Cette protection juridique se manifeste à travers plusieurs axes : la lutte contre l’exercice illégal de la profession de pharmacien (I), l’interdiction de la vente de médicaments sans ordonnance (II), la prescription des médicaments (III) et la juridiction compétente (IV).
I- L’exercice illégal de la profession de pharmacien.
Chaque pharmacien exerçant sur le territoire guinéen est tenu de se conformer aux exigences de l’article 75 de la loi de 2018 relative aux médicaments, aux produits de santé et à l’exercice de la profession pharmaceutique. Cet article dispose que, « Nul ne peut exercer la profession de pharmacien en République de Guinée, s’il ne présente toutes les garanties de bonne moralité professionnelle et s’il ne remplit les conditions suivantes : être titulaire du diplôme d’État national de Docteur en pharmacie ou d’un diplôme de pharmacien reconnu équivalent par les autorités nationales compétentes ; être de nationalité guinéenne ; être résident en République de Guinée ; être inscrit à l’Ordre national des pharmaciens de Guinée ». Au-delà des critères impératifs énoncés, il convient de préciser qu’un étranger peut exercer la profession de pharmacien en Guinée uniquement s’il existe une convention de réciprocité entre son pays d’origine et la Guinée. Cela est clairement confirmé par l’article 76 de la même loi organique de 2018.
De plus, il est important de souligner que si une personne, consciente de son absence de qualifications ou de connaissances nécessaires conformément aux exigences de l’article 75, exerce le métier de pharmacien et que la vente de médicaments effectuée par celle-ci entraîne une maladie grave ou le décès d’un patient, la qualification de l’infraction ne sera pas celle d’homicide involontaire, mais plutôt d’homicide volontaire. Dans ce cas, le défaut de l’élément moral habituellement requis sera remplacé par une violation manifeste des normes légales établies par l’article 75, témoignant ainsi d’une intention délibérée de mettre en danger la santé publique.
II- La vente de médicament sans ordonnance.
La chambre de discipline du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens, réunie en séance publique le 30 juin 2009, a prononcé une sanction à l’encontre d’un pharmacien pour avoir vendu un médicament sans ordonnance. Cette décision a conduit à l’interdiction d’exercer la profession de pharmacien pour une durée de six mois, dont deux mois avec sursis.
Il est toutefois essentiel de rappeler que certains médicaments ne nécessitent pas d’ordonnance pour leur délivrance. En effet, un pharmacien est en droit de vendre des produits non soumis à prescription, tels que le paracétamol, parmi d’autres. Par ailleurs, un médecin peut acquérir des médicaments soumis à prescription sans présenter d’ordonnance, à condition de fournir sa carte professionnelle au pharmacien. Dans ce cas, le pharmacien est exonéré de toute responsabilité en cas de dommages causés par le médicament délivré au médecin.
III- La prescription du médicament.
Un pharmacien n’a pas le droit de prescrire des médicaments aux patients. En effet, l’article 138 de la loi de 2018 relative aux médicaments, aux produits de santé et à l’exercice de la profession de pharmacien précise que, « Sont autorisés à prescrire : les médecins ; Les chirurgiens-dentistes, dans les limites des produits prescrits ou utilisés dans le cadre de l’art dentaire ; Les sages-femmes, dans les limites d’une liste déterminée par arrêté du Ministre chargé de la Santé ; En l’absence de médecin, les Aides de Santé et les Agents Techniques de Santé, dans la limite de la liste nationale des médicaments essentiels par niveaux de soins et selon des protocoles validés. Ces listes sont déterminées par arrêté du Ministre chargé de la Santé après avis des conseils nationaux des ordres concernés ». Ici, nous pouvons constater que les pharmaciens ne disposent d’aucune autorisation pour prescrire des médicaments aux patients sur l’ensemble du territoire guinéen. Cette prérogative est strictement réservée aux médecins et aux autres professionnels de santé mentionnés.
De plus, il convient de souligner que même si un médecin est habilité à rédiger une ordonnance, il n’est pas en droit de délivrer des médicaments non autorisés, article 20 du Code de déontologie médicale en Guinée. L’objectif recherché par le droit médical guinéen vise à garantir la sécurité des patients et à encadrer rigoureusement la prescription et la délivrance des médicaments.
IV- La juridiction compétente.
En droit guinéen, il est essentiel de souligner que la responsabilité du pharmacien peut être engagée devant trois types de juridictions. La première est la juridiction disciplinaire. Le pharmacien a le droit de contester les décisions rendues par cette instance en interjetant appel devant la chambre disciplinaire du Conseil National. Par ailleurs, la décision de cette chambre peut également faire l’objet d’un pourvoi devant la Cour suprême (chambre administrative). Un pharmacien peut être suspendu, temporairement ou définitivement, en raison de violations du Code de déontologie des pharmaciens ou de la loi ordinaire de 2018 relative aux médicaments, aux produits de santé et à l’exercice de la profession pharmaceutique. Il convient de préciser que cette loi de 2018 a abrogé la loi pharmaceutique guinéenne de 1994, qui n’est donc plus en vigueur.
La deuxième juridiction est la juridiction pénale. Un pharmacien guinéen qui délivre des médicaments soumis à prescription sans exiger d’ordonnance engage sa responsabilité pénale, surtout si ce médicament cause la mort ou nuit à l’intégrité physique du patient. Dans de telles situations, plusieurs motifs peuvent être retenus, tels que la mise en danger de la vie d’autrui ou l’empoisonnement si le médicament entraîne le décès du patient.
Enfin, la troisième juridiction est la juridiction civile. Le pharmacien peut être tenu de réparer les dommages causés au patient ainsi qu’à ses proches, sous réserve de preuve. Par exemple, si un pharmacien recommande un médicament à un patient sans avoir effectué un diagnostic approfondi, il empiète illégalement sur le domaine de compétence d’un médecin, ce qui peut entraîner une action en responsabilité civile devant le juge compétent. Par ailleurs, il est important de souligner que ces sanctions peuvent être cumulées car celles-ci n’ont pas la même nature.


