La nouvelle procédure d’opposition de marque à l’INPI créée par la loi PACTE s’applique à toutes les marques françaises et marques internationales visant la France déposées à compter du 11 décembre 2019.
Certains pièges de la procédure ancienne demeurent voir mon article précédent « Déposer sa marque à l’INPI ou à l’EUIPO, sept erreurs à ne pas commettre » mais il y en a de nouveaux.
1/ Création d’un délai supplémentaire d’un mois pour compléter l’opposition.
Lors d’une opposition de marque à l’INPI, l’opposant a deux mois à partir de la publication du dépôt de marque au Bulletin Officiel de la Propriété Industrielle (BOPI) pour faire opposition. Ce délai de deux mois est inchangé.
La nouvelle procédure d’opposition en vigueur permet de déposer l’exposé des moyens c’est-à-dire l’argumentation détaillée et les pièces l’accompagnant un mois après la date limite d’opposition. L’exposée des moyens est le cœur de l’opposition qui contient la comparaison détaillée des produits et services et la comparaison des signes au jour de l’opposition
L’objectif de ce délai supplémentaire semble être de permettre aux parties de trouver un règlement amiable dans ce délai d’un mois.
Ce délai d’un mois pour compléter l’opposition ne peut pas être rallongé ou suspendu.
Les suspensions ne peuvent intervenir qu’après que l’opposition ait été complétée.
2/ Possibilité d’obtenir trois suspensions conjointes de 4 mois.
Si les deux parties, l’opposante et la déposante, sont d’accord, elles peuvent demander une suspension conjointe de la procédure d’opposition de marque.
Cette suspension est d’une durée de 4 mois et peut être renouvelée deux fois, permettant ainsi de suspendre l’opposition avec l’accord des deux parties pendant une durée totale de 12 mois.
La suspension peut intervenir, une fois que l’opposition est formée et complétée, à tout moment jusqu’à ce qu’une décision de l’INPI soit rendue.
3/ La disparition du projet de décision.
L’INPI, après divers échanges entre les parties, rend une décision définitive sur laquelle l’INPI ne peut plus apporter de modifications.
Contrairement à la procédure antérieure où un projet de décision était rendu et soumis pour commentaire aux parties, la seule voie de recours contre une décision d’opposition de l’INPI est un recours devant la Cour d’Appel compétente.
On peut regretter cette disparition du projet de décision de l’INPI qui permettait le respect du contradictoire vis-à-vis de l’INPI et permettait également de rectifier des erreurs grossières sans avoir besoin d’avoir recours à la procédure plus lourde du recours devant la Cour d’Appel.
Il est à préciser qu’il ne s’agit pas d’un appel devant la Cour d’Appel, mais d’un recours en réformation.
4/ Les parties ont la possibilité de se répondre trois fois.
Dans l’ancienne procédure d’opposition de marque, l’INPI avait 6 mois pour rendre sa décision [1].
(1-a) L’opposant complète son opposition et (1-b) le déposant a alors deux mois pour répondre et éventuellement demander des preuves d’usage.
(2-a) L’opposant a un mois pour répliquer. (2-b) Le déposant peut répondre à nouveau et (3-a) l’opposant peut répondre une dernière fois et (3-b) le déposant à la parole en dernier.
Chaque partie peut soumettre trois jeux d’écriture si on compte l’acte d’opposition pour l’opposant, chaque délai étant d’un mois, sauf le premier délai du défendeur pour répondre à l’opposition qui est de deux mois.
La procédure d’opposition est ainsi rallongée et les parties peuvent échanger davantage.
On peut regretter qu’il ne soit pas possible d’indiquer à l’INPI qu’on ne souhaite pas répondre afin d’accélérer le traitement de la procédure. L’INPI attend forcément la fin de chaque délai pour passer à la phase suivante.
5/ Augmentation des coûts et possibilité d’utiliser plusieurs fondements.
Le montant de la taxe d’opposition est de 400 euros pour un seul fondement. Cela constitue une augmentation importante par rapport au montant de la taxe d’opposition.
Dans le passé, il était obligatoire de déposer autant d’oppositions qu’il y avait de marques antérieures, cela n’est pas plus le cas.
L’avantage de la nouvelle procédure d’opposition est qu’il est possible de fonder l’opposition sur plusieurs fondements.
Cependant, le premier fondement coûte 400 euros et chaque fondement supplémentaire coûte 150 euros.
Point d’attention : Chaque fondement donne lieu au paiement d’une redevance.
si une marque est invoquée sur le principe du risque de confusion, mais également en plus sur le principe à l’atteinte de marque de renommée, cela est comptabilisé comme étant deux fondements qui doivent faire l’objet de deux paiements distincts, soit 400 euros + 150 euros, soit 550 euros pour une marque qui serait invoquée à la fois sur le risque de confusion et sur le fondement de la renommée.
6/ La prise en compte de la renommée par l’INPI dans une procédure d’opposition.
Les marques de renommée bénéficient à présent des mêmes dispositions que devant le Tribunal Judiciaire.
Une marque de renommée peut être protégée contre l’utilisation d’un signe identique ou similaire pour des produits et services qui ne sont ni identiques ni similaires.
Auparavant, la renommée ne pouvait être invoquée que pour indiquer qu’elle accroissait le risque de confusion pour des produits et services qui devaient être au moins similaires.
Ce nouveau fondement augmente la protection des marques de renommée dans le cadre de la procédure d’opposition de l’INPI.
L’opposant doit démontrer l’existence d’une marque, la renommée de celle-ci et que le dépôt de marque opposée lui porte atteinte.
7/ Une appréciation plus précise des preuves d’usage par l’INPI.
Dans le passé, l’INPI avait une évaluation des preuves d’usage qui était sommaire car la mission définie par le Code de la propriété intellectuelle était limitée. Depuis la réforme de la procédure, l’INPI examine en détail l’usage des marques antérieures pour lesquelles il est demandé des preuves d’usage. Le standard de preuve est le même que devant l’Office des Marques de l’Union Européenne ou un Tribunal français.
Certains éléments ne changent pas comme l’absence de condamnation de l’INPI à verser des frais de procédure ou des dommages et intérêts et l’impossibilité absolue d’étendre unilatéralement les délais fixés par l’INPI.
La procédure d’opposition à l’INPI reste relativement rapide avec une durée maximum inférieure à une année et peu coûteuse.
En effet, chacune des parties peut décider à tout moment de cesser de répondre à l’autre partie, ce qui met fin à la période d’échanges entre les parties et déclenche le délai de trois mois dans au bout duquel l’INPI doit rendre une décision.
Pour aller plus loin
L’existence d’une procédure d’opposition pose la question des droits antérieurs et rappelle la nécessité de faire une recherche d’antériorité avant de déposer une marque [2].
Avant d’obtenir un enregistrement de marques de nombreux écueils sont à surmonter. Voir mon article sur les conseils pour déposer sa marque.
En résumé.
L’INPI se voit confier des litiges plus complexes et tend à se substituer aux Tribunaux. La procédure d’opposition de marque devant l’INPI est plus longue et plus complexe. On ne peut faire l’économie d’une action vigoureuse et complète durant la procédure devant l’INPI car le recours contre les décisions d’opposition est un recours en annulation ne permettant pas la communication de nouvelles pièces.