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Le Code du tourisme et la loi du 26 janvier 1984, précisions sur la durée du contrat du directeur d’un office de tourisme. Par Mathilde Peraldi, Avocat.
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Parution : samedi 19 juillet 2014
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Les lois n°2005-843 en date du 26 juillet 2005 et 2012-347 en date du 12 mars 2012 ont permis une avancée certaine du statut des agents non titulaires de la fonction publique recrutés à durée déterminée en ouvrant la possibilité de conclure des contrats à durée indéterminée.
Qu’en est-il des directeurs d’office de tourisme ?
Désormais, au terme d’une durée effective de service de 6 ans, le contrat de l’agent non titulaire de la fonction publique recruté en CDD est renouvelé à durée indéterminée.
NB : le contrat n’est pas automatiquement transformé en CDI, encore faut-il que l’administration propose le renouvellement du contrat qui, dans une telle hypothèse, ne pourra l’être qu’à durée indéterminée.
Ces dispositions constituent une mise en conformité au droit communautaire qui considère en effet que les contrats à durée indéterminée « sont et resteront la forme générale des relations d’emploi entre employeurs et travailleurs ».
Cette mise en conformité ne vise pourtant pas l’ensemble des agents publics non titulaires.
Ainsi est-il des directeurs d’office de tourisme. En effet, l’article R. 133-11 du Code du tourisme dispose que :
« Le directeur de l’office de tourisme est recruté par contrat.
Il est nommé par le président, après avis du comité.
Le contrat est conclu pour une durée de trois ans, renouvelable par reconduction expresse ; il peut être résilié sans préavis ni indemnité pendant les trois premiers mois d’exercice de la fonction.
La limite d’âge du directeur est celle prévue pour les agents non titulaires des communes.
En cas de non-renouvellement du contrat, l’intéressé perçoit une indemnité de licenciement calculée selon les dispositions en vigueur relatives au licenciement des agents civils non fonctionnaires des administrations de l’Etat.
Dans tous les cas, la décision de licenciement ou de non-renouvellement du contrat est prise par le président, après avis du comité ».
Cet article qui prévoit que le contrat peut être renouvelé ne précise pas si au terme d’une durée effective de 6 ans, ce contrat est conclu à durée indéterminée.
Et pour cause, selon une réponse ministérielle en date du 10 novembre 2009 :
« le directeur assure le fonctionnement de l’office de tourisme sous l’autorité du président ». Il est également précisé qu’il est « nommé dans les conditions fixées par décret » et que sa « nomination et son licenciement sont soumis à l’avis du comité de direction ». L’article R. 133-11 du même code prévoit que le « directeur de l’office de tourisme est recruté par contrat (...) conclu pour une durée de trois ans, renouvelable par reconduction expresse ». Ainsi, le contrat d’un directeur d’office de tourisme doit être prévu pour une durée de trois ans qui n’est pas une durée maximale mais la durée fixe du contrat tel que prévu par le code du tourisme. Enfin, ne relèvent des dispositions nouvelles introduites par la loi du 26 juillet 2005 que les seuls agents non titulaires de la fonction publique territoriale dont le fondement de l’engagement repose sur les alinéas 4, 5 et 6 de l’article 3 de la loi du 26 janvier 1984. Les directeurs d’office de tourisme, disposant pour leur recrutement d’une base légale propre qui ne renvoie pas à l’article 3 précité, ne sont donc pas concernés par ces nouvelles dispositions » (Réponse ministérielle publiée au JO du 10 novembre 2009.
A en croire cette réponse ministérielle, les directeurs d’office de tourisme étant recrutés sur un fondement autonome qu’est le Code du tourisme, ces derniers ne peuvent pas bénéficier des dispositions du statut général de la fonction publique et en particulier de la loi du 26 janvier 1984 permettant le renouvellement des contrats en CDI.
