La réforme de la réglementation des lotissements résultant de la Loi ALUR.

Par Laurent Latapie, Avocat.

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Explorer : # réforme de l'urbanisme # densification des lotissements # cahier des charges # loi alur

La réforme de la Loi ALUR impacte en profondeur les règles d’urbanisme dans les lotissements. Ainsi, et nonobstant le cahier des charges ou le règlement de lotissement pouvant exister, force est de constater que le coloti qui le souhaite peut désormais passer outre ces textes pour envisager toute modification construction ou extension de son bien.

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Il convient de s’intéresser à la question de la réglementation des lotissements suite à la récente réforme issue de la Loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et à l’urbanisme rénové, la fameuse « Loi Alur »,

En effet, la loi ALUR a notamment revisité le code de l’urbanisme afin de favoriser la densification des lotissements dans l’ensemble des communes, même au cœur de quartiers initialement résidentiels et initialement exclusivement composés de maisons individuelles et de villas.

L’objectif, clairement avoué de la loi, est de densifier les gisements fonciers en ne restreignant plus les droits à construire dans les lotissements.

Ainsi l’article L442-9 du code de l’urbanisme prévoit que les règles d’urbanisme contenues dans les documents du lotissement deviennent caduques au terme de 10 années à compter de la délivrance du permis d’aménager si à cette date le lotissement est couvert par un PLU ou un document d’urbanisme en tenant lieu.

Avant toute chose, il convient de rappeler quels sont les documents du lotissement, puisque se distinguent en leur sein le cahier des charges du règlement de lotissement proprement dit,

Le cahier des charges renseigne sur les droits et les obligations des colotis (c’est-à-dire des propriétaires).

C’est un document de droit purement privé, établi de manière contractuelle. Il n’est pas obligatoire. Il permet de fixer les règles internes du lotissement en ce qui concerne l’implantation des maisons, l’interdiction de construire sur certaines parties du lot, la destination des constructions, les règles précises d’urbanisme concernant éventuellement les clôtures et les plantations, etc. Fixer les droits et les obligations des colotis et régir la vie collective en lotissement : voici les deux rôles principaux du cahier des charges !

Le règlement de lotissement impose quant à lui des règles d’urbanisme, notamment sur le plan architectural, que doivent respecter les futures constructions : emploi d’un certain type de matériaux, implantation des bâtiments, l’aspect extérieur des constructions ou des clôtures… etc.

Ces règles peuvent être beaucoup plus strictes que celles prévues par le PLU applicable sur la commune.

Toutefois, et réforme faisant, la loi ALUR a supprimé la possibilité pour les colotis de demander le maintien des règles issues des documents du lotissement à l’issue de délai précité de 10 années à compter de la délivrance du permis d’aménager.

L’article L 442-10 du code de l’urbanisme prévoit que les documents du lotissement peuvent être modifiés par l’autorité compétente, après accord de la majorité qualifiée des colotis.

Il en va de même des subdivisions des lots, en vertu de l’article L 442-12 du code de l’urbanisme.

Cet article assimile en effet les subdivisions de lots à des modifications des règles du lotissement.

La loi ALUR précise que la procédure de modification des lotissements s’applique aux stipulations de nature réglementaire des cahiers des charges non approuvés…

Mais qu’entend-on par “stipulations de nature réglementaire des cahiers des charges non approuvés” ? :

Initialement et historiquement, le cahier des charges de lotissement peut avoir une valeur réglementaire qui résulte de son approbation par le Préfet. Cependant, depuis le 1er janvier 1978, date d’entrée en vigueur du décret n° 77-860 du 26 juillet 1977, le cahier des charges n’est plus approuvé par le Préfet, les dispositions réglementaires en question sont désormais insérées au sein du règlement du lotissement.

Autrement dit, seuls les cahiers des charges antérieurs à 1978 peuvent encore être dotés d’une valeur réglementaire et être opposé à celui qui veut édifier ou procéder à l’extension d’un édifice en respectant les dispositions du PLU, mais sans respecter le cahier des charges du lotissement.

