Guerlain a interjeté appel de cette décision et a obtenu satisfaction devant la Cour d’appel de Paris, qui a rendu une décision le 22 septembre dernier, statuant en sa faveur : le signe « Le Frenchy », pour les produits concernés, est suffisamment distinctif et n’est pas descriptif [1].
Dans la décision contestée, le Directeur de l’INPI avait considéré que l’anglais est prépondérant dans le langage courant et que nombreuses sont les expressions comprenant le terme « French », comme « French manucure » ou « French tech », couramment utilisées dans le commerce. Il avait ajouté que l’adjonction de la voyelle « y » à l’adjectif « French » ne change pas la nature de cet anglicisme argotique.
Guerlain indique que « Le Frenchy » évoque un « petit Français » en argot et que cette seule référence à l’esprit français ne suffit à priver le signe de distinctivité.
La Cour d’appel se rallie aux arguments de Guerlain, considérant que « Le Frenchy » évoque « une personne représentant un style, un art de vivre à la française, un esprit » et non directement une origine du produit.
La combinaison de l’article « le » et du terme « Frenchy » est inhabituelle et arbitraire par rapport aux produits visés. Le signe ne manque donc pas de caractère distinctif intrinsèque au sens de l’article L.711-1 du Code de la propriété intellectuelle. De même, il n’est pas descriptif, au sens de l’article L.711-2 b) des produits concernés, dans la mesure où la marque ne désigne pas une caractéristique des produits mais vise plutôt à qualifier la personne qui pourrait les consommer.
L’on peut supposer que la marque a été sauvée parce que le signe « Le Frenchy » comprend une forme d’argot qui ne présente pas de lien direct avec les produits en cause.
La décision aurait pu être différente face à un signe comprenant principalement le terme « French ».
En effet, l’on note par exemple que l’Office de l’Union européenne pour la Propriété Intellectuelle (EUIPO) a rejeté la marque « LIVE THE FRENCH WAY » le 9 décembre 2019, pour manque de caractère distinctif au regard de services couverts en classes 35, 39 et 43, car il serait perçu comme un « slogan promotionnel élogieux ».
Quoi qu’il en soit, en cas de doute sur la validité d’un signe, il est pertinent de déposer la marque sous forme semi-figurative, si elle a vocation à être exploitée de manière stylisée. Les éléments graphiques permettent d’accroître le caractère distinctif d’un signe.