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Google expérimente le XXX à sa façon. Par Manuel Roche, CPI
Parution : mardi 20 septembre 2011
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Alors que les périodes de réservation des noms de domaine en .XXX ont commencé début septembre, la société américaine GOOGLE INC. vient de faire l’expérience d’un cas de cybersquatting qui fournit selon nous une illustration des nombreux contentieux qui risquent de naître dans les mois à venir.

Rappelons en effet que l’ICANN (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers) a approuvé cette année la création de l’extension spéciale de noms de domaine de l’Internet .XXX, destinée à ce qui est pudiquement appelé l’industrie du divertissement pour adultes.

Le registre chargé de la gestion de cette nouvelle extension sTLD (special Top Level Domain), la société anglaise ICM REGISTRY, a mis en place, comme c’est désormais souvent le cas, quatre périodes de réservation. Tout d’abord, les périodes "Sunrise A" et "Sunrise B", du 7 septembre au 28 octobre 2011, qui permettent respectivement aux membres de l’industrie ciblée déjà titulaires de marques ou de noms de domaine de réserver prioritairement leur nom de domaine en .XXX ou à l’inverse aux non membres de cette communauté de bloquer les noms de domaine correspondant à leurs marques déjà enregistrées. S’ouvrira ensuite, du 8 au 25 novembre, une période dite de "Landrush" au cours de laquelle les membres de l’industrie pour adultes pourront tenter de réserver des noms les intéressant, quitte à être départagés aux enchères en cas de demandes concurrentes. Enfin, à partir du 6 décembre 2011, l’extension deviendra libre d’accès et la fameuse règle du "premier arrivé, premier servi" s’appliquera.

C’est dans ce contexte d’intense effervescence qu’est né un contentieux entre la société GOOGLE INC. et un particulier domicilié en Azerbaïdjan qui avait réservé, non pas le nom de domaine google.xxx mais googlexxx.com. Bien que ce nom fût réservé depuis 2001, la société GOOGLE INC. n’avait sans doute pas cru bon d’agir contre son réservataire avant que l’extension .XXX ne devienne réalité.

C’est ainsi que les 22 et 28 juin 2011, GOOGLE INC. déposa une plainte auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI, en vertu des principes UDRP (Uniform Domain Name Dispute Resolution Policy ou Principes directeurs pour un règlement uniforme des litiges relatifs aux noms de domaine). Selon ces principes, pour obtenir gain de cause dans une telle procédure, le requérant doit prouver (i) que le nom de domaine litigieux est identique ou similaire à la marque invoquée, (ii) que le défendeur n’a ni droit ni intérêt légitime au regard du nom de domaine, (iii) que le nom de domaine a été réservé et est utilisé de mauvaise foi.

Le premier point ne fut pas véritablement discuté dans la mesure où il est communément admis, et de jurisprudence constante, que l’adjonction des lettres XXX et du suffixe .com ne suffisent pas à différencier effectivement le nom de domaine litigieux de la marque invoquée. Les deuxième et troisième points ne le furent pas davantage, le requérant étant parvenu d’une part, à démontrer que le défendeur n’avait jamais fait usage de son nom de domaine, sauf pour y héberger des liens promotionnels qui lui permettaient de gagner de l’argent grâce au trafic engendré ou des pages à caractère pornographique, et d’autre part, à établir que sa marque était enregistrée et intensément exploitée bien avant la réservation du nom de domaine litigieux. A noter que le refus du défendeur de prendre part à la procédure n’a pas joué en sa faveur.

L’arbitre décida donc, le 8 août 2011, de transférer le nom de domaine à la société GOOGLE INC (décision D2011-1054). Voilà qui prouve une nouvelle fois, si besoin était, les avantages d’une procédure d’arbitrage et de médiation pour les cas de cybersquatting évidents.

Toujours est-il qu’un bon moyen d’y échapper consiste, pour les titulaires de marques, à se signaler sans tarder auprès du registre pour bloquer les noms de domaine correspondants en .XXX.

Manuel ROCHE Conseil en propriété industrielle - Marques & Modèles INSCRIPTA http://www.inscripta.fr

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