Sur ce point, il est vrai que la loi du 26 janvier 1984 ne renvoie pas au Code du tourisme et réciproquement. D’ailleurs, les cas d’ouvertures des recrutements d’agents non contractuels de l’article 3 de la loi précitée ne visent pas le poste de directeur d’un office de tourisme. Il est en tout état de cause difficile de rattacher le poste de directeur d’office de tourisme aux postes visés à l’article 3.
Or, l’absence de renouvellement de ces contrats en CDI ne constitue-t-il pas une méconnaissance manifeste des dispositions communautaires précitées ?
C’est dans ce contexte que le député Jean-Louis Christ a saisi Mme la ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme d’une question sur la nature des contrats de travail des directeurs d’offices de tourisme constitués en établissements publics à caractère industriel et commercial :
« Selon le réseau des offices de tourisme de France, ce système organise une précarisation de la situation de ces directeurs et ce, d’autant plus que le non renouvellement est discrétionnaire et non motivé. Afin de mettre notre droit en conformité avec le droit européen et de veiller à un traitement équitable de ces directeurs avec leurs collègues des structures associatives, le réseau des offices de tourisme de France propose une modification du code du tourisme en changeant ainsi les termes de l’article R. 133-11 dudit Code : « le contrat est conclu pour une durée de trois ans, renouvelable par reconduction expresse ; à l’issue d’une période maximale de 6 ans, le contrat reconduit l’est obligatoirement sous forme d’un contrat à durée indéterminée ».
Il lui demande quelles suites le Gouvernement entend réserver à cette proposition du réseau des offices de tourisme de France, s’agissant du contrat de travail des directeurs d’offices de tourisme, constitués sous la forme d’EPIC » (Question n°35614 publiée au JOAN le 6 août 2013 et renouvelée page : 8295).
Les juridictions n’ayant pas tranché ce point, la balle de la lutte contre la précarité est dans le camp du pouvoir règlementaire !
Mathilde PERALDI AvocatCet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion, plus d'infos dans nos mentions légales ( https://www.village-justice.com/articles/Mentions-legales,16300.html#droits ).
Bonjour,
Merci pour cet article !
Enfin une lecture et une évolution de la réglementation qui va enfin nous permettre (à nous les directeurs d’Office de Tourisme en EPIC) une forme de stabilité dans nos contrats, enfin il faut l’espérer !
OTF mène pour nous ce combat et c’est formidable !
Cependant, il existe déjà des cas de postes de direction d’EPIC conclus en CDI, alors je pense qu’il faut s’appuyer sur ces exceptions pour légitimer une stabilité et un traitement équitable des salariés du monde du privé et du public qui ne sont pas titulaires (et pour cause, il n’existe pas de filière tourisme ni de concours spécifique à nos métiers nous permettant d’accéder à une titularisation). Cette situation de précarité est intolérable au quotidien.
Votre article ouvre une brèche et j’espère que nous serons nombreux à pouvoir faire valoir une interprétation novatrice des textes pour convaincre nos élus de conclure des contrats en CDI après une longue période d’essai de 6 ans, que la loi y oblige ou pas !
Bonjour,
Merci pour votre participation car il est vrai que le statut des agents non titulaires de la fonction publique et en particulier celui des directeurs d’office de tourisme est instable.
A mon sens, la cd-isation des directeurs d’office de tourisme devrait intervenir afin de rendre compatible leur statut avec le droit communautaire et en particulier avec la directive 1999/70/CE du Conseil européen du 28 juin 1999.
Dans l’attente, les juridictions nationales saisies de cette question pourraient opérer un contrôle de conventionalité dans la mouvance de l’arrêt du Conseil d’Etat en date du 12 juin 2013 (n°347406).
En tout état de cause, comme vous le soulignez, il est fort à penser que sous la poussée des cd-isations faites par les collectivités locales, le pouvoir règlementaire mette fin ou à tout le moins limite la précarisation de la situation des directeurs d’office de tourisme.