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L’instauration du principe de l’exécution provisoire de droit. Par Aude du Parc, Avocat.
Parution : lundi 16 décembre 2019
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Le décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile instaure notamment le principe de l’exécution provisoire de droit.

Les dispositions du décret relatives à l’exécution provisoire de droit sont applicables aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020.

Article mis à jour par son auteure en avril 2020.

Le Code de procédure civile est ainsi modifié :

1° L’article 489 du code de procédure civile devient :
« En cas de nécessité, le juge peut ordonner que l’exécution de l’ordonnance de référé aura lieu au seul vu de la minute. »

En référé, le caractère exécutoire à titre provisoire des ordonnances anciennement prévu à l’alinéa 1 de l’article 489 est donc supprimé.

L’article 489 du Code de procédure civile ne comprend désormais qu’un seul alinéa.

2° Le chapitre IV du titre XV du livre Ier est remplacé par les dispositions suivantes :

« Art. 514.-Les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. »

Le principe est donc que l’exécution provisoire est de droit.
En vertu de ce principe, les parties n’ont pas à solliciter dans leurs écritures que le juge ordonne l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

En revanche, il appartiendra à la partie qui y a intérêt, souvent le défendeur, de systématiquement demander au juge de ne pas ordonner l’exécution provisoire d’autant plus que l’omission de cet oubli peut avoir des conséquences désastreuses pour elle, comme il sera vu ci-après.

Il existe toutefois des exceptions tenant à la loi et à l’appréciation des juges du fond.

Section 1.

L’exécution provisoire de droit.

Art. 514-1.-« Le juge peut écarter l’exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire.

Il statue, d’office ou à la demande d’une partie, par décision spécialement motivée.
Par exception, le juge ne peut écarter l’exécution provisoire de droit lorsqu’il statue en référé, qu’il prescrit des mesures provisoires pour le cours de l’instance, qu’il ordonne des mesures conservatoires ainsi que lorsqu’il accorde une provision au créancier en qualité de juge de la mise en état.
 »

Afin de rendre sa décision, le juge peut d’office ou à la demande d’une partie, écarter l’exécution provisoire de la décision en tenant compte de la nature de l’affaire ou des conséquences qui résulteraient d’une exécution provisoire.

C’est le sens des alinéas 1 et 2 de l’article 514-1 du Code de procédure civile.

En revanche, le juge a une compétence liée « lorsqu’il statue en référé, qu’il prescrit des mesures provisoires pour le cours de l’instance, qu’il ordonne des mesures conservatoires ainsi que lorsqu’il accorde une provision au créancier en qualité de juge de la mise en état » en vertu de l’alinéa 3 de l’article 514-1 du Code de procédure civile.

Il s’agit d’une exception à l’exception puisque dans les cas visés à l’alinéa 3 de l’article 514-1 du Code de procédure civile le juge ne dispose pas d’un pouvoir d’appréciation.

Il est tenu d’ordonner l’exécution provisoire.

« Art. 514-2.-Sans préjudice des dispositions de l’article 514-3, l’exécution provisoire de droit ne peut être écartée que par la décision en cause. »

« Art. 514-3.-En cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.
La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire n’est recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation, l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

En cas d’opposition, le juge qui a rendu la décision peut, d’office ou à la demande d’une partie, arrêter l’exécution provisoire de droit lorsqu’elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives. »

En cas d’appel, la partie qui a succombé en première instance et dont la décision de condamnation est assortie d’une exécution provisoire peut introduire une requête en suspension de l’exécution provisoire.

Cette requête est adressée au Premier Président de la Cour d’appel et doit notamment contenir un exposé sur l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision attaquée.

Le requérant devra également justifier que l’exécution provisoire de la décision risque de lui causer un préjudice au regard des conséquences manifestement excessives qui résulteraient de cette exécution.

Telle est l’économie de l’alinéa 1 de l’article 514-3 du Code de procédure civile.

L’alinéa 2 de l’article 514-3 du Code de procédure précise les conditions de recevabilité de la requête en suspension de l’exécution provisoire.

