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Devoir de secours et d’assistance des descendants à l’égard des ascendants. Par Emilie Bruézière, Avocat.
Parution : vendredi 1er mars 2013
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L’obligation alimentaire des descendants envers les ascendants est posée par l’article 205 du Code civil qui dispose :
" les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin".

Contrairement à une idée répandue auprès des justiciables le Code civil ne vise pas les pères et mères mais de manière plus général les ascendants.

Il faut, donc, entendre pas ascendants les parents mais également les grands-parents.

A ce titre, il convient de relever que l’article 205 du Code civil ne fixe pas de hiérarchie entre les ascendants.

Ainsi, les grands-parents peuvent demander des aliments à leurs petits-enfants alors même que leurs enfants seraient en vie et disposeraient des ressources suffisantes.

L’ascendant doit, cependant, être dans le besoin.

Le législateur ne définit pas la notion de besoin mais il s’agit bien évidemment des besoins essentiels.

L’ascendant qui prétend à aliments doit être dans l’impossibilité de satisfaire aux besoins nécessaires à sa vie. (impossibilité de faire face aux frais de logement, de nourriture, de soins médicaux etc..)

En outre ce dernier ne doit pas lui-même avoir manqué à ses obligations.

En effet, l’obligation alimentaire des descendants à l’égard des ascendants n’est pas absolue.

L’article 207 du Code Civil dispose :

« Néanmoins, quand le créancier aura lui-même manqué gravement à ses obligations envers le débiteur, le juge pourra décharger celui-ci de tout ou partie de la dette alimentaire »

Les descendants pourront donc être « exonérés » du paiement d’aliments en cas de manquement grave de l’ascendant.

La loi fixe précisément certains cas où le père et/ou la mère sont privés du droit de réclamer des aliments à leurs enfants :

- L’article 228-1 du Code de l’action sociale et des familles dispose que les pères et mères qui ont abandonné leur enfant au service de l’Aide Sociale à l’Enfance sont privés du droit de réclamer des aliments à leurs enfants devenus pupilles de l’état,

- L’article 132-6 du Code de l’action sociale et des familles prévoit qu’il en est de même lorsque l’enfant a été retiré à ses parents par décision judiciaire durant une période d’au moins trente-six mois cumulés au cours des douze premières années de la vie de l’enfant.

En dehors de ces cas précis, il faut se référer à la jurisprudence pour avoir une idée de la notion de gravité du manquement.

La jurisprudence considère que l’ascendant qui n’aurait pas lui-même accompli son devoir alimentaire ne peut prétendre à aliments.

Il est de même pour l’ascendant qui abandonné son foyer à de nombreuses reprises (Civ 2 11/02/1981 N°79 16 767) ou se serait rendu coupable de violences répétées (Civ 1 18/01/2007 N°06 10 833).

L’arrêt rendu par le 21 novembre 2012 dernier (.Civ 1 21/11/2012 N°11 20140) nous donne un nouvel exemple de manquement grave retenu par les juges.

Dans le cas soumis à la Cour de cassation, un père avait assigné ses deux enfants afin d’obtenir le paiement d’une pension alimentaire mensuelle en applications des dispositions de l’article 205 du Code civil.

La Cour de cassation a considéré que la demande du père devait être rejetée car ce dernier a «  manqué gravement à ses obligations envers les débiteurs alimentaires  ».

En l’espèce le père s’était rendu coupable de harcèlement et de violences caractérisées, « il a notamment tiré à l’aide d’une arme à feu à plusieurs reprises sur la porte de la résidence de la famille  », qu’il a laissé à ses enfants des messages téléphoniques réitérés « contenant des propos humiliants et injurieux allant jusqu’au déni de paternité en ce qui concerne l’un d’entre eux ».

Le parent ayant eu un comportement violent et injurieux à l’égard de ses enfants ne peut prétendre au bénéfice alimentaire.

Emilie Bruézière Avocat au Barreau de Paris brueziereavocats.fr

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