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En France, on peut obtenir des brevets qui ne sont pas valables. Par Jean-Luc Chesneau, CPI.
Parution : mardi 3 septembre 2013
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Vous voulez un brevet ? Pas de problème ! Vraiment. En France, l’INPI est amené à délivrer des brevets pour des techniques qui ne respectent pas tous les critères de brevetabilité. Comment est-ce possible ? A quoi cela peut-il servir au déposant ? Explications.

Rappel sur les critères de validité d’un brevet

Tout d’abord, rappelons que pour qu’une invention soit valablement protégée, il faut qu’elle respecte simultanément les 3 critères suivants :

-  nouveauté,
-  activité inventive,
-  application industrielle (l’invention doit pouvoir être susceptible d’être fabriquée ou utilisée dans tout type d’industrie).
Nouvelle : l’invention ne doit pas avoir été divulguée, où que ce soit dans le monde et quel que soit le moyen de la divulgation. Inventive : les différences que l’invention présente (nécessairement puisqu’elle est nouvelle) ne doivent pas être évidentes pour l’homme du métier.

Le Rapport de Recherche

Pour toute demande de brevet, l’INPI effectue une recherche internationale d’antériorités et émet, environ 9 mois après le dépôt de la demande, un rapport citant les antériorités les plus proches. Ce rapport est accompagné d’une opinion écrite de l’examinateur sur la brevetabilité de l’invention. Selon la situation, il peut être obligatoire d’y répondre (en cas d’antériorités pertinentes, l’absence de réponse entraînant le rejet de la demande), ou non (le ou les documents trouvés n’étant alors que de simples arrière-plans technologiques, auquel cas la délivrance sera ensuite décidée).

Mais même si l’opinion de l’examinateur est défavorable, le simple fait de répondre que l’invention est nouvelle peut le « forcer » à délivrer, sans avoir à se justifier sur l’activité inventive.

Que dit la loi française ?

Selon le Code la propriété intellectuelle (L612-12 CPI) :
« Est rejetée, en tout ou partie, toute demande de brevet :
(…) 7° Qui n’a pas été modifiée, après mise en demeure, alors que l’absence de nouveauté résultait manifestement du rapport de recherche ; (…).
 »

Notons : « absence de nouveauté ». Et s’il y a « absence d’activité inventive » ? Tout est là. Rien dans le Code la propriété intellectuelle français ne permet à un examinateur de l’INPI de refuser un brevet sous le motif d’absence d’activité inventive.

Alors à quoi sert un brevet non valable ?

Un brevet ou une demande de brevet, même non valable, peut permettre de dissuader la concurrence de copier le produit en question.

Des effets sur les plans de la communication et des relations commerciales peuvent également être envisagés.

Dans certains cas, on pourra même obtenir dans l’esprit des consommateurs une perception d’une sorte de gage de qualité (ce qui n’est évidemment pas le cas, y compris d’ailleurs pour un brevet valable).

On comprend donc qu’un tel brevet peut s’avérer avantageux… pour son propriétaire, alors qu’il peut être perçu comme une menace potentielle par les tiers.

Pour ces effets, un certificat d’utilité peut néanmoins suffire.

Qu’en est-il à l’étranger ?

Il s’agit là d’une spécificité française. Les autres Offices pratiquent un examen complet des critères de brevetabilité et ne délivrent le titre que lorsque les critères de validité sont remplis.

Jean-Luc Chesneau Conseil en Brevets - Cabinet Legi LC

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