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La place impérative de la signature de la caution. Par Jason Labruyère, Juriste.
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Parution : vendredi 10 janvier 2020
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Un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation, en date du 27 octobre 2019, vient rappeler l’importance de la place de la signature de la caution.
La Haute cour est venue censurer une décision d’appel qui avait considéré que l’acte de cautionnement indiquant la mention manuscrite de la caution en dessous de sa signature, mais suivie de son paraphe, était valable [1].
« Mais attendu que l’article L. 341-2 du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016, prescrit à peine de nullité que l’engagement manuscrit émanant de la caution précède sa signature ; qu’ayant constaté que la mention manuscrite n’était suivie d’aucune signature et que seul un paraphe était apposé sur la page sur laquelle celle-ci a été reproduite, la cour d’appel en a exactement déduit que l’engagement de caution était nul ; que le moyen n’est pas fondé. »
La censure est sans équivoque et le raisonnement très clair : le cautionnement d’une personne physique au profit d’un créancier professionnel est nul dès lors que la mention manuscrite n’est pas suivie de la signature de la caution et ce, même si la mention est suivie de son paraphe.
La chambre commerciale applique stricto sensu les articles L. 331-1 et L. 343-1 du Code de la consommation (anc. L. 341-2).
Avec cet arrêt, nous sommes, une nouvelle fois, face à une jurisprudence rigoureuse et pointilliste [2].
Ce qui est étonne face à la position plus souple de la première chambre civile qui, en 2016 [3], avait considéré comme valable un acte de cautionnement sur lequel la mention manuscrite se trouvait sous la signature mais suivie du paraphe de la caution.
Force est donc de constater que, même si un assouplissement jurisprudentiel en la matière est visible ces derniers temps [4], avec notamment en ligne de mire la future réforme du droit des sûretés [5], le formalisme imposé par le Code de la consommation doit être rigoureusement respecté. Pour autant, ne peut-on pas regretter une telle importance octroyée au formalisme de protection ? L’objectif est évident, en théorie. Mais, en pratique, une mention manuscrite en dessous de la signature de la caution vient-elle remettre réellement en cause la portée et le sens de l’engagement ? Une orthodoxie qui conforte un objectif légal de sécurité juridique, assurément. Beaucoup diront évidemment que la place de la signature, parachevant l’acte, est essentielle et reste le témoigne d’un consentement de son auteur.
Toutefois, le rôle de la signature dans un acte de cautionnement est bien différent de celui de la mention manuscrite (compréhension de la teneur de son engagement et preuve d’un consentement éclairé).
Par ailleurs, cette jurisprudence a le mérite de rappeler, qu’en pratique, il convient de prêter attention à la place requise de la signature, comme condition de validité de l’acte de cautionnement. Aussi, il faut noter que des modèles d’actes peuvent induire la personne physique, caution, à l’erreur (notamment avec des clauses pré-imprimées, la signature sur une page autre que celle de la mention, etc.). Par conséquent, la mise en forme des modèles doit être soignée par les directions juridiques des établissements de crédit afin d’éviter que, lors d’un rendez-vous de signature, une telle situation se présente...
Jason Labruyère - Juriste Financements Structurés[2] Pour des décisions similaires : Cass. com., 17/08/2013, n° 12-13.577 FS-PB ; Cass. Com., 01/04/2014, n° 13-15735 ; CA Versailles 24/09/2015, n° 13/06350 ; CA Rennes, 14/03/2017, n° 14/09632 ; pour un contre-exemple, Cass. com., 28/06/2016, n° 13-27245 (la cour de cassation admet que l’acte est valable alors que la signature se trouvait sur le côté de la mention et non en dessous).
[3] Cass. 1ère civ. 22/09/2016, n° 15-19.543 F-PB.
[4] Pour un exemple récent : Cass. com., 15/05/2019, n°17-28.827, P+B (le cautionnement dont l’acte ne mentionne aucune date n’est pas nul).
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