Traditionnellement, et à la différence des actes réglementaires ou de portée collective qui ne nécessitent pas de notification, les actes individuels doivent être notifiés à la personne concernée, l’acte ayant force exécutoire à la date de réception de la lettre de notification. Parallèlement, la procédure supplémentaire pour les autorités locales est la nécessité de transmettre ces actes individuels au préfet [1]. La seule exception à la notification réside dans le fait qu’un acte individuel favorable au destinataire peut entrer en vigueur dès la signature de cet acte [2].
Concernant les communes, le maire a compétence pour édicter aussi bien des arrêtés réglementaires, que des arrêtés non réglementaires [3], ou décisions individuelles (comme les décisions statutaires à l’égard des agents de la collectivité, les décisions individuelles en matière d’urbanisme, un arrêté de mise en demeure de démolir un bâtiment, ou encore un arrêté propre à la police administrative) [4]. C’est d’ailleurs au sujet des arrêtés municipaux individuels que se pose la question de leur entrée en vigueur.
Différent de l’arrêté réglementaire, la décision individuelle suppose que l’individu concerné soit régulièrement au courant de la décision l’affectant, afin que l’acte ait force exécutoire, hors situation de décision individuelle favorable.
De la sorte, l’arrêté municipal à portée individuelle nécessite une publicité, même si son affichage est aujourd’hui facultatif. En revanche, à partir du moment où il y a publicité, et dans ce cas précis la notification, de nombreuses modalités sont offertes à l’autorité administrative pour faire connaître l’acte à l’intéressé.
L’intérêt de la connaissance de ces différents éléments ayant trait à la notification des arrêtés municipaux individuels, est de permettre ainsi à la collectivité quelles sont les possibilités offertes ainsi que les obligations afférentes aux décisions de portée individuelle, aussi bien à l’égard des agents de la fonction publique territoriale, que des administrés.
I/ Le principe d’une publicité de l’acte non réglementaire.
Un acte individuel nécessite une publicité afin qu’il entre en vigueur, l’acte n’entrant alors légalement en vigueur seulement à la date qu’il prévoit, que si sa publicité le permet effectivement à cet instant [5]. Si, en revanche, cette publicité n’est opérée régulièrement que postérieurement, admettre que l’acte est néanmoins entré en vigueur à la date qu’il détermine, revient à lui conférer un caractère rétroactif et à l’entacher d’illégalité.
L’acte de portée individuelle nécessite une publicité, qui a pour effet de faire courir le délai de recours contentieux. Ainsi, un tel acte qui ne ferait l’objet d’aucune publication pourrait être contestée sans condition, puisque ce délai n’aurait jamais commencé [6], ni expiré, sans pour autant devenir inopposable [7].
Aujourd’hui, il est d’ailleurs prévu au sein du Code de justice administrative que « les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision » [8]. Double condition nécessaire donc, de la notification des voies de recours, mais aussi du délai de recours échu pour une contestation potentielle. L’absence de telles mentions ayant ainsi pour conséquence juridique l’absence de délai de recours.
A partir du moment où la notification a eu lieu, le délai commence à courir [9], si tant est que la notification comprend bel et bien les voies et délais de recours [10].
II/ Un affichage facultatif.
Initialement, l’article L. 2131-1 du Code général des collectivités territoriales prévoyait que « les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu’il a été procédé à leur publication ou à leur notification aux intéressés ». L’obligation de publicité de l’acte municipal de portée individuelle était donc conditionnée à un critère alternatif, à savoir soit leur publication, soit leur notification.
Puis, avec la loi 2002-276 du 27 février 2002 [11], un nouveau critère alternatif est intervenu en matière de publicité de l’acte individuel, modifiant l’article L. 2131-1. Dès lors, « les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu’il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ».
Dans tous les cas, le maire ne se sent lié que par un point essentiel, la publicité de l’acte individuel, peu important que cette publicité ait eu lieu par l’un des trois moyens énoncés dans le Code, et que les délais et voies de recours soient aussi inscrits.
Un élément intéressant dans cet article L. 2131-1 réside dans le fait, qu’outre les différentes possibilités de publicité, la notification n’est pas subordonnée par l’affichage ou la publication, mais reste autonome, tant que cette notification a bien été effectuée.
Tout moyen tendant à la contestation de l’absence d’affichage ou de publication d’un arrêté municipal doit donc être rejeté, en tant que la notification n’est subordonnée à aucun autre moyen de publicité.
III/ Une notification aux multiples facettes.
Si la publicité de l’arrêté municipal peut avoir lieu par la voie de l’affichage ou de la publication, il ressort aussi que la notification est la troisième possibilité offerte par l’autorité communale. La seule obligation réside dans le premier alinéa de l’article L. 2131-1 CGCT selon lequel la notification doit être faite aux intéressés [12].
