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La fiscalité du non résident. Par Patrick Herrou, Avocat.
Parution : mercredi 15 octobre 2014
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Le résident Schumacker

Ce dispositif s’applique exclusivement aux résidents de l’UE et de l’EEE et n’aurait donc pas vocation à être étendu à des ressortissants d’autres pays.
Pourtant, il ressort d’une réponse ministérielle du 18 avril 2013, sans aucune ambiguïté que seulement deux raisons s’opposeraient à la possibilité d’étendre ce dispositif à d’autres pays que ceux visés expressément par l’arrêt et l’instruction administrative :
-  la libre circulation des personnes et,
-  la réciprocité, existant entre les états visés par la circulaire.

Or, de nombreux États ont signés avec la FRANCE un ensemble de conventions assurant et la libre circulation des personnes et la réciprocité.
Rien donc ne s’opposerait à ce que ce dispositif leur soit étend et ce, d’autant que la clause de non discrimination inscrite dans la plupart des conventions fiscales signées avec la FRANCE s’oppose à ce que, à situation égale, le national de l’État contractant soit soumis dans l’autre État à une imposition plus lourde que le national de cet autre État.

Les contributions sociales sur revenus fonciers et plus values immobilières

La Cour de Justice Européenne doit trancher prochainement le litige qui concerne de nombreux non-résidents, en application du principe selon lequel un résident de l’Union Européenne ne peut pas être soumis à des cotisations sociales dans plusieurs États membres.
Une décision favorable aux non résidents communautaires est donc attendue, mais cette décision pourrait ne pas être rétroactive.
Il convient donc de faire très attention aux délais de prescription, et en particulier aux échéances de décembre 2014 et décembre 2015.

L’ISF et la SCI

L’’article 885 T ter du CGI (issu de l’article 40 de la loi 2011-900 du 29 Juillet 2011) prévoit que, à compter du 1er Janvier 2012, la valeur vénale des titres d’une société à prépondérance immobilière possédés par un non-résident à retenir pour le calcul de l’ISF est déterminée sans tenir compte des créances détenues, directement ou par l’intermédiaire d’une ou plusieurs sociétés interposées, par ce non-résident dans la société.

Cette disposition me parait contraire à un certain nombre de principes généraux du droit fiscal.
En matière de droits d’enregistrement, à défaut de disposition particulière, les dettes contractées à l’étranger sont déduites dans les mêmes conditions et sous les mêmes justifications que celles contractées en France.
De la même façon, lorsque le défunt est domicilié hors de France et que des biens français sont imposables, le passif grevant ces biens est admis en déduction [1].

Ou encore, les articles 56 et 58 CE s’opposent à une législation d’un État membre relative au calcul des droits de mutation sur les immeubles, qui ne permet pas la déduction de la valeur d’un immeuble des charges hypothécaires afférentes à cet immeuble au motif que, au moment de son décès, la personne dont la succession est ouverte était résidente d’un autre État membre [2]

- Elle est également contraire aux dispositions de l’article 885 L du CGI, aux termes duquel les personnes physiques qui n’ont pas en France leur domicile fiscal ne sont pas imposables sur leurs placements financiers.
- Enfin, elle est contraire aux dispositions contenues dans la plupart des conventions fiscales, contenant le principe de non discrimination.
- Surtout, et ainsi qu’il ressort de l’exposé des motifs ayant présidé à son adoption, cette disposition serait destinée à faire échec aux montages par lesquels les non-résidents structuraient leur investissement immobilier en France par l’intermédiaire d’une SCI à laquelle ils consentaient des apports en compte courant.

Ce texte assimile donc l’ensemble des non-résidents à des fraudeurs fiscaux sans considérer une seconde les raisons objectives qui ont présidé à la création d’une société civile.

Or, le Code général des impôts n’est pas avare de dispositions contraignantes, et il suffisait à l’Administration d’invoquer l’abus de droit pour remettre en cause la situation des personnes qui auraient effectivement constitué des sociétés civiles dans le seul but d’échapper à l’impôt.

Me Patrick HERROU Avocat au Barreau de Nice Spécialisé en Droit Fiscal et en Droit des Sociétés Avocat mandataire en transactions immobilières Ancien Conseil Juridique Ancien Elève de l\'Ecole Nationale des Impôts Membre de l’Association des Avocats Spécialistes en Droit Fiscal

[1Inst. 3 novembre 1977, 7 G-8-77 ; D. adm. 7 G-2321 n° 38, 15 décembre 1991

[2CJCE 11 septembre 2008 aff. 11/07, 3e ch., Hans Eckelkamp et a.

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