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Le droit de visite et/ou d’hébergement des grands-parents. Par Gauthier Lecocq, Avocat.
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Parution : vendredi 1er octobre 2021
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L’article suivant explique ce qu’est le droit de visite et/ou d’hébergement des grands-parents et comment le mettre en place.
L’article 371-4 du Code civil dispose que :
« L’enfant a le droit d’entretenir des relations personnelles avec ses ascendants. Seul l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à l’exercice de ce droit.
Si tel est l’intérêt de l’enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l’enfant et un tiers, parent ou non, en particulier lorsque ce tiers a résidé de manière stable avec lui et l’un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et a noué avec lui des liens affectifs durables. »
Le Code civil entend maintenir, dans la mesure du possible, les liens entre les grands-parents et leurs petits-enfants.
Ces liens participent à la construction de l’identité des jeunes enfants.
La Jurisprudence a consacré le principe selon lequel l’enfant dispose d’un véritable droit d’entretenir des relations personnelles avec ses grands-parents [1].
Les parents ne peuvent ainsi faire obstacle à de telles relations que si l’intérêt de l’enfant le commande [2].
En effet, seul l’intérêt supérieur de l’enfant peut faire obstacle à la fixation de droit de visite et/ou d’hébergement au profit des grands-parents.
Il existe des situations dans lesquelles le Juge refusera la demande formulée par les grands-parents, et notamment lorsque :
L’enfant mineur doté du discernement s’oppose expressément à rencontrer ses grands-parents ;
Le comportement des grands-parents met gravement en danger l’enfant ;
Les grands-parents ne sont pas capables/aptes à s’occuper de l’enfant ;
Etc.
La Jurisprudence s’est également intéressée à l’hypothèse particulière d’une demande de fixation d’un droit de visite et/ou d’hébergement de la part de grands-parents, dans un contexte important de conflit familial.
A cet égard, si l’enfant ne doit pas être victime des conflits familiaux, les Tribunaux relèvent que la seule mésentente entre les grands-parents et la mère de l’enfant, ou alors l’existence de conflits précédents entre les grands parents et les enfants, n’est pas systématiquement contraire à l’intérêt de l’enfant [3].
Il appartient au Juge aux Affaires Familiales d’apprécier la nature et la gravité de ce conflit, son impact sur l’ensemble des relations familiales et les risques qu’il est susceptible d’avoir sur l’équilibre et l’évolution de l’enfant [4].
De manière générale, les modalités de ce droit de visite et/ou d’hébergement des grands-parents sont fonction de l’âge des petits-enfants, de la distance des domiciles de chacun, des emplois du temps de chacun, etc.
Avant d’engager une action en justice, il est fortement recommandé aux grands-parents d’essayer de parvenir à un accord amiable avec les parents.
Il peut s’avérer opportun de proposer une médiation familiale par LRAR ou SMS ou courriel.
En cas de refus des parents ou d’échec de la médiation, les grands-parents doivent introduire une procédure devant le Juge aux Affaires Familiales du Tribunal Judiciaire dans le ressort duquel se trouve la résidence habituelle des petits-enfants.
Attention ! Si l’enfant fait l’objet d’un placement (chez un tiers, à l’Aide Sociale à l’Enfance, dans une famille d’accueil, etc.), le Juge compétent est le Juge des Enfants.
La saisine du Juge aux Affaires Familiales se réalise par la rédaction d’une assignation afin de fixation d’un droit de visite et/ou d’hébergement de grands-parents.
Le recours à un avocat est obligatoire pour ce type de procédure.
L’assignation doit être délivrée aux deux parents, même si ces derniers sont séparés ou divorcés.
Par ailleurs, il est indispensable de procéder à la dénonciation de l’assignation auprès du Parquet civil.
L’enfant mineur capable du discernement peut solliciter son audition par écrit auprès du Juge.
La durée de cette procédure est assez longue : il faut compter un an minimum.
La durée peut être allongée, si le Juge ordonne des mesures d’expertise psychologique/psychiatrique ou enquête sociale.
NB. La Cour de cassation prévoit la possibilité pour des grands-parents, n’ayant vu leurs petits-enfants qu’une seule fois depuis plusieurs années, d’engager une procédure en référé en raison de l’urgence à rétablir sans délai, des liens affectifs entre eux, et ce, dans l’attente de la décision du Juge aux Affaires Familiales saisi au fond [5].
Une fois la décision obtenue, les grands-parents peuvent rencontrer des difficultés à exercer leur droit de visite et/ou d’hébergement à l’égard des petits-enfants, en raison de l’attitude des parents.
Dans ces conditions, les grands-parents doivent d’abord rappeler aux parents de se mettre en conformité avec les dispositions du Jugement.
Si le refus des parents persiste, les grands-parents peuvent alors se rendre dans le Commissariat de Police ou le local de Gendarmerie le plus proche ou prendre directement attache auprès du procureur de la République, pour déposer plainte à l’encontre des parents du chef du non-représentation d’enfant.
Cette infraction est punie d’une peine d’an d’emprisonnement et d’une peine de 15 000 € d’amende, selon l’article 227-5 du Code pénal (voir notre précédent article « La non-représentation d’enfant »).
Il est alors important pour les grands-parents d’apporter ou de joindre à leur courrier tous les éléments permettant de caractériser l’infraction : les échanges de mails ou SMS avec les parents caractérisant le refus, une capture d’écran du journal d’appels du téléphone, une copie du Jugement rendu, etc…
Gauthier Lecocq Avocat au barreau de Versailles Cabinet Bariseel-Lecocq & Associés Aarpi Inter-Barreaux[1] Cass., Civ. 1ère, 1er décembre 1982, n°81-14.627 ; Cour d’appel de Poitiers, Chambre civile 4, 2 juillet 2008 : JurisData n° 2008-374576.
[2] Cass., Civ. 1ère, 14 janvier 2009, n° 08-11.035.
[3] Cass., Civ. 1ère, 12 février 2014, n° 13-13674 ; Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 6ère Chambre C, 7 octobre 2014, n°14/04199 ; Cour d’appel de Montpellier, 1ère Chambre, Section C, 14 janvier 2015, n° 13/08912 ; Cour d’appel de Grenoble, Chambre des affaires familiales, 24 février 2015, n° 14/00493.
[4] Cour d’appel de Nancy, 3ère Chambre civile, 25 avril 2014, n°14/01098.
[5] Cass., Civ. 1, 1er février 1983, n°81-16.815.
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