Mon voisin empiète sur ma propriété : que faire ? Par Nicolas Lourenceau, Avocat.

Mon voisin empiète sur ma propriété : que faire ?

Par Nicolas Lourenceau, Avocat.

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Ce que vous allez lire ici :

Le droit à la propriété est un droit fondamental. En cas d'empiètement, il est crucial de déterminer les limites précises en contactant un géomètre-expert. Ensuite, privilégiez une solution amiable. Si cela échoue, une action en justice peut être engagée. Les juges veillent au respect des droits de propriété, sanctionnant les empiétements.
Description rédigée par l'IA du Village

Votre voisin a construit un mur ou planté une haie qui dépasse les limites de sa propriété et empiète sur la vôtre : que faire ?
1. Bornage
2. Accord amiable
3. Action en justice.

-

La propriété est un droit « inviolable et sacré » selon l’article 17 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen de 1789.

Si votre voisin construit un mur ou plante un arbre en dépassant les limites de sa propriété, il empiète sur la vôtre, et porte par conséquent atteinte à votre droit de propriété.

Or l’article 545 du Code civil dispose que

« Nul ne peut être contraint de céder sa propriété (…) ».

Comment faire respecter votre droit de propriété ?

Première étape : déterminer précisément les limites de vos deux propriétés.

Votre voisin prétend avoir suivi le relevé cadastral lors de l’édification de son mur ?

Ce relevé n’a qu’une valeur informative : seul compte le bornage.

Pour déterminer précisément les limites d’une propriété, une seule solution : contacter un géomètre-expert afin d’effectuer le bornage et de dresser un procès-verbal d’abornement. Votre voisin ne peut s’y opposer, c’est un droit [1].

Si votre voisin refuse tout de même d’assister au bornage, le géomètre dressera un procès-verbal de carence, et vous devrez exercer un recours auprès du tribunal judiciaire du lieu de situation de votre terrain, afin d’effectuer un bornage judiciaire.

Mais attention, vous devez tenter de régler amiablement le litige (médiation ou conciliation) avant d’intenter une action judiciaire.

À la suite de ce bornage, vous pourrez effectivement caractériser l’empiètement avec précision. Cela vous permettra d’entrer en négociation avec toutes les cartes en main.

Deuxième étape : tenter une solution amiable.

Deux choix amiables s’offrent à vous :

  • demander à l’auteur de l’empiètement de retirer son mur/haie/arbre ; ou
  • lui vendre une bande de terrain correspondant à son empiètement (par acte notarié).

Si votre voisin est d’accord pour l’une ou l’autre solution, votre différend est résolu.

Sinon, vous devrez intenter une action en justice afin de faire respecter votre droit de propriété.

Troisième étape : agir en justice.

Le propriétaire victime d’empiètement peut intenter une action en justice afin de faire cesser l’atteinte à son droit de propriété.

1. L’usucapion.

Si l’action en justice afin de faire cesser l’empiètement est certes imprescriptible, l’auteur de l’empiètement pourra tout de même tenter d’invoquer la prescription acquisitive (aussi appelée « usucapion ») dans le but de revendiquer la propriété de la surface litigieuse.

La prescription acquisitive est un mécanisme d’accession à la propriété par la possession [2]. La possession doit être :

  • continue et non-interrompue,
  • paisible (exempte de violences matérielles ou morales),
  • publique (pas de dissimulation),
  • non-équivoque et à titre de propriétaire (se comporter comme le propriétaire).

La possession doit durer pendant au moins 30 ans (ou 10 ans si le possesseur est de bonne foi et dispose d’un juste titre), raison pour laquelle l’usucapion est aussi appelé « prescription trentenaire ».

Notons ici que l’auteur de l’empiètement ayant empiété intentionnellement sur votre fonds, donc de mauvaise foi, peut tout de même revendiquer la prescription trentenaire [3].

Le propriétaire victime de l’empiètement pourra contester cette prescription en prouvant que toutes ces conditions ne sont pas réunies.

2. L’empiètement.

Une fois cette question écartée, le juge pourra caractériser ou non l’empiètement, en se fondant sur le procès-verbal de bornage (obtenu à la première étape).

Les juges sont rigoureux quant au respect du droit de propriété et caractérisent volontiers l’empiètement même s’il est :

  • involontaire (dû à une erreur du voisin, qui est donc de bonne foi) [4] ou
  • minime [5].

3. La sanction.

Après avoir caractérisé l’empiètement, les juges choisiront la sanction appropriée. En théorie, la seule sanction est la démolition de l’ouvrage litigieux [6].

De la même manière, s’il s’agit d’un arbre ou d’une haie, la sanction est la découpe : « Celui sur la propriété duquel avancent les branches des arbres, arbustes et arbrisseaux du voisin peut contraindre celui-ci à les couper » [7].

Certains juges prennent parfois en compte l’ampleur de la démolition afin de rechercher une sanction proportionnée :

  • raboter le mur si cela suffit [8] ;
  • ne pas ordonner la démolition d’un bâtiment entier s’il existe une autre solution technique supprimant l’empiètement [9].

Cependant la jurisprudence récente semble exclure tout contrôle de proportionnalité. Dans une espèce où la démolition pouvait entraîner une atteinte à la solidité du bâtiment, la Cour de cassation a tout de même rejeté le contrôle de proportionnalité de la sanction et fermement rappelé le droit pour le propriétaire d’obtenir la démolition d’un ouvrage empiétant sur son fonds [10] - qu’elles qu’en soient, donc, les conséquences.

En conclusion, faire respecter son droit de propriété lorsqu’un voisin empiète sur votre propriété (ou, inversement, régulariser sa situation si l’on est l’auteur de l’empiètement) est une procédure qui peut sembler relativement simple, mais de nombreux écueils sont à éviter...

Nicolas Lourenceau
Avocat à la Cour
Barreau de Paris
Droit immobilier
www.nlavocat.fr

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Notes de l'article:

[1Article 646 du Code civil.

[2Article 2261 du Code civil.

[3Article 2258 du Code civil.

[4Civ. 3e, 21 nov. 1969.

[5Civ. 3e, 10 nov. 2016, n°15-19.561 P.

[6Civ. 3e, 23 nov. 2022, n° 22-19.200.

[7Article 673 du Code civil.

[8Civ. 3e, 10 nov. 2016, n° 15-25.113.

[9Civ.3e, 26 nov. 1975, n°74-12.036 P.

[10Civ. 3e 21 sept. 2023 n°22-15.340.

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