La loi ALUR, du 24 mars 2014, met fin à la force juridique et à l’opposabilité du cahier des charges, celles-ci étant désormais caduques.

L’application de la règle de caducité aux stipulations de nature réglementaire des cahiers des charges non approuvés est immédiate.

Il en va de même, s’agissant du droit au maintien des règles à l’issue du délai de 10 ans à compter de la délivrance du permis d’aménager.

Ainsi, concernant les lotissements anciens, pour lesquels les colotis avaient exercés ce droit au maintien avant l’entrée en vigueur de la loi ALUR, les règles propres au lotissement en question ne sont plus applicables depuis le 27 mars 2014.

L’application de la procédure de modification des documents du lotissement aux stipulations de nature réglementaire des cahiers des charges non approuvés s’applique depuis le 27 mars 2014.

La réduction de la majorité qualifiée des colotis requise pour la modification des documents de lotissement et la subdivision de lot est également d’application immédiate.

L’application de la procédure de mise en concordance des documents du lotissement avec les dispositions du document d’urbanisme, aux stipulation des cahiers des charges non approuvés, s’applique depuis le 27 mars 2014.

Les stipulations non réglementaires des cahiers des charges de lotissement non approuvés ayant pour objet ou pour effet d’interdire ou de restreindre le droit de construire ou encore d’affecter l’usage ou la destination d’un immeuble continuent aujourd’hui à produire leurs effets,

Cependant, elles deviendront aussi caduques à compter du 26 mars 2019 comme le prévoit les textes, sauf à ce que les colotis maintiennent ces stipulations en publiant le cahier des charges du lotissement au bureau des hypothèques ou au livre foncier avant cette date.

Ainsi, cette réforme dite de la Loi ALLUR qui touche de nombreux domaines impacte considérablement les droits des lotissements et permet aux colotis qui le souhaitent de procéder à des modifications, constructions, extensions ou changements qu’ils souhaitent sans pouvoir se voir opposer la force du cahier des charges ou du règlement de lotissement, avec les conséquences en terme de relations de voisinage que cela peut comporter...

Laurent Latapie,
Avocat à Fréjus et Saint-Raphaël, Docteur en Droit,
Barreau de Draguignan
www.laurent-latapie-avocat.fr

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Discussions en cours :

  • par Josephe Alain amour , Le 21 novembre 2017 à 12:22

    Bonjour,

    Je suis propriétaire d’une maison d’un lotissement de 1960. Le cahier de charge précise (que les acquéreurs ne pourront édifier sur leur lot qu’une construction ne comportant qu’un seul logement à usage d’habitation).

    La demande de logement est très forte dans notre zone et notre commune est devenue bien plus importante depuis 1960. J’ai eu le permis de construction de faire un bâtiment jumelé avec ma maison sur mon terrain ce que j’ai fait et je l’ai divisé en 8 studios loués depuis la fin de la construction.

    Mais on m’a dit que les colotis peuvent m’obliger à vider les studios de ses locataires.

    Alors ma question (Est-ce vrai surtout après l’apparition de cette loi 24 mars 2014) ?

  • par Florent , Le 10 août 2017 à 00:15

    Bonjour,

    Est il possible de faire plusieurs logement sur un même lot en lotissement, sans diviser la parcelle (pour du locatif)
    - permis de lotir de 2012

  • par SEVERYNS- Jean Philippe , Le 5 août 2017 à 18:36

    Nous sommes à Vence (06) dans un lotissement "résidentiel’ d’une soixantaine de lots mais nombre de promoteurs tentent de réaliser des immeubles collectifs jusqu’ici sans grand succès mais la métropole nicoise veut s’emparer du sujet pour faire un maximum de logements sociaux ; nous avons un nouveau maire ... pour l’instant on ne connait pas son avis sur le sujet.
    Je pense que nous allons mobiliser tous les co-lotis sans précipitation car le sujet est complexe juridiquement
    bien cordialement
    jean philippe SEVERYNS
    jphseveryns chez orange.fr