Si le requérant a comparu en première instance et qu’il n’a formulé aucune observation sur l’exécution provisoire, alors il doit non seulement remplir les conditions prévues à l’alinéa 1, soit justifier d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et exposer les risques auxquels il s’expose en exécutant provisoirement la décision, mais aussi démontrer que ces risques se sont révélés postérieurement à la décision de première instance.

L’objectif poursuivi est de contraindre les parties comparantes à évoquer devant le premier juge la question de l’exécution provisoire et de ses effets, et d’éviter conséquemment que leur négligence n’aboutisse à l’engorgement du Cabinet du Premier Président de la Cour d’appel.

Dans l’hypothèse où la décision ordonnant l’exécution provisoire a été rendue par défaut, la partie contre laquelle l’exécution provisoire a été ordonnée peut, dans le cadre de l’opposition formée par elle, demander au juge de suspendre l’exécution provisoire si cette exécution est susceptible d’entraîner pour elle des conséquences excessives.

Le juge peut, d’office, suspendre l’exécution provisoire pour les mêmes raisons.

« Art. 514-4.-Lorsque l’exécution provisoire de droit a été écartée en tout ou partie, son rétablissement ne peut être demandé, en cas d’appel, qu’au premier président ou, dès lors qu’il est saisi, au magistrat chargé de la mise en état et à condition qu’il y ait urgence, que ce rétablissement soit compatible avec la nature de l’affaire et qu’il ne risque pas d’entraîner des conséquences manifestement excessives. »

« Art. 514-5.-Le rejet de la demande tendant à voir écarter ou arrêter l’exécution provisoire de droit et le rétablissement de l’exécution provisoire de droit peuvent être subordonnés, à la demande d’une partie ou d’office, à la constitution d’une garantie, réelle ou personnelle, suffisante pour répondre de toutes restitutions ou réparations. »

En vertu de ce texte, lorsque le juge estime qu’il n’y a pas lieu à ordonner ou à rétablir l’exécution provisoire, il peut, même d’office, demander au débiteur de constituer une garantie au profit du créancier.

Il serait en effet regrettable que d’une part le débiteur soit contraint d’exécuter une décision alors même que cette exécution risquerait de lui être hautement préjudiciable, et que d’autre part le créancier soit dépourvu de tout moyen de faire exécuter sa décision particulièrement si le débiteur décidait d’organiser son insolvabilité.

Pour concilier ces deux intérêts, le juge peut demander au débiteur de constituer une garantie (nantissement de parts sociales, consignation de fonds, garantie à première demande…) afin que le créancier ne se retrouve pas démuni face à un débiteur de mauvaise foi.

« Art. 514-6.-Lorsqu’il est saisi en application des articles 514-3 et 514-4, le premier président statue en référé, par une décision non susceptible de pourvoi. »

Section 2.

L’exécution provisoire facultative.

« Art. 515.-Lorsqu’il est prévu par la loi que l’exécution provisoire est facultative, elle peut être ordonnée, d’office ou à la demande d’une partie, chaque fois que le juge l’estime nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire.
Elle peut être ordonnée pour tout ou partie de la décision.
 »

« Art. 516.-L’exécution provisoire ne peut être ordonnée que par la décision qu’elle est destinée à rendre exécutoire, sous réserve des dispositions des articles 517-2 et 517-3. »

« Art. 517.-L’exécution provisoire peut être subordonnée à la constitution d’une garantie, réelle ou personnelle, suffisante pour répondre de toutes restitutions ou réparations. »

Le juge peut mettre à la charge du bénéficiaire de l’exécution provisoire la constitution d’un certain nombre de garanties au cas où celui-ci serait amené à restituer ou dédommager l’exécutant, en vertu de l’article 517 du Code de procédure civile.

Il s’agit par exemple d’éviter que la réformation ou l’annulation d’une décision de première instance ne soit préjudiciable à la partie qui a provisoirement exécuté la décision notamment lorsque le bénéficiaire de l’exécution se retrouve dans l’impossibilité de restituer ce qui a fait l’objet de l’exécution.

« Art. 517-1.-Lorsque l’exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d’appel, que par le premier président et dans les cas suivants :
1° Si elle est interdite par la loi ;
2° Lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux articles 517 et 518 à 522.
Le même pouvoir appartient, en cas d’opposition, au juge qui a rendu la décision lorsque l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.
 »

Le Premier Président ne peut favorablement accueillir la demande de suspension de l’exécution provisoire que lorsque cette exécution a été ordonnée en violation d’une interdiction légale d’assortir la décision d’une telle exécution ou lorsqu’il existe des raisons sérieuses de croire que la décision de première instance sera réformée ou annulée.

