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Une vraie révolution devant les chambres sociales de la cour d’appel ou l’ère de la procédure stricte. Par Michèle Bauer, Avocat.
Parution : lundi 6 juin 2016
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Le décret Macron a considérablement modifié la procédure devant les Conseils de Prud’hommes mais pas seulement, ce décret bouleverse littéralement la procédure devant les chambres sociales des cours d’appel par la modification d’un seul article qui introduit la représentation obligatoire de l’avocat.

L’article 29 du décret n°2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud’homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail modifie l’article R 1461-2 du Code du travail.

L’article R 1461-2 du Code du travail sera rédigé ainsi :

« L’appel est porté devant la chambre sociale de la cour d’appel.
Il est formé, instruit et jugé suivant la procédure sans avec représentation obligatoire. »

Cet article entrera en application pour les appels formés à partir du 1er août 2016.

L’ancienne procédure s’appliquera pour tous les appels interjetés avant cette date et jusqu’à obtention du jugement définitif.

La procédure devant la chambre sociale de cour d’appel exigera que l’appelant ou l’intimé constitue obligatoirement avocat.
Il pourra aussi se faire représenter et assister par un défenseur syndical créé par la loi dite Macron.

En outre, si l’appel est formé, instruit et jugé suivant la procédure avec représentation obligatoire, la procédure sera stricte car écrite, il conviendra d’appliquer les article 899 et suivants du Code de procédure civile (CPC).

Quels seront les changements importants ?
Quels sont les avantages et inconvénients de cette nouvelle procédure ?
Quelles sont les questions qui restent en suspens ?

I- Les changements importants.

1- Pour l’appelant.

2- Pour l’intimé.

3- Pour l’appelant et l’intimé

II. Les avantages et les inconvénients d’une telle procédure.

1- Les avantages.

2- Les inconvénients.

III. Les questions qui restent en suspens.

1- Le timbre fiscal.

L’article 1635 bis P du CGI dispose que :
«  Il est institué un droit d’un montant de 225 € dû par les parties à l’instance d’appel lorsque la constitution d’avocat est obligatoire devant la cour d’appel(…). »

Or, le décret dit Macron n’institue pas qu’une constitution d’avocat obligatoire mais une constitution d’avocat obligatoire ou de délégué syndical.
Aussi, à la lecture de ce texte on pourrait penser que l’appelant ou l’intimé ne devraient pas s’acquitter du timbre à 225 euros.

2- La question de la nécessité d’un avocat postulant.

Avant le décret, les avocats de toute la France pouvaient plaider les dossiers du ressort de toutes les cours d’appel chambre sociale, il n’existait pas de règles de territorialité comme pour les procédures avec représentation obligatoire.

En effet, ces dernières exigent que les parties n’agissent que par le biais d’un avocat du ressort de la cour auprès de laquelle l’appel est formé.
Cela signifierait que pour les actes de procédure, il faudrait un avocat postulant auprès de la cour d’appel compétente.

Sur ce point également, il existe une difficulté, les défenseurs syndicaux représentent les salariés et les employeurs, l’avocat serait postulant suivant l’article 5 de la loi de 1971.
Or, ce dernier ne postule pas mais au même titre que les défenseurs syndicaux représente et assiste ses clients.

Il n’est pas encore sûr qu’un postulant soit nécessaire. Il est à souhaiter que le gouvernement nous éclaire sur ce point.

3- La disparition des plaidoiries ?

Le fait que cette procédure soit écrite donnera l’occasion à certains magistrats n’aimant pas écouter nos plaidoiries à nous inciter à déposer nos dossiers « bouche fermée ».

Si tel est le cas, il conviendra pour nous d’invoquer l’article 440 du Code de procédure civile qui dispose :

« Le président dirige les débats. Il donne la parole au rapporteur dans le cas où un rapport doit être fait.
Le demandeur, puis le défendeur, sont ensuite invités à exposer leurs prétentions.
Lorsque la juridiction s’estime éclairée, le président fait cesser les plaidoiries ou les observations présentées par les parties pour leur défense.
 »

En conclusion :

La procédure d’appel devant la chambre sociale se complique et s’aligne sur les autres procédures devant les chambres civiles ou commerciales des cours d’appel.

Des délais stricts devront être respectés au bénéfice d’une célérité de la procédure si la cour d’appel fixe très vite les dossiers après l’ordonnance de clôture.

La procédure sociale est considérablement bouleversée, la tradition « prud’homale » étant une simplicité de la procédure facilitant l’accès au juge.

Il est certain qu’avec cette nouvelle procédure d’appel l’accès au juge sera plus limité, elle exige de se faire assister obligatoirement par un avocat ou un défenseur syndical.

Est-ce un mal ? Nous le savons, le droit du travail est de plus en plus complexe, un salarié ou un employeur arrivera difficilement à se défendre seul s’il n’a pas fait de longues études de droit.

Exiger qu’il se fasse assister et représenter par un avocat ou un défenseur syndical obligatoirement lui réduit sa possibilité d’accéder au juge mais lui donne la chance de pouvoir accéder au droit.

Pour lire le décret : Ici

Michèle BAUER Avocate à la Cour Généraliste, titulaire d\'un certificat de spécialisation en droit du travail Blog: http://michelebaueravocatbordeaux.fr [Contact->cabinet@michelebaueravocate.com]

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