La liquidation amiable est le processus par lequel les associés d’une société décident d’y mettre volontairement fin avant le terme initialement prévu, il n’est pas nécessaire qu’elle soit en état de cessation de paiement. Elle peut être mise en œuvre pour échapper à ses responsabilités pénales.
La liquidation amiable d’une société est une procédure complexe qui implique des responsabilités juridiques spécifiques pour le liquidateur désigné. Celui-ci est chargé de gérer la dissolution de la société, notamment par la réalisation des actifs et l’apurement du passif. Cependant, cette mission peut donner lieu à des situations où sa responsabilité, qu’elle soit civile ou pénale, est engagée. Cet article explore les contours de cette responsabilité en mettant en lumière son cadre juridique ainsi que les risques encourus en cas de faute ou d’omission.
Cette liquidation amiable est très souvent conduite par l’un des dirigeants de la société.
I. Cadre juridique de la liquidation amiable et responsabilités générales du liquidateur.
Il est nécessaire pour établir la responsabilité du liquidateur amiable d’en définir préalablement son rôle.
1.1. Définition et rôle du liquidateur amiable.
Le liquidateur désigné par les associés a pour mission de réaliser l’actif, d’apurer le passif et de distribuer les fonds restants. Cette fonction est exercée sous le respect des obligations légales et statutaires sans supervision judiciaire, contrairement à la liquidation judiciaire. Un ou plusieurs liquidateurs sont désignés par les associés si la dissolution résulte du terme statutaire ou si elle est décidée par les associés.
La réalisation d’un actif consiste à convertir les actifs de l’entreprise en liquidités pour rembourser les créanciers. Il s’agit de procéder à leur identification et leur évaluation, à leur classification, puis à leur vente directe. L’apurement du passif est réalisé par l’établissement d’un inventaire et l’évaluation des dettes, suivi de l’analyse des capacités de remboursement dans le but de négocier avec les créanciers et de mettre en place d’un plan de remboursement et d’assurer le suivi de son exécution.
A l’issue des opérations de réalisation des actifs et du règlement des dettes, les fonds disponibles sont distribués entre les associés au prorata du niveau de détention des parts ou actions.
Contrairement à une liquidation judiciaire, il n’agit pas sous le contrôle d’un juge commissaire, mais il reste soumis aux obligations légales et statutaires.
1.2. Responsabilité pénale du liquidateur amiable.
Le liquidateur peut être tenu responsable pour des fautes liées à la gestion, telles que des infractions fiscales ou des abus de biens sociaux. Cette responsabilité s’étend sur une période définie après la radiation de la société du registre du commerce.
L’article L237-12 du Code de commerce prévoit que le liquidateur est responsable pendant trois ans après la radiation de la société du registre du commerce et des sociétés pour les fautes commises dans le cadre de sa mission.
La question qui se pose est celle de savoir si une contravention de 5ᵉ classe commise par une société et jugée après la mise en liquidation amiable de cette structure peut juridiquement faire l’objet d’une sanction pénale ?
Une contravention de 5ᵉ classe devient exécutoire après un jugement devenu définitif. Le prévenu a la possibilité de faire appel dans un délai de 10 jours. Cependant, une contravention de 5ᵉ classe est valide dès sa constatation par un officier ou agent de police judiciaire, elle n’exige pas l’existence d’un élément intentionnel, elle réprime une soustraction à une obligation réglementaire.
La contravention de 5ᵉ classe peut être constatée avant que la société soit placée en liquidation amiable, puis jugée après l’ouverture de celle-ci, son montant restant dû.
II. Cas spécifiques de mise en cause de la responsabilité du dirigeant liquidateur.
La société engage sa responsabilité pénale, non seulement avant l’ouverture de la liquidation amiable, mais également postérieurement à celle-ci pour les infractions commises préalablement.