En tout état de cause, le Premier Président peut ordonner la constitution d’un certain nombre de garanties afin de neutraliser les conséquences manifestement excessivement qui pourraient résulter de la réformation ou de l’annulation de la décision de première instance.

« Art. 517-2.-Lorsque l’exécution provisoire a été refusée, elle ne peut être demandée, en cas d’appel, qu’au premier président ou, dès lors qu’il est saisi, au magistrat chargé de la mise en état et à condition qu’il y ait urgence. »

« Art. 517-3.-Lorsque l’exécution provisoire n’a pas été demandée, ou si, l’ayant été, le juge a omis de statuer, elle ne peut être demandée, en cas d’appel, qu’au premier président ou, dès lors qu’il est saisi, au magistrat chargé de la mise en état. »

« Art. 517-4.-Lorsqu’il est saisi en application des articles 517-1,517-2 et 517-3, le premier président statue en référé, par une décision non susceptible de pourvoi. »

Section 3.

Dispositions communes.

« Art. 518.-La nature, l’étendue et les modalités de la garantie prévue aux articles 514-5 et 517 sont précisées par la décision qui en prescrit la constitution. »

« Art. 519.-Lorsque la garantie consiste en une somme d’argent, celle-ci est déposée à la Caisse des dépôts et consignations ; elle peut aussi l’être, à la demande de l’une des parties, entre les mains d’un tiers commis à cet effet.
Dans ce dernier cas, le juge, s’il fait droit à cette demande, constate dans sa décision les modalités du dépôt.
Si le tiers refuse le dépôt, la somme est déposée, sans nouvelle décision, à la Caisse des dépôts et consignations.
 »

« Art. 520.-Si la valeur de la garantie ne peut être immédiatement appréciée, le juge invite les parties à se présenter devant lui à la date qu’il fixe, avec leurs justifications.
Il est alors statué sans recours.
La décision est mentionnée sur la minute et sur les expéditions du jugement.
 »

« Art. 521.-La partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l’exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.
En cas de condamnation au versement d’un capital en réparation d’un dommage corporel, le juge peut aussi ordonner que ce capital sera confié à un séquestre à charge d’en verser périodiquement à la victime la part que le juge détermine.
 »

« Art. 522.-Le juge peut, à tout moment, autoriser la substitution à la garantie primitive d’une garantie équivalente. »

Le décret précise ainsi les modalités selon lesquelles le premier juge, le Premier Président ou le Conseiller de la mise en état peut ordonner la constitution de garantie.
Il peut ainsi s’agir d’une garantie réelle ou d’une garantie personnelle.

« Art. 523.-Les demandes relatives à l’application des articles 514-5,517 et 518 à 522 ne peuvent être portées, en cas d’appel, que devant le premier président statuant en référé ou, dans les cas prévus aux articles 514-4,517-2 ou 517-3, devant le magistrat chargé de la mise en état dès lors qu’il est saisi. »

« Art. 524.-Lorsque l’exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu’il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d’appel, décider, à la demande de l’intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l’affaire lorsque l’appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d’appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l’article 521, à moins qu’il lui apparaisse que l’exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l’appelant est dans l’impossibilité d’exécuter la décision.
La demande de l’intimé doit, à peine d’irrecevabilité prononcée d’office, être présentée avant l’expiration des délais prescrits aux articles 905-2,909,910 et 911.
La décision de radiation est notifiée par le greffe aux parties ainsi qu’à leurs représentants par lettre simple. Elle est une mesure d’administration judiciaire.
La demande de radiation suspend les délais impartis à l’intimé par les articles 905-2,909,910 et 911.
Ces délais recommencent à courir à compter de la notification de la décision autorisant la réinscription de l’affaire au rôle de la cour ou de la décision rejetant la demande de radiation.
La décision de radiation n’emporte pas suspension des délais impartis à l’appelant par les articles 905-2,908 et 911. Elle interdit l’examen des appels principaux et incidents ou provoqués.
Le délai de péremption court à compter de la notification de la décision ordonnant la radiation. Il est interrompu par un acte manifestant sans équivoque la volonté d’exécuter. Le premier président ou le conseiller de la mise en état peut, soit à la demande des parties, soit d’office, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, constater la péremption.
Le premier président ou le conseiller de la mise en état autorise, sauf s’il constate la péremption, la réinscription de l’affaire au rôle de la cour sur justification de l’exécution de la décision attaquée. »

