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Les nouveaux bureaux, écoles, collèges et lycées désormais soumis aux exigences de performance énergétique. Par Edouard Chauvaux, Avocat.
Parution : vendredi 4 novembre 2022
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Dans la suite logique des dispositions relatives à la mise aux normes des locaux loués à un usage d’habitation, le décret n° 2022-305 du 1er mars 2022 a étendu les dispositions du Code de la construction et de l’habitation relatives à la performance énergétique des bâtiments nouvellement construits aux bureaux et établissement d’enseignements primaires et secondaires, présentant une parfaite occasion pour revenir sur ces dispositions et les modalités de leur application.

Le Code de la construction et de l’habitation prévoit, en matière de construction de bâtiments nouveaux, des obligations spécifiques en matière de performance énergétique des locaux ainsi construits, par l’élaboration de plusieurs critères tenant notamment au besoin en énergie du bâtiment, à sa consommation d’énergie ou encore à la quantité de carbone issu de l’atmosphère et stocké dans le bâtiment.

Comme évoqué ci-avant, le décret n° 2022-305 du 1er mars 2022 est venu ajouter aux dispositions du Code de la construction et de l’habitation des mentions particulières étendant leur effet aux bureaux et établissements d’enseignement primaires et secondaires (à savoir écoles maternelles, écoles primaires, collèges et lycées). Il convient donc de passer en revue la teneur de ces obligations (I) puis d’évoquer brièvement le contrôle de leur respect et les sanctions encourues à cet égard (II).

I. Sur la teneur des obligations prévues par le Code de la construction.

L’article L172-1 du Code de la construction et de l’habitation prévoit la fixation par décret du Conseil d’État de résultats minimaux en matière de stockage du carbone.

Ces résultats minimaux ainsi que les modalités de leur calcul sont fixées par les articles R172-1 et suivants du même code.

En premier lieu, l’article R172-1 du Code de la construction et de l’habitation détermine le champ d’application de ces obligations. Ainsi, l’ensemble de ces dispositions s’appliquent, concernant les bureaux et établissements d’enseignement primaires et secondaires :
- A la construction de bâtiments ou parties de bâtiments faisant l’objet d’une demande de permis de construire ou d’une déclaration préalable de travaux déposée à compter du 1er juillet 2022 ;
- A l’ensemble des constructions de bâtiments ou parties de bâtiments exonérés de demande de permis de construire ou de déclaration préalable de travaux à compter du 1er janvier 2023.

Il convient de souligner que ces dispositions ne concernent que la construction de nouveaux bâtiments ou de nouvelles parties de bâtiments. Elles ne concernent notamment pas les bâtiments déjà existants.

L’article R172-4 de ce code liste à cet égard les domaines soumis à des résultats minimaux pour ces nouvelles constructions, dont notamment :
- Le besoin en énergie du bâtiment ;
- La consommation d’énergie primaire et la consommation d’énergie primaire non renouvelable du bâtiment ;
- L’impact sur le changement climatique de cette consommation d’énergie primaire ;
- L’impact sur le changement climatique lié aux composants du bâtiments concernant notamment leur transport, leur installation, leur utilisation, leur maintenance, leur réparation et leur remplacement en fin de vie ;
- Le nombre de degrés d’heures d’inconfort estival ;
- A titre informatif, l’impact sur le changement climatique du bâtiment sur l’ensemble de son cycle de vie ;
- A titre informatif, la quantité de carbone issu de l’atmosphère et stocké dans le bâtiment.

Chacun de ces critères dispose de modalités de calcul développées à l’annexe de cet article et tenant notamment compte de l’usage du bâtiment et de son altitude, en vue de l’élaboration de scores devant atteindre ou ne pas dépasser les seuils fixés à cette annexe.

Compte-tenu de la longueur et de la complexité de ces modalités de calcul, celles-ci ne seront pas détaillées au présent article. On soulignera cependant que les critères établis tiennent compte aussi bien de la construction et de l’usage du bâtiment que du devenir des matériaux au moment de leur remplacement.

II. Sur le contrôle du respect des obligations de performance énergétique.

Afin d’assurer la portée des obligations évoquées ci-avant, le Code de la construction et de l’habitation prévoit le contrôle de leur respect et les sanctions encourues en cas d’infraction.

Ces dispositions existaient avant l’extension des obligations de performance énergétique aux bureaux et établissements d’enseignement primaire et secondaire, mais il apparaît utile d’en rappeler la teneur ici.

L’article L181-1 du Code de la construction et de l’habitation établit la possibilité notamment pour le préfet, le maire de la commune de construction et leurs délégués de procéder au contrôle des constructions en cours ou achevées depuis moins de six ans et d’exiger la communication des documents techniques y afférents.

L’article L181-4 du même code prévoit une amende de 45.000 euros, outre une peine d’emprisonnement de six mois en cas de récidive, le fait pour les utilisateurs du sol, les bénéficiaires de travaux, les architectes, les entrepreneurs ou toute autre personne responsable de l’exécution de travaux de méconnaître notamment les dispositions de l’article L172-1 du Code de la construction ainsi que les dispositions réglementaires prises pour leur application.

Enfin, l’article L181-6 de ce code prévoit la possibilité pour l’autorité administrative, en cas de condamnation, de statuer sur la mise en conformité des lieux ou des ouvrages avec les dispositions règlementaires, l’autorisation administrative ou le permis de construire, ou sur la démolition des ouvrages et la remise des lieux dans leur état antérieur.

Les obligations de performance énergétique des bureaux et établissement d’enseignement primaire et secondaire sont donc sanctionnées par une amende concernant à la fois les bénéficiaires des travaux, maîtres d’ouvrages, entrepreneurs et architectes mais également par une possible mise en conformité ou démolition des ouvrages non conformes.

La mise en œuvre de ces sanctions dépend cependant entièrement de contrôles à la charge de l’autorité administrative. Au regard de l’aspect particulièrement technique et occulte des obligations de performance énergétique, nécessitant de nombreux calculs pour l’établissement des scores soumis aux seuils fixés par le Conseil d’État, il y a lieu de craindre que les infractions à ces obligations de performance énergétique soient en pratique malaisées à contrôler.

Edouard Chauvaux, Avocat au Barreau de Paris [->edouard.chauvaux@cha-avocat.com]