Article 60 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017,
Article 2 de l’ordonnance n° 2017-1390 du 22 septembre 2017 relative au décalage d’un an de l’entrée en vigueur du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu,
Article 11 de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017.
L’objectif affiché consiste à supprimer le décalage, dans le temps, entre la perception et l’imposition du revenu [1] : cette concomitance évitant au contribuable de thésauriser pour payer son solde d’Impôt sur le Revenu (IR). Bien sûr, ce dessein est atteint pour le salarié célibataire, doté d’un emploi stable, sans autres revenus mais pour les autres… qu’en est-il ?
Au premier chef, les libéraux sont concernés par ce changement de rythme dont l’effet immédiat conduit à effacer la taxation des revenus courants de 2018 pour n’imposer, outre les revenus exceptionnels de 2018, que les revenus de 2019 l’an prochain. Ainsi, en 2019, qualifiée d’année de transition, le contribuable bénéficiera d’un Crédit d’Impôt de Modernisation du Recouvrement (CIMR) calculé par la DGFiP, annulant l’IR dû sur ses revenus courants de 2018 dite « année blanche » car exemptée partiellement d’IR [2].
La qualification du revenu courant échappant à l’IR grâce au CIMR varie selon la nature du revenu (salaires, BNC,…) sachant que, à l’exception des revenus fonciers, les revenus du patrimoine (dividendes, plus-values…) ne bénéficiant pas du CIMR demeurent imposés tant au titre de 2018 que de 2019.
Pour apprécier le caractère courant de son bénéfice (BNC) 2018 exonéré d’IR, le Libéral doit se livrer à une comparaison pluriannuelle. Son bénéfice 2018 est considéré comme courant s’il est inférieur à son bénéfice de 2015, 2016 ou 2017. Si son bénéfice 2018 est supérieur à celui de l’une des 3 années antérieures, son CIMR 2018 est plafonné au bénéfice le plus élevé de 2015, 2016 ou 2017.
Toutefois, un CIMR complémentaire peut être octroyé au libéral en 2020 : si son bénéfice 2019 est supérieur à celui de 2018, son CIMR complémentaire est ajusté en fonction de son bénéfice 2018 ; si son bénéfice 2019 est compris entre son bénéfice le plus élevé de l’une des années 2015, 2016 ou 2017 et son bénéfice 2018, son CIMR complémentaire est arrêté à hauteur de son bénéfice 2019.
En outre, même si son bénéfice 2018 est supérieur à ses bénéfices 2015, 2016, 2017 ou 2019, le Libéral peut bénéficier d’un CIMR complémentaire s’il prouve, par le biais d’une réclamation, que ce bénéfice accru n’est pas exceptionnel mais qu’il est généré uniquement grâce à un surcroît d’activité ponctuel en 2018.
Bref, pour profiter au mieux de « l’année blanche » 2018, le libéral doit donc être en mesure de distinguer son bénéfice courant exonéré et son bénéfice exceptionnel imposé par une confrontation de son bénéfice 2018 avec ses bénéfices 2015, 2016, 2017 et 2019 ou par une explication propre à une suractivité passagère en 2018.
Pour mémoire, les plus-values tant à court terme qu’à long terme sont, par nature, des bénéfices exceptionnels et une réduction sensible d’une cotisation « Retraite Madelin » en 2018 par rapport aux cotisations des années 2015, 2016, 2017 et 2019 pourrait être considérée comme un bénéfice exceptionnel.
A compter de 2019, le compte bancaire des libéraux sera prélevé, au choix, chaque mois ou chaque trimestre, d’une somme identique appelée « acompte contemporain » [3] :
de janvier à août calculée en fonction de la déclaration « 2042 » de 2017 ;
de septembre à décembre 2019, le prélèvement sera ajusté en fonction de la déclaration « 2042 » de 2018 déposée, comme d’habitude, au printemps 2019 et prenant donc en compte tant le CIMR 2018 annulant le bénéfice courant 2018 que les autres revenus éventuels 2018.
Ainsi, les libéraux, sauf dans l’hypothèse rarissime où le bénéfice serait constant, supporteront toujours entre septembre et décembre de l’année N une correction en fonction de l’année N-1.
La contemporanéité attachée au concept même du PAS échappe donc aux libéraux, c’est un sujet mais ce n’est pas le sujet !
En revanche, sans tarder, du fait du PAS, les Libéraux doivent se focaliser sur leur bénéfice courant 2018 à majorer dans le respect de la loi pour être exonéré d’IR.
Pour la première fois depuis sa création en 1914 par Joseph Caillaux et certainement pour la toute dernière fois, l’Impôt sur le Revenu ne sera pas levé en 2018.
Que l’année blanche offre, aux libéraux, un sourire aussi large que radieux.
Références
CGI, art. 156, 204 A, 204 C, 204 G, 204 H, 204 J, 204 K, 204 L, 1663
BOFIP, BOI-IR-PAS-20180515, BOI-IR-PAS-20-10-20-20-20180515, BOI-IR-PAS-20-20-20180515, BOI-IR-PAS-20-30-30-20180515, BOI-IR-PAS-30-20-10-20180515,BOI-IR-PAS-20-30-20-10-20180515, BOI-IR-PAS-20-30-20-20-20180515, BOI-IR-PAS-30-20-10-20180515
Discussions en cours :
Cher Maître,
Pensez-vous qu’il soit possible de contester la prise en compte d’une plus-value exonérée dans le revenu 2018.
Un BNC qui aurait pris sa retraite au 31.12.2018 en cédant sa patientèle a vu son CMIR limité du fait que la plus-value sur cession de patientèle a été rajouté à ses revenus courants. Cette plus value bénéficiant d’une exonération il est injuste qu’elle soit pris en compte puisque quelle que soit l’année elle aurait été exonérée.
Vous remerciant pour votre éclairage.
Bonjour,
Pour les BNC, la plus-value à court-terme rentre dans les revenus courants. La plus-value à long-terme, quant à elle, ne rentre pas dans les revenus courants : soit elle est imposée à la flat-tax, soit elle peut bénéficier d’un régime d’exonération.
Cordialement