2.1. Responsabilité pour infractions antérieures à la liquidation amiable.
Les infractions commises par la société avant sa mise en liquidation continuent d’engager sa responsabilité pénale tant que la société n’est pas dissoute. Le liquidateur peut cependant être impliqué s’il contribue sciemment à dissimuler ces infractions commises avant l’ouverture de la liquidation amiable. Une fois la liquidation clôturée, la société étant dissoute, la responsabilité pénale ne peut plus être exercée en raison de l’extinction de la personnalité morale. La société prend fin par la dissolution anticipée décidée par les associés.
La responsabilité pénale de la société, en tant que personne morale subsiste pour les infractions commises avant la liquidation, même si celle-ci est prononcée après.
En liquidation amiable, le liquidateur n’assume pas automatiquement la responsabilité des infractions pénales commises par la société avant sa nomination. Toutefois, si le liquidateur a connaissance de l’infraction et omet volontairement d’agir ou contribue à dissimuler les faits, il peut être tenu responsable pénalement. C’est notamment le cas, lorsqu’une infraction pénale est commise avant l’ouverture d’une liquidation amiable, le liquidateur ne pouvant s’exonérer de sa responsabilité en raison de ses missions d’inventorier les actifs et de procéder à l’apurement des dettes de son existence.
2.2. Responsabilité pour insuffisance d’actif et organisation frauduleuse d’insolvabilité.
Dans certains cas, la responsabilité du liquidateur peut être engagée pour faute de gestion aggravant le passif ou en cas d’organisation frauduleuse visant à soustraire des actifs aux créanciers.
La Cour de cassation a jugé
« que la liquidation amiable d’une société impose l’apurement intégral du passif, les créances litigieuses devant, jusqu’au terme des procédures en cours, être garanties par une provision ; qu’en l’absence d’actif social suffisant pour répondre du montant des condamnations éventuellement prononcées à l’encontre de la société, il appartient au liquidateur de différer la clôture de la liquidation et de solliciter, le cas échéant, l’ouverture d’une procédure collective à l’égard de la société ».
La responsabilité d’un dirigeant-liquidateur pour insuffisance d’actif en cas de faute de gestion ayant contribué à aggraver le passif de la société peut donc être recherchée. Il pourrait être poursuivi en comblement du passif. Lorsque la liquidation d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. Dans le cadre d’une liquidation amiable, si le liquidateur, par sa négligence ou ses décisions, a empêché l’apurement du passif ou aggravé la situation de la société, sa responsabilité pourrait être engagée.
Une infraction pénale commise avant la liquidation entraîne des conséquences financières, par exemple, amendes ou dommages-intérêts, le liquidateur qui n’a pas pris les mesures nécessaires pour y faire face, pourrait se voir reprocher une faute de gestion. Dans ce cas, sa responsabilité en comblement de passif reste envisageable.
Par ailleurs, le dirigeant liquidateur qui a sciemment dissimulé l’existence d’une infraction pénale préalable pour éviter de s’acquitter du montant de l’amende après l’ouverture de la liquidation amiable commet une organisation d’insolvabilité.
L’organisation frauduleuse d’insolvabilité consiste à dissimuler tout ou partie de l’actif de la société pour éviter le paiement de ses dettes. En effet, l’organisation d’insolvabilité est le fait, pour une personne morale d’organiser ou d’aggraver son insolvabilité afin de se soustraire aux obligations pécuniaires résultant d’une condamnation prononcée en matière pénale, délictuelle ou quasi délictuelle. Ce délit est puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
Si le liquidateur, dans le cadre de la liquidation amiable, organise ou contribue à dissimuler des actifs pour empêcher le règlement des créanciers, il pourrait être poursuivi pénalement pour organisation frauduleuse d’insolvabilité.
La responsabilité du liquidateur amiable repose sur un équilibre délicat entre ses obligations de gestion et les éventuelles conséquences juridiques de ses décisions. Pour minimiser les risques, il est essentiel qu’il agisse avec diligence et transparence, en veillant à l’apurement complet du passif et à la conformité avec les dispositions légales.