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Il est interdit d’interdire : les contrats de distribution et la vente sur Internet , par Corinne Champagner Katz et Charlotte Galichet, Avocates au cabinet CCK
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Parution : mercredi 9 novembre 2011
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Nombreuses sont les sociétés qui, disposant d’un réseau de distribution, souhaitent conserver le monopole de la vente en ligne.
La question de savoir si un contrat de distribution peut prévoir une interdiction au détriment des distributeurs de commercialiser des produits sur internet au moyen de leur propre site, a déjà été posée à de nombreuses reprises.
La Cour de Justice de l’Union Européenne vient de se prononcer par une décision du 13 octobre 2011 concernant les produits de la société Pierre Fabre Dermo-Cosmetique.
Cette société bénéficie d’un réseau de distribution sélective [1]. Les clauses des contrats de distribution de cette société, prévoient notamment que les ventes doivent être effectuées dans un espace physique et en présence d’un pharmacien diplômé. Il en résultait pour les distributeurs une interdiction de vendre ces produits cosmétiques et d’hygiène sur internet.
Selon la Cour de Justice de l’Union Européenne, la présence d’un pharmacien diplômé ne constitue pas une justification objective à l’interdiction, s’agissant de produits non soumis à prescription médicale.
L’objectif de préserver l’image de prestige ne constitue pas davantage un objectif légitime.
L’interdiction de commercialiser sur internet constitue en conséquence selon la Cour, une restriction de la concurrence “par objet” dans la mesure où elle condamne toute vente, même passive. Les utilisateurs finaux doivent avoir accès aux produits s’ils ne se situent pas dans la zone de chalandise physique du distributeur agréé.
Cela pose un problème majeur quant à la territorialité du contrat dans la mesure où un consommateur aura la faculté de se faire livrer le produit dans une zone correspondant au territoire contractuel d’un autre distributeur.
Les modalités d’intervention d’un service après-vente pourraient également être source de concurrence déloyale entre deux distributeurs.
Le contrat devra encadrer strictement les conditions dans lesquelles la vente sur internet est autorisée (présentation des produits, description, photographie, charte graphique, suivi des commandes...)
Comme dans tout contrat de distribution, il conviendra également d’envisager :
une clause d’objectifs : minimum de chiffre d’affaires à réaliser,
les clauses habituelles de garanties et de responsabilités.
Enfin, rappelons qu’en droit français de la concurrence et en droit communautaire, la pratique de fixation des prix par le fournisseur est interdite .
L’interdiction par le distributeur de toute opération de promotion, de rabais, ristourne ou liquidation, constitue également une atteinte à la liberté des distributeurs (décision n° 01/135/CE de la Commission du 5 juillet 2000, la décision n° 2001/711/CE de la Commission du 29 juin 2001 et la décision n° 02/190/CE de la Commission du 21 décembre 2000).
On l’aura compris, les contrats de distribution doivent être soigneusement rédigés et satisfaire les parties en fonction de la réalité de leur activité.
[1] « Système de distribution dans lequel le fournisseur s’engage à vendre les biens ou services contractuels, directement ou indirectement, uniquement à des distributeurs sélectionnés sur la base de critères définis, et dans lequel ces distributeurs s’engagent à ne pas vendre ces biens ou ces services à des distributeurs non agréés » (règlement communautaire n°2790/1999)
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