Un séisme dans le monde de la télé-réalité.
Voici les faits. Depuis quelques semaines, une candidate du programme phare les « Vacances des Anges » dénonce le harcèlement qu’elle aurait subi de la part d’autres candidats [1]. Sur les réseaux sociaux et à la télévision, plusieurs candidats actuels ou passés de l’émission phare de NRJ12 ont également fait état de « pressions » de la production pour « se mettre en couple » ou de « propos gênants », voire « insultants », tenus lors des castings et du tournage.
La télévision n’est pas un espace en dehors du droit du travail !
Depuis un fameux arrêt à propos des participants au tournage de l’émission de télé-réalité,« L’Île de la tentation » [2], la Cour de cassation relève la prestation accomplie sous la subordination d’une société production relève du droit du travail.
Puisque les participants à ces émissions ont désormais un contrat de travail, le droit du travail devrait s’appliquer dans son entièreté, et en l’occurrence, plus particulièrement les dispositions concernant le harcèlement.
Le harcèlement moral et sexuel existe aussi à la TV.
Suivant l’article article L1152-1 du Code du travail, il convient de rappeler qu’aucun salarié et donc qu’aucun candidat de télé-réalité ne devrait subir les agissements répétés de harcèlement moral ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Cette définition prévue par la loi est très large et peut aisément s’appliquer aux éléments relatés par ces candidats.
Concernant le harcèlement sexuel les textes sont encore plus explicites.
« Aucun salarié ne doit subir des faits :
1°) Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
2°) Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers ».
Il convient de considérer à la fois les messages portés par certains candidats du programme mais aussi les incitations éventuelles de la production.
Des sanctions possibles, mais contre qui ?
Les candidat·e·s de téléréalités bénéficient d’une protection contre les harceleurs qui n’ont pas nécessairement de lien hiérarchique avec eux mais aussi contre le système qui peut exister en parallèle. L’action peut ainsi être dirigée contre l’auteur des faits incriminés ou directement contre l’employeur. L’action devant le conseil de prud’hommes vise à l’obtention de dommages et intérêts, mais une action pénale est également possible.
En se référant aux décisions rendues par la cour d’appel, un salarié victime de harcèlement moral peut ainsi obtenir un dédommagement généralement compris entre 8 000 euros et 45 000 euros.
En matière de preuve, l’article L1154-1 du Code du travail dispose que le salarié doit apporter « les éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement ».
Les séquences de l’émission étant filmées et ensuite sélectionnées pour être diffusées à la télévision, il est aisé d’envisager que les victimes puissent étayer leurs accusations.
Finalement, si les appels au boycott se multiplient, seule la justice est en mesure de faire jurisprudence pour contrer les effets d’un buzz trop lucratif. La justice du travail doit se montrer d’autant plus exemplaire que ces émissions sont diffusées à une heure de grande écoute. Les candidat·e·s de la télé-réalité sont des salariés comme les autres et méritent à ce titre la même attention.