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L’initiative des poursuites pénales : comment faire face à un classement sans suite ? Par Clément Stievet, Avocat.
Parution : lundi 30 octobre 2017
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Il n’est pas rare que le terme de « plainte » soit galvaudé, en étant abusivement attribué à la matière civile ou confondu avec des notions voisines (main courante, assignation…). Derrière ce mot, parfois complexe à saisir, se cache une définition pourtant simple : la plainte est l’information portée à la connaissance du Procureur de la République, soit directement soit par l’intermédiaire de ses services (Commissariat de Police ou Gendarmerie en principe), de la commission d’une infraction dont on a été victime (art. 17 et 40 du Code de procédure pénale). S’agissant d’une simple information, le Procureur de la République reste libre de donner suite à la plainte déposée, ou de la classer sans suite : il s’agit là du principe d’opportunité des poursuites (art. 40-1 du Code de procédure pénale). Dans ce dernier cas, la victime s’estime souvent désarmée, estimant que le responsable de son préjudice ne sera jamais jugé, ni même poursuivi, pour l’infraction commise.

Pourtant, le Code de procédure pénale offre un éventail de dispositions permettant à la victime de passer outre le classement sans suite ou l’absence de réponse du Procureur de la République, et ainsi aboutir à la condamnation de l’auteur de l’infraction, et subséquemment à la réparation du préjudice.

Il convient néanmoins de préciser que certains motifs de classement sans suite justifieront que l’affaire ne soit jamais jugé (absence d’infraction, extinction de l’action publique et irresponsabilité de l’auteur notamment).

Toutefois, dans tous les cas où le classement sans suite est motivé par une raison d’opportunité répressive (infraction insuffisamment caractérisée, préjudice ou trouble peu important causé par l’infraction ou auteur inconnu notamment), certaines procédures permettront d’aboutir à la condamnation de l’auteur de l’infraction. Encore faut-il distinguer, le cas où le dossier est en état d’être jugé (I), et le cas où les preuves sont insuffisantes à juger immédiatement l’affaire (II).

I- La citation directe, lorsque l’affaire est en état d’être jugée

Le Procureur de la République ne détient pas le monopole de la citation directe, de sorte que, au visa des articles 392 et suivants du Code de procédure pénale, la victime a la possibilité d’attraire directement – c’est-à-dire sans enquête, ni instruction – l’auteur de l’infraction devant la juridiction de jugement.

Cette possibilité est toutefois triplement limitée :

Cette procédure, bien que limitée par les trois réserves ci-avant exposées, bénéficie de l’immense avantage de pouvoir outrepasser, voire de se passer, de la décision du Procureur de la République. Néanmoins, lorsque les éléments probatoires sont insuffisants, et spécialement lorsque l’auteur n’a pas été identifié, il conviendra de privilégier la plainte avec constitution de partie civile.

II- La plainte avec constitution de partie civile, lorsque des preuves doivent être recueillies

Dans l’hypothèse où les éléments probatoires sont insuffisants, la victime peut exiger de l’Institution judiciaire qu’elle pallie cette carence. Un juge d’instruction sera alors chargé de conduire ces investigations - à charge et à décharge - afin de faire la lumière sur les faits dénoncés.

Contrairement à la citation directe, la plainte avec constitution de partie civile ne nécessite pas d’autres formes que celles d’un courrier adressé au Doyen des juges d’instruction compétent sollicitant l’ouverture d’une instruction au regard des éléments probatoires déjà connus.

Toutefois, la recevabilité de cette plainte est doublement limitée :

Ces conditions remplies, l’information judiciaire sera alors ouverte, sur réquisitions du Procureur de la République, aux fins d’investigations, lesquelles se poursuivront jusqu’à ce que le juge d’instruction estime que celle-ci lui paraît terminée, et décide ainsi d’éventuels renvois des mis en examens devant la juridiction de jugement.

Cette brève synthèse illustre la place importante de la victime dans la procédure pénale, laquelle ne peut se réduire à la seule plainte de la victime auprès du Procureur de la République. Au contraire, la victime détient un pouvoir fondamental, celui de pouvoir mettre en œuvre les poursuites, exiger des investigations, et contraindre l’autorité judiciaire à statuer sur la responsabilité pénale. Les conditions de recevabilité sont, en définitive peu contraignantes, et même nécessaires dans une société démocratique, étant précisé, en outre, que celui injustement poursuivi pourra à son tour user de ces actions sur le fondement de la dénonciation calomnieuse.

Clément Stievet Avocat au Barreau de LYON www.stievet-avocat.fr

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