Alain Baudin pour Actus des Barreaux : Depuis la mi-octobre, le Barreau de Paris et Lefebvre Dalloz offrent un accès gratuit à l’IA à plus de 10 000 avocats qui exercent dans de petites structures. Pourquoi cette initiative d’ampleur était-elle prioritaire pour vous ?
Pierre Hoffman : Le Barreau de Paris, ce sont 34000 avocats. Les tailles des cabinets sont différentes et les plus grands sont en capacité de financer leur IA « maison » avec des moyens que d’autres, plus modestes, n’ont pas. L’idée était de permettre à ces cabinets qui ne comptent qu’un ou deux avocats d’accéder à une solution de haute qualité, fiable et sécurisée. L’une des principales priorités de mon mandat était donc de pouvoir investir afin qu’ils puissent, pendant quinze mois, bénéficier gratuitement de GenIA-L, la nouvelle IA générative développée par Lefebvre Dalloz.
ADB : À quelle hauteur le Barreau de Paris a-t-il prévu d’investir ?
Pierre Hoffman : Nous engageons un million d’euros qui seront débloqués au fur et à mesure des demandes. L’objectif est également d’amener les nouveaux utilisateurs à se familiariser avec l’outil afin qu’ils puissent développer leur gamme d’activités, remporter de nouveaux dossiers auxquels ils n’auraient peut-être pas pu accéder. L’IA est un formidable levier de croissance qui permet notamment d’optimiser le temps de travail, tout en se libérant du temps sur leurs recherches et d’analyse qui représentent environ 40 % de leur temps. C’était au départ l’idée de notre partenariat avec Mme Ketty De Falco, présidente des activités de Lefebvre Dalloz, et nous y avons travaillé pendant des mois. C’est une véritable œuvre collective et tous en sommes fiers !
- Ketty de Falco et Pierre Hoffman devant le Palais de Justice de Paris.
ADB : Quelles sont les particularités de la solution GenIA-L ?
Ketty de Falco : L’outil qu’a développé Lefebvre Dalloz se fonde exclusivement sur les bases de données juridiques des trois maisons d’éditions qui composent le groupe : les Éditions législatives, les Éditions Francis Lefebvre et les Éditions Dalloz qui disposent d’une richesse de contenus dans un environnement sécurisé. 270 rédacteurs et plus de 4000 auteurs les mettent régulièrement à jour et les enrichissent continuellement afin qu’ils soient extrêmement fiables et de la meilleure qualité.
ADB : De quelles fonctionnalités GenIA-L dispose-t-elle ?
Ketty de Falco : La solution propose différentes fonctionnalités et elle fournit instantanément des réponses instantanées, synthétiques, pertinentes, fiables et correctement sourcées, à toutes les questions juridiques qui lui sont soumises en langage naturel. Elle permet également aux utilisateurs de consulter les extraits de nos fonds éditoriaux à la source de cette réponse. L’outil – et c’est là l’un de ses grands intérêts – accompagne également les avocats dans leurs recherches. Son rôle n’est pas de les remplacer, mais de les aider à les approfondir et à se poser les bonnes questions. Pour les inciter à aller plus loin, GenIA-L leur suggère en outre une série de questions complémentaires associées à leurs requêtes initiales tandis que des points de vigilance leur sont également exposés. Le gain de temps réside surtout dans la rapidité de la recherche d’informations dans la mesure où l’outil ne prend que onze secondes pour explorer nos fonds documentaires.
ADB : Votre initiative conjointe n’est-elle pas la toute première étape de la révolution de l’IA au Barreau de Paris ?
Pierre Hoffman : Nous sommes le premier barreau à proposer un tel dispositif. Nous ouvrons une nouvelle page de l’histoire. C’est le premier acte. Aborder le sujet lors de colloques, c’est bien et évidemment nécessaire, mais ce n’est pas suffisant. Il arrive un moment où il faut agir, se jeter à l’eau, utiliser l’outil et progresser. L’intérêt de l’offre de Lefebvre Dalloz réside dans son accompagnement tout au long d’un parcours de formations où l’on va pouvoir se servir de l’outil, s’améliorer et progresser. Notre apport financier est significatif. C’est un investissement permettant aux avocats de développer le réflexe IA, de s’emparer de l’outil, de l’apprivoiser et de se perfectionner. J’ai la conviction que l’accompagnement du barreau de Paris se poursuivra dans les prochaines années, d’une manière ou d’une autre. C’est un sujet trop important pour laisser les avocats face à cette transformation majeure de notre métier.
ADB : Y aura-t-il des formations proposées ?
Ketty de Falco : Nous avons très à cœur de ne pas uniquement donner des codes d’accès aux avocats parce que, de par notre expérience de précurseur de l’IA générative sur le marché français, nous avons pleinement conscience qu’elle entraîne un changement d’habitude de travail. S’y exercer nécessite d’être accompagné, notamment dans la connaissance de l’outil et dans son utilisation pertinente à l’appui de cas d’usage. Dans le cadre de notre accord avec le Barreau de Paris, nous avons, de manière spécifique, mis en place trois sessions de formation de trente minutes dans un format webinaire, disponibles en replay. La première présente la prise en main de la solution GenIA-L avec l’ensemble de ses fonctionnalités. La deuxième aborde l’implémentation concrète de l’intelligence artificielle au sein d’un cabinet d’avocat. La troisième, enfin, permet de maîtriser les concepts fondamentaux de l’IA et ses applications chez les avocats.
La Rédac’ du Village de la justice prolonge l’info...
Deux questions importantes peuvent se poser aux utilisateurs.
Nous les avons posées à Lefebvre Dalloz :Cette IA, GenIA-L, va-t-elle s’entrainer sur les données des avocats, et donc d’une certaine façon, profiter d’eux ?
"Pas du tout. GenIA-L est exclusivement entraînée sur la base documentaire de Lefebvre Dalloz, l’une des plus significatives en Europe et dans le monde.
Avant son déploiement sur le marché, nos équipes se sont consacrées à l’entraînement de GenIA-L afin d’optimiser la qualité des réponses au regard des usages spécifiques des professionnels du droit et du chiffre.
Notre base de données juridiques est actualisée en permanence par nos rédacteurs et nos auteurs, qui sont autant de professionnels hautement qualifiés dans les matières du droit et du chiffre."Quid de la confidentialité des informations que saisiront les avocats ?
"Lefebvre Dalloz garantit à tous les utilisateurs de GenIA-L que les questions posées ne sont pas utilisées pour l’entraînement d’IA quelles qu’elles soient.
Par ailleurs, notre ingénierie garantit un anonymat des questions posées en les décorrélant des données identifiantes de l’utilisateur."