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Le concubinage en 3 points. Par Ilan Khayat, Notaire.
Parution : mercredi 25 septembre 2019
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En cours d’union, les concubins connaîtront le déménagement, une ou plusieurs acquisitions communes, la perte de l’être aimé.
Le présent article tente d’aborder quelques unes des grandes étapes de la vie en union libre, en préconisant les démarches à effectuer face à certaines circonstances, et guider le concubin vers le professionnel compétent le moment venu.

Point 1. Les prémices du couple : doit-on officialiser la relation ?

Le Code civil définit le concubinage comme une union de fait. Ainsi, il n’existe aucun formalisme, aucun contrat, ni aucune démarche administrative pour officialiser la relation.

Point 2. Comment organiser la cohabitation ?

L’emménagement chez le concubin locataire

Quelles démarches à effectuer pour le déménagement ?

Le concubin qui déménage pour rejoindre son compagnon ou sa compagne peut s’interroger sur les démarches à effectuer.

Le respect du préavis :
La première des démarches pour le concubin qui déménage, est de notifier à son propriétaire son préavis, qui est en principe de trois mois ; ce délai est toutefois réduit dans certaines zones à un mois.

Le suivi du courrier à la Poste :
Il faut également penser à faire suivre son courrier par les services de La Poste.

La déclaration de changement d’adresse :
Le concubin en déménagement ne devra pas oublier de déclarer son changement d’adresse ; ce changement peut se faire aisément sur internet sur le site Service-Public.fr (cette démarche permet en une seule opération, d’informer du déménagement différents organismes tels que les impôts, EDF, la CPAM, Pôle Emploi…). La nouvelle adresse devra être inscrite également sur la carte grise. Le concubin qui emménage devra également s’inscrire sur les listes électorales de sa nouvelle commune.

Informer les différents prestataires ainsi que son employeur :
L’information devra être transmise aux organismes qui gèrent les comptes bancaires, l’assurance habitation locataire, l’assurance-automobile, et les assurances-vie. L’employeur devra également être averti du déménagement.

Est-il opportun de modifier le contrat de bail ?

Le concubin qui emménage chez sa campagne ou son compagnon peut se demander s’il est utile, voire nécessaire que le contrat de bail soit modifié, afin qu’il soit également mentionné comme locataire. Avant d’évoquer la pertinence de cette démarche, il convient de préciser que cet avenant au bail implique l’accord du bailleur, et n’est donc d’automatique.
Ceci étant précisé, est-il opportun que le concubin soit mentionné comme colocataire ? La réponse tient en deux points : être colocataire apporte plus de sécurité au concubin, mais également plus d’engagement juridique vis-à-vis du bailleur.

Plus de sécurité :
En tant que colocataire, vous détiendrez un titre justifiant de votre occupation de l’appartement. Vous serez ainsi protégé contre les risques que votre compagne/compagne vous chasse de l’appartement suite à une forte dispute, ou bien encore que le bailleur vous expulse en cas de séparation et de départ de la compagne ou du compagnon qui aurait été seul locataire si le bail n’avait pas été changé.

Plus d’engagement :
Toutefois, il y a un prix à cette sécurité. En tant que colocataire, le concubin est tenu juridiquement au paiement du loyer et à toutes les obligations prévues dans le contrat de bail. De plus, il est extrêmement fréquent dans les baux d’habitation que soit prévu ce que l’on appelle une clause de solidarité entre les colocataires, ce qui a pour conséquence que le bailleur a la faculté d’exiger le règlement complet du loyer à un seul des locataires (qui pourra de son côté demander le remboursement à son/sa concubin(e) pour ce qu’il a davantage payé par rapport à sa part de loyer, avec le risque qu’il ou elle soit devenu(e) insolvable).

L’achat en commun.

Les concubins peuvent aussi prendre la décision d’acquérir ensemble le bien qui constituera leur habitation principale. Les concubins se trouveront ainsi soumis au régime de l’indivision.

Quelles sont les précautions à prendre lors de l’acquisition du bien immobilier ?

Quand les concubins n’effectuent pas des apports égaux pour l’acquisition du bien, mais qu’ils prévoient un remboursement d’emprunt moitié chacun pour le complément, il est impératif de prévoir dans le titre de propriété que chacun soit propriétaire proportionnellement à son financement dans le coût global d’acquisition (prix + frais d’acquisition).

Quelle attitude adopter en cours de remboursement d’emprunt ?

Il est préconisé, dans la mesure du possible, que les concubins remboursent l’emprunt dans les quotités de contribution à la charge d’emprunt qui auront été fixées dans le titre de propriété (la charge de remboursement d’emprunt est la plupart du temps déterminée à concurrence de moitié pour chaque concubin). Dans l’hypothèse où un des concubins rembourse davantage, il lui est vivement recommandé de conserver la preuve de son remboursement supplémentaire (conservation des relevés de compte ou preuve du virement avec mention du montant viré). Il pourra ainsi justifier de son droit à restitution s’il le désire le jour de la vente du bien, ou en cas de rupture.