  • Dernière réponse : 28 juin 2017 à 15:03
    par Lenormand , Le 3 février 2017 à 22:02

    BonjoUr, je fait actuellement construire une maison individuelle . Il a tt d abord fallut demander une autorisation de lottir car l endroit contient 3 parcelles constructible appartenant à mon beau père... Au moment de la demande de permis de construire le PLU de la commune autorisait une emprise au sol de 15% , qui est depuis passé à 20%. Je suis Aux maximum de l emprise au sol à 15%, mais j aimerai faire une terrasse en bois sur pilotis entre 30 et 40 m2. Le fait que l emprise au sol soit passé a 20% change t il quelque chose pour moi ? Suis je autorisé à effectuer cette extension ? En sachant que sur ces 3 parcelles il n y a aucune autre construction a part notre maison, mais étant considéré comme un lotissement change t il quelque chose ?
    Cordialement

    • par laurent latapie , Le 4 février 2017 à 21:10

      cher monsieur,
      je vous invite à m’adresser un mail avec les explicatifs à mon adresse électronique :
      latapie.avocat chez hotmail.fr
      bien cordialement,
      laurent Latapie Avocat

    • par Souleiman , Le 1er avril 2017 à 00:40

      Bonjour
      Nous avons déposé un permis d’aménager pour la création d’un lotissement de 4 lots afin d’en vendre 3 et de garder le 4eme pour faire notre maison.Pa accorde en sept.2015,travaux de viabilisation effectués en 2016, déclaration d’achèvement des travaux et certificat de conformité délivré nous revenons finalement sur notre choix et décidons de garder un lot de plus pour y construire 2 maisons de locations or nous avons lors du PA effectue un reglement de lotissement( qui si j’ai bien compris devrait s’appeler cahier des charges) où nous stipulons des règles notamment sur la nature des clôtures,pas de maisons à étages etc. ..et une seule maison d’habitation par lot.Mais voilà,lors du dépot de permis de construire pour ce lot comprenant ces 2 maisons de locations celui ci nous ai refusé par rapport à cette ligne dans le reglement.A ce jour on nous demande donc de ré deposer un permis d’aménager complet pour changer cet alinéa du reglement ce qui me paraît complètement aberrant.
      Qu’en pensez-vous ?Que faire ?
      je vous remercie
      cordialement Sylvie souleiman

    • par Jean-Michel Leymarie , Le 28 juin 2017 à 15:03

      Bonjour,
      J’habite dans un lotissement où les lots sont séparés par des "espaces verts" que chaque riverain entretient. Je suis en instance de divorce et mon ex-épouse garde la maison car propriétaire du terrain. Maison et piscine sont en commun mais ma piscine dépasse de 2 mètres dans "l’espace vert" et pourrait ne pas être prise en compte dans l’évaluation globale des biens.
      Le lotissement a été créé en 1976. Pas de syndic donc la commune est sensée en reprendre l’autorité mais dans le PLUI de 2012 il est précisé que c’est le règlement initial qui s’applique...!
      La possibilité d’acquérir un lopin de terrain englobant le dépassement réglerait le problème.
      Qu’est-il possible de faire ?
      Merci par avance. Cordialement.

  • Bonjour, nous avons fait construire notre maison en 2008, aujourd’hui nous devons construire un abris pour pouvoir mettre une pompe de piscine . Sur la demande nous avons dit que cet abris serait en bois Avec un toit plat. Aujourd’hui cette demande à ete refusé car cela ne rentre pas dans le règlement de lotissement. Ok mais le règlement date de décembre 2006 et nius n avons pas été informé d un nouveau. Déjà nius n avions pas eu l ancien je viens d aller le chercher en mairie suite au refus ! Il date bien de 2006 . Suis je ne droit de refuser de faire les modifications ?
    Bonne journee
    soohie Dury

    • par latapie , Le 16 juin 2017 à 10:04

      cher monsieur,
      je vous invite à m’adresser un mail avec les explicatifs à mon adresse électronique :
      latapie.avocat chez hotmail.fr
      bien cordialement,
      laurent Latapie Avocat

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