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L’obligation de s’informer des prestataires de services d’investissement. Par Benjamin Blanc, Avocat.
Parution : mardi 19 septembre 2017
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Il est de Jurisprudence constante que le prestataire de services d’investissement (ci-après « PSI ») est tenu d’un devoir d’information à l’égard de son client.

Ces obligations étaient, depuis la transposition de la Directive dite MIF du 21 avril 2004, codifiées aux articles L.533-1 et suivants du code monétaire et financier (ci-après « CMF »).

Ces obligations d’information sont désormais inscrites aux articles L.533-11 et suivants du code monétaire et financier dont la dernière modification date de l’ordonnance n°2016-827 du 23 juin 2016.

Plus spécifiquement, est mise à la charge du prestataire de services d’investissement une obligation de s’informer.

L’article L.533-13 I du CMF dispose que : « les prestataires de services d’investissement s’enquièrent auprès de leurs clients, notamment leurs clients potentiels, de leurs connaissances et de leur expérience en matière d’investissement, ainsi que de leur situation financière et de leurs objectifs d’investissement, de manière à pouvoir leur recommander les instruments financiers adaptés ou gérer leur portefeuille de manière adaptée à leur situation [...] »

Cette obligation de s’informer peut être appréhendée comme étant celle de « s’assurer que le service proposé répond aux objectifs d’investissement du client, que ce dernier est en mesure de faire face aux risques liés à la gestion du portefeuille, et enfin qu’il possède l’expérience et les connaissances nécessaires pour comprendre – et approuver – les risques inhérents aux services proposés » (RDBF, mars 2013, n°2, commentaire 71).

Pèse donc sur le prestataire de services d’investissement (PSI) une obligation de s’informer, de s’enquérir de la situation financière de son client (Cass. Com., 2 février 2010, n°08-20150 ; Cass. Com.,13 mai 2014, n°09-13805 ; Cass. Com., 26 avril 2017, n°15-27731).

Cette obligation de s’informer doit permettre au PSI de proposer des produits financiers qui correspondent aux besoins du client (Cass. Com., 13 décembre 2011, n°11-11934 ; Cass. Civ.2ième, 8 décembre 2016, n°14-29729).

Cette obligation de s’informer doit donc permettre au PSI de fournir au client une information adaptée.

Cette obligation de s’informer est donc un préalable logique à l’obligation d’information, voire dans certain cas à l’obligation de conseil et/ou de mise en garde du client sur les produits proposés.

Il appartient au PSI de rapporter la preuve qu’il s’est bien renseigné sur son client (Cass. Com., 22 mars 2011, n°10-13727).

La Cour de Cassation considère d’ailleurs que le fait, pour la banque, d’obtenir une déclaration du client selon laquelle il se reconnaît la qualité d’investisseur qualifié disposant des connaissances suffisantes, n’est pas suffisant pour établir le profil du client.

Le profil du client doit être établi par la banque, qui ne peut se contenter d’une simple déclaration du client.

La banque doit donc avoir un comportement actif dans la détermination du profil client (Cass. Com. 12 février 2008 ; Cass. com., 15.06.2011, n°10-18517).

Il se pose alors la question de la sanction du manquement du PSI à l’obligation de s’informer qui lui incombe.

Selon le Professeur Legeais, « l’établissement de crédit doit se renseigner pour pouvoir utilement alerter l’emprunteur sur les risques de crédit sollicité. [...]. Mais le manquement à l’obligation de se renseigner n’est pas, par lui-même, susceptible de causer un dommage [...] Il en résulte que le manquement du banquier à son obligation de se renseigner ne peut être sanctionné en tant que tel ».

La Cour de Cassation a fait sienne cette position (Cass. Com., 13 mai 2014, n°09-13805).

Cette solution ne saurait être généralisée.

En effet, la Cour de Cassation refuse de sanctionner le manquement d’un PSI à son obligation de se renseigner lorsque le client est averti.

« Que par ces énonciations, constatations et appréciations, faisant ressortir que l’investisseur bénéficiait de l’information nécessaire, qu’étant averti, il n’avait pas à être mis en garde et qu’il n’était pas créancier d’un devoir de conseil de la part du prestataire de services d’investissement, de sorte qu’il n’avait pu subir de préjudice causé par son éventuel manquement à son obligation de s’enquérir de sa situation financière, la cour d’appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la troisième branche, a légalement justifié sa décision » (Cass. Com., 27 mai 2014, n°09-13803)

Qu’en est-il de la situation d’un investisseur profane ?

Lorsqu’un investisseur profane essaie d’engager la responsabilité d’un PSI, c’est bien qu’il a subi un préjudice en raison de l’absence de résultat de l’investissement voire d’une perte.

L’information sur le produit peut être correcte, mais sa transmission par le PSI peut ne pas être adéquate et pas comprise par le client.

L’autonomie de l’obligation de s’informer trouverait alors toute sa justification.

Benjamin BLANC Avocat à la Cour bblanc-avocat.fr