Comment procéder lors de la réalisation de travaux sur le bien indivis ?

Les travaux de conservation sur le bien (toiture, chauffage…), ainsi que les travaux d’amélioration (extension, création d’un nouvel étage…), sont des dépenses qui concernent l’indivision. Il faut dans ce cas, dans la mesure du possible, que chaque concubin supporte les frais dans la proportion de propriété fixée dans le titre.
Le concubin qui paie davantage devra conserver les preuves de son règlement, afin qu’il puisse exiger des restitutions à la dissolution de l’indivision.

Qui doit payer les charges et impôts sur le bien et dans quelle proportion ?

Il faut distinguer les charges relatives à l’occupation personnelle du copropriétaire (entretien courant, eau, chauffage collectif), de celles qui concernent le propriétaire en cette qualité (toutes les autres charges : taxe foncière, taxe d’habitation, assurance, appels pour travaux…).

Les charges liées à l’occupation :
elles ne sont dues que par l’occupant. En cours de vie commune, elles seront donc supportées par les deux concubins moitié chacun (quelles que soient les quotités d’acquisition). Si un seul des concubins occupent le bien, il sera seul tenu au règlement de ces charges, même s’ils sont tous les deux propriétaires du bien en question.

Les autres charges :
elles sont dues par les concubins, chacun dans la proportion de ses droits fixés dans le titre de propriété. Le concubin qui aura seul régler ces charges pourra exiger des restitutions au moment du partage (séparation, vente, décès).

Point 3 : Comment préparer au mieux sa succession et protéger son concubin survivant ?

Des solutions qui permettent de protéger a minima le concubin survivant sans révolutionner le mode de conjugalité existent. Toutefois, la recherche de la meilleure des protections possibles passera par une modification du statut du compagnon ou de la compagne.

L’établissement du testament : une nécessité absolue.

Les concubins ne présentent entre eux aucun lien par le sang ou par l’alliance. Ils ne sont pas héritiers l’un de l’autre, et ne peuvent prétendre chacun, à aucuns droits dans la succession de l’autre. Il est donc impératif que chaque concubin qui désire faire de son compagnon ou sa compagne son héritier, fasse un testament. Pour la forme (testament olographe, authentique, mystique…) et le contenu de ce testament (legs universel, à titre universel, particulier), il convient de se rapprocher de son notaire, car chaque situation implique une rédaction appropriée.

La fiscalité de la transmission entre concubins.

L’absence de lien légalement reconnu aux concubins est fiscalement pénalisante pour le concubin survivant qui s’est trouvé légataire du concubin prédécédé. Les biens légués sont taxés à 60% de leur valeur, soit un impôt de plus de la moitié de la valeur des biens légués.

Minimiser les frais de succession.

Utilisation de techniques pertinentes lors de l’acquisition.

Différentes techniques sont envisageables lors de l’acquisition des biens que les concubins souhaiteraient transmettre au survivant d’entre eux : acquisition en démembrements croisés, tontine, constitution de société avec pacte tontinier sur les parts de société ; lors de votre acquisition, votre notaire pourra vous conseiller au mieux, et surtout écarter les pièges à éviter.

L’ouverture vers d’autres modes de conjugalité.

La conclusion d’un pacte civil de solidarité, quelle amélioration ?

La loi ne reconnaît pas plus au partenaire de PACS survivant le statut d’héritier. Toutefois, si les partenaires, bien conseillés, ont eu la prudence de rédiger des testaments afin de se désigner chacun légataire l’un de l’autre, les biens transmis se trouvent totalement exonérés de tous impôts sur la succession. Ainsi, en se pacsant, le partenaire survivant évite la lourde fiscalité portée à 60% de la valeur des biens transmis, qui aurait été due s’ils le couple était resté au stade du concubinage.

La célébration d’un mariage, quelle protection supplémentaire ?

Contrairement au concubin et au partenaire de PACS, le conjoint survivant est un héritier légal. Ainsi, même en l’absence de testament, le conjoint survivant détient des droits dans la succession de l’époux prédécédé.

Tout comme le partenaire de PACS survivant, le conjoint survivant est totalement exonéré d’impôts sur la succession.

De plus, il dispose d’autres dispositions favorables, lui permettant d’avoir davantage de droits dans la succession, des outils de transmission plus diversifiés (donation entre époux, avantages matrimoniaux), et un risque moindre de remise en question de ces derniers même lorsqu’il existe des héritiers réservataires (descendants du défunt, devant recevoir une part incompressible de la succession) car la loi lui accorde une surface d’exécution des droits successoraux plus étendue que celle reconnue à tout autre bénéficiaires de dons ou legs (ce que l’on appelle techniquement la quotité disponible spéciale).

Sans oublier que, contrairement au statut du survivant dans les autres modes de conjugalité, le conjoint survivant bénéficie de la pension de réversion.

Ilan Khayat, Notaire à Croissy-sur-Seine [->etudecroissy@paris.notaires.fr] 01.39.52.27.65 [->https://khayat-croissy.notaires.fr]