La non-exécution par l’appelant de la décision de première instance assortie d’une exécution provisoire ou l’absence de constitution de garantie est sanctionnée par la radiation de l’affaire si l’intimé en formule la demande auprès du Premier Président ou du Conseiller de la mise en état s’il en est désigné un.

Un tempérament est cependant prévu.

En effet, la radiation peut ne pas être prononcée si l’appelant n’est pas en mesure d’exécuter la décision déférée, ou si l’exécution entraînerait des conséquences manifestement excessives.

3° A l’article 1045, il est inséré un premier alinéa et est donc désormais rédigé comme suit :
« Le jugement qui statue sur la nationalité n’est pas de droit exécutoire à titre provisoire.
Le délai de p
ourvoi en cassation suspend l’exécution de l’arrêt qui statue sur la nationalité ; le pourvoi en cassation exercé dans ce délai est également suspensif. »

4° Après l’article 1054, il est inséré un article 1054-1 ainsi rédigé :
« Art. 1054-1.-La décision n’est pas de droit exécutoire à titre provisoire. »

5° L’article 1055-3, portant sur les procédures relatives au prénom, est complété d’un second alinéa et est donc désormais rédigé comme suit :
« Les demandes formées en application des dispositions du troisième alinéa de l’article 57 et du dernier alinéa de l’article 60 du code civil obéissent aux règles de la procédure en matière contentieuse applicable devant le tribunal de grande instance.
Toutefois, la décision n’est pas de droit exécutoire à titre provisoire
. »

6° A la section II bis du chapitre II du titre I du livre III, il est inséré un article 1055-10 ainsi rédigé :
« Art. 1055-10.-La décision du tribunal n’est pas de droit exécutoire à titre provisoire. » ;

7° Après l’article 1067, il est inséré un article 1067-1 ainsi rédigé :
« Art. 1067-1.-Le jugement n’est pas de droit exécutoire à titre provisoire. »

8° L’article 1074-1 devient :
« A moins qu’il n’en soit disposé autrement, les décisions du juge aux affaires familiales qui mettent fin à l’instance ne sont pas, de droit, exécutoires à titre provisoire.
Par exception, les mesures portant sur l’exercice de l’autorité parentale, la pension alimentaire, la contribution à l’entretien et l’éducation de l’enfant et la contribution aux charges du mariage, ainsi que toutes les mesures prises en application de l’article 255 du code civil, sont exécutoires de droit à titre provisoire.
 »

9° L’article 1149 est complété et devient :
« Les actions relatives à la filiation et aux subsides sont instruites et débattues en chambre du conseil.
Le jugement est prononcé en audience publique.
Il n’est pas de droit exécutoire à titre provisoire.
 »

10° L’article 1178-1 est complété et devient :
« La décision relative à l’adoption n’est pas de droit exécutoire à titre provisoire.
Le délai de pourvoi en cassation suspend l’exécution de la décision relative à l’adoption. Le pourvoi en cassation exercé dans ce délai est également suspensif.
 »

La loi prévoit que dans un certain nombre de matières l’exécution provisoire n’est pas de
droit.
Il en est ainsi :
- En matière de nationalité ;
- Et de l’état des personnes physiques (rectification ou modification des actes d’état
civil ; le choix du ou des prénoms de l’enfant ; changements de nom ou de prénoms ;
modification du sexe dans l’acte d’état civil et éventuellement du prénom de
l’intéressé, filiation ; l’absence) ;
- Les décisions du juge aux affaires familiales mettant fin à l’instance ;
- Les jugements statuant sur le divorce ou la séparation de corps pour lesquels les effets
sont suspendus en cas d’appel.

Aude du Parc, Avocat BESSARD du PARC AARPI [->http://avoparc.com]