Cette même obligation se retrouve aujourd’hui à l’article L. 221-8 du Code des relations entre le public et l’administration, selon lequel « Sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires ou instituant d’autres formalités préalables, une décision individuelle expresse est opposable à la personne qui en fait l’objet au moment où elle est notifiée ». En toute logique, et sans forcément reproduire le texte fondant la décision, il est néanmoins important de préciser les éléments nécessaires à l’appréciation du contenu de la décision.
Est ensuite subordonné l’établissement d’un récépissé à la partie intéressée, sans obligation toutefois, puisqu’à défaut de cette modalité, la notification sera conservée dans les archives de la mairie [13].
Dès lors, de nombreuses possibilités sont offertes à l’autorité communale pour notifier la décision de portée individuelle.
Avant tout, cette notification peut être exécutée par lettre recommandée avec accusé réception, la lettre simple étant aussi reconnue comme procédé de notification, les circonstances justifiant la notification, comme par exemple, une lettre envoyée à l’intéressé lui indiquant que ses fonctions avaient pris fin [14].
Mais, si la notification peut être exécutée par lettre recommandée ou par huissier, « la notification la voie administrative présente les mêmes garanties que le procédé de la lettre recommandée » [15].
Ces garanties équivalentes en matière de notification peuvent encore s’observer avec la notification accomplie par les soins d’un agent de l’administration municipale [16].
Plus encore, le juge administratif a considéré qu’une information verbale valait notification. En l’espèce, le refus du maire de retirer son arrêté de révocation ne suivant pas l’avis du conseil de discipline valait notification et faisait ainsi courir le délai de recours contentieux [17].
Cependant, toute la difficulté de ce moyen de notification réside dans la mention des voies et délais de recours, et la charge de la preuve selon laquelle ces voies et délais ont bien été transmis à l’intéressé.
Finalement, peu importent les moyens de publicité (publication, affichage ou notification), tant que le destinataire a bien été informé de la décision, contenant l’entièreté, sinon l’ensemble des éléments de la décision, ainsi que les délais et voies de recours contentieux.
Ces éléments pratiques, surtout s’agissant des modalités de notification, permettent ainsi aux autorités locales d’éviter des contentieux éventuels.
Discussions en cours :
Bonjour,
Dans le cadre d’un logement qui a fait l’objet d’un arrêté préfectoral d’insalubrité et qui a connu un changement de propriétaire...
Est-ce qu’une commune peut opposer à un nouveau propriétaire, un acte préfectoral (de portée individuelle) d’insalubrité, lequel a été prononcé à un ancien propriétaire ?
merci de m envoyer ce jurisprudence CE, Sect., 19 décembre 1952, Mattéi, n°7133, rec. p. 594
Bonjour,
Tout d’abord merci pour l’effort fourni pour informer toute personne de volet important du droit français.
Néanmoins, je trouve que le sujet des voies de recours et leurs délais n’a pas été détaillé. J’aurai aimé trouver des citations d’articles qui les imposent à l’administration dans la notification des décisions. Est-ce qu’un document d’une décision ou un arrêté disciplinaire municipal ou autre ne portant la voie de recours et le délai rend la décision caduque.
Bonjour,
Je vous remercie pour cet apport d’informations sur la notification.
Néanmoins, pourriez-vous également apporter des précisions sur la notification d’une décision individuelle qui s’avère être erronée ?
Je m’explique.
Une instance paritaire a validé, à l’unanimité de ses membres, le reclassement d’un agent dans une nouvelle profession, dans un domaine technique X. Une décision a été établie sur le fondement du procès-verbal (mentionné dans les visas). Cependant, en y regardant de plus près, il s’avère que le domaine technique mentionné dans cette décision, domaine technique Y, n’est pas celui qui avait été validé dans le procès-verbal, c’est-à-dire le domaine technique X. Pourtant, cette décision a été notifiée à l’agent qui l’a signée sans jamais la contester (ce que je suppose, puisqu’il n’y a eu aucun recours dans les 2 mois suivant la notification).
Aujourd’hui, l’agent, persuadé d’être dans le domaine technique X (et non Y), fait valoir son droit à l’avancement au titre de son domaine technique X. Son insistance laisse supposer qu’il a signé la décision sans vérifier le libellé du domaine technique au moment de la notification.
Sachant, qu’en termes d’avancement, le domaine technique Y est bien plus défavorable que le domaine technique X, et que le procès-verbal, tout comme la décision, sont des écrits qui ont une valeur juridique, qu’en est-il pour l’agent ? l’administration doit-elle annuler la décision initiale puis en établir une nouvelle en conformité avec le procès-verbal ? ou alors, considérer que, parce que l’agent a signé la décision sans jamais exercer son droit de recours, la décision s’impose désormais en l’état à l’intéressé ?
Je vous remercie par avance de votre réponse.
Sonia F.