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Des dommages subis par la victime d’accident avec dommages corporels et de leur évaluation. Par Joëlle Marteau-Péretié, Avocat.
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Parution : jeudi 14 avril 2016
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L’évaluation des préjudices corporels d’un accidenté se fait à l’occasion d’une expertise conduite par un expert (un médecin) diligenté par la compagnie d’assurance, par un magistrat que ce dernier intervienne dans le cadre d’une indemnisation judiciaire classique ou dans le cadre d’une prise en charge du préjudice au titre de la solidarité nationale.
Cette évaluation du dommage est une évaluation principalement médico-légale, elle se fera notamment suivant les éléments contenus dans le dossier médical de la victime, suivant les informations collectées lors de l’entretien de la victime et l’examen médical. Ces trois éléments donnent véritablement le périmètre concret de l’expertise qui aura lieu.
3 éléments préliminaires seront indispensables à l’élaboration du rapport d’expertise du médecin :
- Le dossier médical
Ce dossier médical, dont le contenu est détaillé par la loi Kouchner de 2002, contient toutes les informations liées aux traitements tendant à stabiliser l’état de la victime. Ainsi il renferme notamment, les compte rendus d’hospitalisation, les compte rendus opératoires, les soins infirmiers, les traitements subis par la victime, les complications éventuellement rencontrées.
- L’entretien de la victime avec l’expert
L’entretien de l’expert avec la victime est fondamental puisqu’il permet à l’expert d’apprécier les souffrances psychologiques, physiques, familiales subies par le patient dans ses activités quotidiennes, dans son travail. Il permet de confirmer que les souffrances sont en lien direct avec le dommage.
- L’examen de la victime
L’expert est un médecin, il se doit au travers de l’examen physique de l’accidenté de vérifier une fois encore le lien entre ce qu’il voit et les éléments collectés lors de l’entretien et dans le dossier médical.
Ce n’est qu’au travers de ces ces trois axes que l’expert pourra s’assurer de l’existence du lien des blessures avec le dommage.
Dans le cadre de l’indemnisation, le handicap se décompose ainsi en plusieurs dimensions. L’expert sera chargé de les passer en revue :
- Les antécédents de santé
L’expert va apprécier si les antécédents sont ou ne sont pas à prendre en compte sur l’indemnisation du dommage.
- Les difficultés fonctionnelles des blessures
L’expert évaluera par ailleurs la difficulté de la victime à effectuer les actes de la vie courante et son aptitude à exercer son activité professionnelle.
- Les souffrances physiques, psychologiques
L’expert n’apprécie pas ici les difficultés motrices de la victime mais il est chargé d’apprécier ses souffrances physiques, psychologiques, leurs conséquences personnelles et familiales du fait du dommage.
En résumé c’est une vue d’ensemble sur l’état de santé de la victime, tant avant qu’après l’accident, qui rendra possible, par soustraction, la connaissance exacte de ce qui relève indiscutablement des préjudices subis, préjudices directement liés à l’accident. Tout cela sera évidemment précisé dans le rapport.
Le processus d’indemnisation induit la nécessité de recourir à un chiffrage du montant de l’indemnisation de chaque dommage. Par souci de pragmatisme l’expert raisonne en deux temps.
Il établira d’abord le montant de l’indemnisation des blessures pendant la période où ces dernières ne sont pas stabilisées (avant consolidation). Il procédera au même travail d’évaluation à l’issue de la consolidation, c’est-à-dire à partir du moment où les lésions sont fixées et revêtent un caractère permanent. Il est important de comprendre quel était l’état de santé exact de l’accidenté avant son accident de sorte à pouvoir établir tout ce qui est la conséquence directe ou indirecte de l’accident et ce qui ne lui est pas imputable.
L’expert pourra alors se référer au barème dicté par son expertise. Ce barème diffère selon que la mission lui est confiée par un assureur, un magistrat (pour les procédures pénales et civiles) ou lorsque le magistrat intervient au titre de la solidarité nationale (CCI- ONIAM).
En pratique il pourra s’appuyer selon les cas sur le barème du concours médical, le barème de la société française des médecins légistes, sur le barème de l’assureur ou encore celui des des accidents médicaux.
Que l’expert soit missionné par un assureur ou un magistrat, le praticien médecin devra évaluer tous les préjudices de la victime.
A cet effet, une nomenclature a été créée en 2006 et qui fait autorité depuis lors : la nomenclature Dintilhac. Cette dernière énumère les préjudices que doit apprécier l’expert dans le cadre de son expertise.
Cette nomenclature oblige l’expert à se prononcer sur les préjudices existants avant et après consolidation.
Ils se décomposent comme suit :
Les préjudices temporaires
Dépenses de santé actuelles
Frais divers
Perte de gains professionnels actuels
Déficit fonctionnel temporaire
Préjudice esthétique temporaire
Souffrances endurées.
Les préjudices permanents
Dépenses de santé futures
Frais de logement adaptés
Frais de véhicule adapté
Assistance tierce personne
Perte de gains professionnels futurs
Incidence professionnelle
Préjudice scolaire, universitaire ou de formation
Déficit fonctionnel permanent
Préjudice esthétique permanent
Préjudice d’agrément
Préjudice d’établissement
Préjudice sexuel
Préjudice exceptionnel.
Les proches de la victime, c’est-à-dire les victimes indirectes de l’accident dont la vie se trouve elle aussi bouleversée, pourront également faire valoir leurs droits à réparation. C’est ce qu’on appelle encore le dommage par ricochet. Le proche de la victime voit en effet ses frais et son mode de vie transformés à la suite de l’accident du parent ou du conjoint.
Il importe ici de souligner l’apport essentiel en la matière de la nomenclature Dintilhac dans la prise en compte de tous les préjudices et dans l’uniformisation progressive de l’évaluation du handicap.
On ne soulignera jamais assez à quel point, pour la victime d’un accident, il importe de recourir à une expertise méthodique et exhaustive, dont la mission et le périmètre sont parfaitement définis. L’avocat et le médecin de recours dont la victime peut s’entourer constituent à cet égard une garantie incontestable.
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