieurement à la réception et notifiés dans ce délai.
La réparation au titre de la garantie de parfait achèvement doit être intégrale et ne peut pas être remplacée par un abattement sur le prix si la réparation est possible.
Cette garantie s’applique à l’encontre de tout entrepreneur, c’est-à-dire, de tout constructeur qui a réalisé des travaux sur tout ou partie de l’ouvrage.
En pratique, il conviendra de se référer aux marchés des travaux qui concernent les désordres allégués afin de déterminer le ou les entrepreneurs visés par la garantie.
Dans un premier temps, le maître d’ouvrage et l’entrepreneur sont invités à s’entendre amiablement sur les délais nécessaires à l’exécution des réparations.
Dans un second temps, à défaut d’accord ou d’exécution dans les délais convenus, le maître d’ouvrage est tenu de mettre en demeure l’entrepreneur de lever les réserves en réalisant les réparations.
Le cas échéant, le maître d’ouvrage et l’entrepreneur peuvent constater amiablement l’exécution des réparations voire judiciairement.
En cas de mise en demeure infructueuse, le maître d’ouvrage peut faire réaliser les réparations par un tiers aux frais et risques de l’entrepreneur défaillant.
La mise en demeure doit nécessairement être postérieure à la réception et constitue un préalable indispensable à toute suite judiciaire.
Enfin, la garantie de parfait achèvement est d’ordre public, ainsi toute clause d’un contrat ayant pour objet de limiter voire d’exclure cette garantie sera réputée non écrite [1].
3) Forclusion de la garantie de parfait achèvement.
La garantie de parfait achèvement s’exerce dans le délai d’un an à compter de la réception des travaux, mais cela ne signifie pas qu’aucune réparation ne peut être exécutée par l’entrepreneur une fois ce délai passé.
La garantie de parfait achèvement est soumise à la forclusion, c’est-à-dire, que le maître d’ouvrage dispose d’un délai d’un an pour exercer une action judiciaire au titre de cette garantie.
A défaut, toute procédure engagée sur ce fondement sera déclarée irrecevable.
Toutefois, la forclusion peut être interrompue par la délivrance d’une assignation (en référé ou au fond) à l’entrepreneur avant l’expiration de ce délai d’un an [2], et fera courir un nouveau délai d’un an.
L’article 2242 du Code civil précise notamment que :
« L’interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu’à l’extinction de l’instance ».
La décision judiciaire constituera donc le point de départ du nouveau délai de forclusion.
La procédure de référé ayant un caractère provisoire, une vigilance accrue sera nécessaire dans le cas d’un référé-expertise.
Cette procédure ayant pour objet la désignation d’un expert judiciaire qui va apprécier les désordres signalés par le maître d’ouvrage, un nouveau délai de forclusion va donc courir à partir de l’ordonnance de référé qui désignera l’expert.
En pratique, les expertises judiciaires en construction se déroulent souvent sur une durée supérieure à un an.
Il sera donc nécessaire d’interrompre à nouveau le délai de forclusion par la délivrance d’une nouvelle assignation au fond.
Procéduralement, il peut être envisagé d’assigner au fond l’entrepreneur dans l’année de la réception des travaux, puis de solliciter le sursis à statuer dans l’attente du déroulement d’une expertise judiciaire qui pourra être sollicitée en référé.
Ce solution présente l’avantage d’interrompre la forclusion directement devant le juge qui a vocation à statuer définitivement sur le litige.
L’article 145 du Code de procédure civile précise toutefois qu’il est possible de solliciter une expertise judiciaire directement devant le juge du fond en tant que décision d’avant dire droit [3].
Dans ce cas, le juge du fond restera saisi de l’expertise et de son bon déroulement.
Enfin, la garantie de parfait achèvement coexiste avec d’autres régimes de responsabilité notamment la garantie décennale et la responsabilité contractuelle de droit commun, de sorte que le maître d’ouvrage pourra exercer l’action de son choix lorsque les conditions seront remplies.
En quelques mots, la garantie de parfait achèvement :
- Oblige l’entrepreneur à reprendre les travaux réalisés dans l’année, quelle que soit la nature ou la gravité des dommages ;
- S’exerce dans le délai d’un an à compter de la réception, à peine de forclusion ;
- S’applique à tous les désordres apparents réservés à la réception ou révélés dans l’année de la réception (y compris les défauts d’isolation phonique) ;
- Nécessite une mise en demeure préalable de l’entrepreneur avant toute suite judiciaire ;
- Doit être actionnée judiciairement par la délivrance d’une assignation avant l’écoulement du délai annal.
La vigilance est donc de mise pour s’assurer de l’effectivité de cette garantie légale dans l’année de la réception des travaux !



